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Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 24 juin 2008 à 9h30
Questions orales sans débat — Droit applicable à la publicité en faveur des boissons alcoolisées sur internet

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative :

Monsieur le député Serge Poignant, vous appelez mon attention sur la publicité en faveur de l'alcool sur Internet.

Comme vous l'avez indiqué, si la loi dite Évin n'a pas mentionné Internet dans la liste des supports autorisés, ce n'est pas parce qu'elle souhaitait l'exclure, mais parce qu'à l'époque – lors du vote de la loi date de décembre 1990 –, Internet n'existait pas.

La loi Évin a donné une liste limitative des supports autorisés pour la publicité en faveur de l'alcool. Cette interdiction de publicité sur Internet a été rappelée par le tribunal de grande instance de Paris et confirmée par la cour d'appel de Paris le 13 février 2008.

Cependant, il est intéressant d'analyser plus finement le jugement. Le site d'une grande marque de bière – pour ne pas en faire la publicité dans cette enceinte – poursuivie par l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie ne se limitait pas à de la vente en ligne. En effet, sur ce site figuraient notamment des jeux, avec des animations sonores, des visuels attractifs et des slogans non autorisés par la loi Évin dans des sites de vente « en dur ».

En outre, l'un des considérants du jugement mentionne que le site condamné n'était pas destiné directement à la vente. Ce considérant laisse entendre que la position du tribunal aurait pu être différente s'il s'était agi uniquement d'un site de vente en ligne.

La vente d'alcool sur Internet s'accroissant, il existe désormais une inquiétude des professionnels concernés, en raison de l'insécurité juridique induite par ce jugement. Cette insécurité reste théorique, puisqu'il faut un intérêt à agir pour s'attaquer à un site de vente en ligne.

Il est peu probable qu'une personne ou une association investie de cet intérêt à agir poursuive un site réalisant simplement de la vente en ligne et restreignant ses mentions publicitaires à ce qui est autorisé dans les sites de vente en dur. En outre, il n'est nullement certain que cette éventuelle action en justice aboutisse à une condamnation.

Néanmoins, je comprends l'inquiétude des professionnels concernés, mais je tiens à les mettre en garde sur deux points. Une libéralisation non encadrée de la publicité en faveur de l'alcool sur Internet profiterait, en premier lieu, aux grands groupes industriels producteurs d'alcool. Leurs moyens publicitaires sont, en effet, plus importants que ceux dont dispose la filière viticole.

En outre, et surtout, il est primordial de protéger les jeunes, qui sont davantage utilisateurs d'Internet que leurs aînés et plus perméables à ces publicités. Alors que nous avons constaté une hausse de plus de 50 % des hospitalisations en pédiatrie pour ivresse aiguë entre 2004 et 2007, nous devons être extrêmement vigilants quant à la diffusion de la promotion de l'alcool sur Internet.

Pour lutter contre les alcoolisations massives répétées des sujets jeunes, nous devons utiliser toutes les armes dont nous disposons. Nous devons notamment continuer à encadrer la publicité dont l'impact sur les comportements d'alcoolisation est bien établi. Les techniques de promotion, telles que les liens sponsorisés, les « pops up » ou les « spams » ne doivent pas être un moyen détourné de promouvoir l'alcool et d'investir les sites pour les jeunes. La promotion doit se limiter au site institutionnel de vente, en y restreignant les mentions publicitaires à l'instar de ce qui est autorisé dans les lieux de vente en dur.

Sécuriser juridiquement la vente d'alcool en ligne, en respectant les contraintes de santé publique, c'est la mission du groupe de travail que nous avons installé avec mon collègue Michel Barnier, et dont les travaux ont commencé le 18 juin – une bonne date pour entamer des travaux. (Sourires.) J'attends de ce groupe de travail qu'il nous fasse des propositions concrètes pour sécuriser les sites de ventes en ligne, avant la fin de l'été. Il s'agit de faire émerger un choix consensuel, tenant compte des impératifs de santé publique et des intérêts économiques de la filière viticole. Je crois que c'est tout à fait possible et urgent ; j'ai donc demandé au groupe de travail d'aller vite.

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