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Intervention de Jean-Louis Borloo

Réunion du 10 juin 2009 à 15h00
Grenelle de l'environnement — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi

Jean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires économiques, cher Patrick Ollier, monsieur le rapporteur Christian Jacob, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord de vous dire tout le plaisir que nous avons, Chantal Jouanno, qui s'absentera quelques instants pour se rendre à la commission des affaires économiques du Sénat qui étudie le texte d'engagement, Dominique Bussereau, Hubert Falco, Christian Blanc et moi-même, de nous retrouver une nouvelle fois dans cet hémicycle pour examiner ce texte que je crois fondateur.

Permettez-moi de remercier très sincèrement le président Patrick Ollier et le rapporteur Christian Jacob, ainsi que tous les membres de la commission des affaires économiques et, au-delà, l'ensemble des parlementaires issus de tous les bancs de cette Assemblée, du travail accompli depuis près de dix-huit mois au sein des groupes de travail, des comités opérationnels, des comités de suivi, des groupes miroirs ou des commissions parlementaires – dix-huit mois de respiration et d'approfondissement en vue de relever le principal défi du XXIe siècle. Le Grenelle de l'environnement est le fruit d'une remarquable concordance entre le temps de la société civile et celui du Parlement, le temps du diagnostic scientifique et celui de la prise de décision politique, entre le temps court et le temps long.

Ce n'est pas, à mes yeux, le fruit du hasard si le temps du Parlement est, à chaque fois, et ce, quelle que soit la forme du débat – débat de politique générale, audition, examen en séance publique ou en commission –, quel que soit le lieu – Assemblée nationale ou Sénat –, quel que soit le moment aussi, un temps de confirmation, d'accélération et surtout d'appropriation, grâce à la représentation nationale, des engagements du Grenelle de l'environnement.

Le débat, qui a eu lieu dans cet hémicycle en première lecture, a été approfondi. Il avait déjà conduit, à l'issue de soixante heures de discussion, à l'adoption de 387 amendements et à l'introduction de nombreuses avancées qui allaient plus loin, dans certains cas, que les conclusions unanimes des cinq collèges du Grenelle de l'environnement d'octobre 2007. Je pense au renversement de la charge de la preuve pour les décisions publiques susceptibles d'avoir une incidence significative sur l'environnement – proposition émise par votre commission –, à l'institutionnalisation du comité de suivi du Grenelle de l'environnement, à l'accélération du programme de rénovation thermique, au retrait total de la vente des lampes à incandescence à compter de 2010 ou à l'introduction d'un principe de modulation très incitatif en matière de déchets.

Ces avancées ont ensuite été confirmées par le Sénat, ce qui a permis de conforter l'idée d'un Parlement français absolument serein face à la mutation écologique et totalement en phase avec les grandes évolutions économiques et sociales de notre temps, contrairement à ce qu'avaient annoncé, non sans une certaine délectation, plusieurs commentateurs.

Mesdames et messieurs les députés, nous entrons dans la dernière ligne droite d'un texte qui nous permettra de rompre définitivement avec un modèle de croissance qui n'était pas viable sur le long terme. Ce sont des secteurs entiers de notre économie qui, à la suite de ce débat, ont volontairement choisi d'anticiper la mutation écologique : je pense à la grande distribution, à l'industrie agroalimentaire, aux professionnels de la publicité, aux artisans du bâtiment, aux agences immobilières ou à l'industrie aéronautique – je fais allusion à toutes les conventions des secteurs professionnels qui ont été signées depuis plus d'un an.

Dans le cadre non seulement de ce texte, mais également du texte sur la responsabilité environnementale ou de la loi de finances pour 2010, la France investira un peu plus de 400 milliards d'euros sur l'ensemble du territoire dans tous les secteurs de la croissance verte, dans la rénovation thermique des bâtiments publics et privés, dans les transports urbains, régionaux et interrégionaux, dans les énergies renouvelables, pour lesquelles nous avions, il faut le reconnaître, un retard important, dans la construction ou dans la recherche. Ce plan d'investissement est plus important que le plan de relance verte de nos amis américains.

Avec ce débat parlementaire, c'est la France qui assume enfin pleinement sa responsabilité de premier laboratoire du vivant et qui redécouvre la richesse exceptionnelle de sa biodiversité ultramarine, c'est la constitution de la trame verte et bleue, c'est la création de dix aires marines protégées, c'est l'arrêt du projet d'orpaillage de la Montagne de Kaw, c'est encore l'annonce, le 5 novembre 2008, de la protection de 24 000 kilomètres carrés d'espaces marins – à savoir soixante-seize nouveaux sites – dans le cadre de Natura 2000.

Ce sont aussi 132 millions d'euros supplémentaires consacrés à la protection de la biodiversité entre 2009 et 2011, la remise, le 29 avril 2009, du rapport du Centre d'analyse stratégique sur l'approche économique de la biodiversité, dont l'un des objectifs est de valoriser les services rendus par la nature, ou le vote de la loi sur la responsabilité environnementale qui reconnaît, pour la première fois dans notre droit, l'existence d'un préjudice écologique totalement déconnecté du préjudice économique. C'est également le plan, en cours d'exécution, de mise en conformité des 146 stations d'épuration françaises qui n'étaient pas aux normes – cela concerne 36 millions d'habitants.

Avec ce débat parlementaire, la France lance le plus vaste chantier thermique jamais engagé dans le secteur du bâtiment, un chantier qui aboutira, dans le neuf, à la généralisation de la basse consommation dès 2010 pour les bâtiments publics et dès 2012 pour les logements privés, et qui, dans le domaine du bâti existant, obligera l'État et ses établissements publics à rénover l'ensemble de ses bâtiments dans un délai de huit ans, avec la rénovation des 4,2 millions logements sociaux – elle commencera par les 800 000 logements les plus dégradés sur le plan thermique.

Ce sont encore, pour les particuliers, la mise en place de l'écoprêt à taux zéro – en huit semaines 10 000 prêts ont déjà été signés –, la possibilité de cumuler celui-ci avec l'avantage fiscal prévu à l'article 200 quater, l'extension du crédit d'impôt développement durable et, enfin, la possibilité pour les ménages français de cumuler ces trois avantages. N'oublions pas non plus une première enveloppe de 1,2 milliard d'euros de prêt à taux bonifiés de la Caisse des dépôts et consignations pour les logements sociaux et la modification de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui permet d'apporter aux organismes sociaux l'équivalent de 20 % de fonds propres de la part de l'État.

Avec ce débat, la France change radicalement de bouquet énergétique, puisque, pour la première fois de son histoire, elle connaîtra une réduction de sa consommation énergétique sur le long terme, accompagnée d'une baisse programmée de sa facture pétrolière de l'ordre de 40 %. La production d'énergie d'origine renouvelable sera doublée en douze ans, grâce à la multiplication par deux du bois-énergie, par six de la géothermie, par douze des réseaux de chaleur et par 400 du solaire photovoltaïque. C'est la France qui a décidé de se doter des infrastructures énergétiques de demain grâce au lancement, le mois dernier, de l'appel d'offres pour la construction d'au moins une centrale solaire par région d'ici 2011, et des trois appels d'offres « biomasse », dont deux sont intégralement souscrits, grâce à la création, au début de cette année, du Fonds chaleur renouvelable, doté d'un milliard d'euros, grâce au renouvellement des concessions de 400 barrages, grâce à la réorganisation de la recherche française sur les énergies renouvelables – le Président de la République était hier à Chambéry en vue de regrouper cette filière autour de l'Institut national de l'énergie solaire –, grâce à la création du fonds démonstrateur doté de 450 millions d'euros, grâce, enfin, au « milliard Grenelle », dédié à la recherche appliquée en énergies renouvelables. Nous voulons doter notre pays d'un pilier énergétique « énergies renouvelables » comme nous l'avons doté d'un pilier « énergie nucléaire ».

Avec ce débat parlementaire, c'est également la France qui lance le chantier de la mobilité durable grâce à la construction de 2 000 kilomètres de lignes à grande vitesse supplémentaires – plus que le double du réseau existant ! – et de 1 500 kilomètres de lignes de transports collectifs : alors qu'il y en existe 329 aujourd'hui, nous avons débloqué il y a un mois le financement nécessaire à la construction de 400 kilomètres afin d'assurer, dans les deux prochaines années, plus que le doublement du parc actuel de mobilité durable, constitué pour l'essentiel par les tramways : à cette fin, 800 millions d'euros ont été affectés à trente-sept villes. En deux ans, nous construirons plus de lignes de transports collectifs qu'au cours des quarante dernières années !

C'est le lancement, le 6 avril 2009, de l'appel à concurrence pour le canal Seine-Nord-Europe qui permettra à terme de transporter 15 millions de tonnes de marchandises par an, soit l'équivalent de 500 000 poids lourds ; c'est la signature de l'appel d'offres pour la ligne TGV Tours-Bordeaux ; c'est la signature des protocoles de financement pour le contournement Nîmes-Montpellier et pour la ligne à grande vitesse Le Mans-Rennes ; c'est le doublement du rythme de régénération du réseau ferroviaire français qui va passer de 400 kilomètres par an à plus de 900 kilomètres par an.

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