Monsieur le secrétaire d'État, vous avez un lourd héritage à assumer, celui du précédent gouvernement qui n'a eu de cesse de renier la parole qu'il avait donnée aux anciens combattants et de provoquer l'inexorable dégradation de votre budget.
À périmètre constant, le budget des anciens combattants a chuté de 14 % de 2002 à 2007 et, si l'on intègre le poids de l'inflation, cela représente près de 25 % en euros constants. L'effort budgétaire de la nation pour répondre à son devoir de reconnaissance envers les anciens combattants et de solidarité à l'égard de leurs veuves a été amputé d'un quart. Lourd passif, monsieur le secrétaire d'État ! Votre budget est malheureusement placé sous le signe de la continuité puisqu'il est encore en baisse. Alors, il est évident que vous ne pourrez répondre aux promesses qui furent faites par l'État et les gouvernements qui vous ont précédé. Pourtant, les anciens combattants ont droit au respect de la parole donnée par la nation tout entière.
Les engagements pris par le passé doivent nous lier. En conséquence, nous devons assumer dès aujourd'hui la promesse qui avait été faite d'atteindre l'indice 130 pour la retraite mutualiste du combattant. Le Gouvernement s'était engagé en 2002 à ce que la revalorisation atteigne ce seuil en 2007, mais, après un coup de bluff en 2003 votre prédécesseur s'est arrêté à 125 points. Ce qui n'a pas été fait en 2006, faites-le en 2008, monsieur le secrétaire d'État ! Il manque cinq point pour faire le compte. Hélas, rien n'est inscrit dans votre budget, et c'est inacceptable !
Comment demander aux citoyens de respecter l'État si celui-ci ne respecte pas sa parole ? Il ne s'agit pas que d'une question de budget ; c'est une question de principe. Et ne nous opposez pas les arguments fallacieux du précédent gouvernement, qui, pour manquer à sa parole, osait affirmer que cette mesure s'appliquerait à des nantis ! Cet argument est reçu comme une insulte. D'abord, il est faux. Les anciens combattants sont représentatifs de la population française, avec, hélas, beaucoup plus de pauvres que de riches. Ensuite, si une mesure est juste car elle relève du droit à réparation, elle ne saurait être écartée au motif qu'elle profite plus ou moins à telle ou telle partie de la population. La mesure est juste, un point c'est tout, et elle doit à ce titre être appliquée ! Donc, monsieur le secrétaire d'État, pas de couplet sur les nantis ! Nous attendons de voter un amendement gouvernemental majorant de cinq points la retraite mutualiste, et non de deux points. Le coût total d'une telle mesure serait inférieur à 14 millions d'euros, c'est-à-dire huit fois moins que la baisse de votre budget.
Autre engagement du passé, mais que nous souhaitons voir tenu par le nouveau gouvernement : la retraite du combattant. Elle devait atteindre 48 points d'indice PMI à la fin de la législature précédente. Votre prédécesseur avait abondé de deux points cette pension, c'est-à-dire 150 francs par an en début de législature, pour faire bonne impression à la veille des élections, et puis plus rien ! Elle reste à ce jour figée à 488 euros. À sa création, la retraite du combattant correspondait à une pension militaire d'invalidité à 10 % ou à un mois de salaire ouvrier. Le décrochage est donc patent et les anciens combattants ont perdu près de 25 % du pouvoir d'achat qu'elle représentait. La revalorisation est donc juste et indispensable. C'est pourquoi nous vous demandons d'abonder la pension dès cette année de trois points, car, si vous faites la même chose que votre prédécesseur, l'écart se creusera encore. Les anciens combattants sont particulièrement raisonnables et ils acceptent l'étalement, mais étalement signifie engagement, et non pas coup de bluff à l'arrivée et cadeau avant les élections !
Enfin, nous avons voté l'année dernière la création d'une allocation différentielle de solidarité pour les veuves d'anciens combattants les plus démunies. Pas une voix n'avait manqué sur ces bancs pour soutenir cette création. Mais la mise en oeuvre du dispositif doit être améliorée. Dans un souci de transparence et de contrôle parlementaire, de pérennité aussi, nous souhaitons que cette allocation fasse l'objet d'une ligne budgétaire propre. Nous pourrions ainsi, avec les anciens combattants, suivre son évolution. Aujourd'hui, l'enveloppe est gérée par l'ONAC sans que cela entre dans la LOLF et sans contrôle parlementaire direct. Au passage, il semblerait que les crédits alloués pour 2007 aient été sous-consommés en raison de la publication tardive du décret d'application et d'une application trop stricte des critères de ressources. La gestion pointilleuse de certaines commissions départementales d'attribution a conduit au rejet de plus de 80 % des dossiers. Si les critères sont trop restrictifs, peut-être faut-il une loi, un amendement pour les assouplir, notamment concernant la définition des ressources prises en considération et les justificatifs à produire dans le dossier d'attribution.
Enfin, cette allocation n'est versée qu'aux veuves disposant de ressources inférieures à 550 euros par mois et jusqu'à concurrence de cette somme. Je souhaite que nous modifiions ce plafond, qui est dérisoire, pour le porter, cette année, à 640 euros, ce qui représente le minimum vieillesse, et, l'an prochain, à 817 euros, ce qui correspond au seuil de pauvreté. Ne trouvez-vous pas légitime, monsieur le secrétaire d'État, que les veuves d'anciens combattants puissent vivre leur retraite au-dessus de ce seuil ?
Vous le voyez, les attentes des anciens combattants et des nombreux parlementaires qui les soutiennent sont importantes symboliquement, mais modestes financièrement. Alors, monsieur le secrétaire d'État, partez d'un bon pied pour les cinq années à venir et soldez le passif du gouvernement précédent, en soutenant nos demandes relatives à la retraite mutualiste, à l'allocation de solidarité et à la retraite du combattant. Ce serait un bon début !
Demandez pour cela la sanctuarisation si souvent promise de votre budget. Elle ne coûtera pas cher à la nation, puisqu'elle représente bien moins que les cadeaux fiscaux consentis aux plus grosses fortunes de notre pays. Obtenez la sanctuarisation et, l'an prochain, nous pourrons vous féliciter. Car, pour ce budget 2008, nous ne pouvons que constater qu'il s'agit d'un début très insuffisant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)