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Intervention de Didier Migaud

Réunion du 20 octobre 2008 à 16h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Migaud, président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan :

Certes, mon cher collègue, mais comme tout est parti de là-bas, il faut en parler pour en tirer toutes les conséquences. En ce qui concerne l'analyse de la crise, il ne faut pas se contenter d'un constat sur la folie financière à laquelle nous avons assisté.

La crise est aussi économique, disais-je : les dernières prévisions de croissance et les récents chiffres du chômage nous le démontrent. Dans ces conditions, si l'on retient un chiffre de croissance plus proche de 0 % que de 1 % en 2009, les prévisions de recettes sont-elles réalistes ? Certes, je suis d'accord avec le rapporteur général lorsqu'il dit qu'il ne faut pas se focaliser sur les hypothèses de croissance, mais leur variation représente tout de même plusieurs milliards. Le taux d'élasticité retenu pour 2008, soit 1,5 %, apparaît optimiste. Je rappelle que si l'élasticité est en moyenne de 1 en longue période, elle a tendance à être inférieure à 1 en période de ralentissement et de croissance en deçà du potentiel.

Dès lors, nous risquons d'enregistrer des pertes de recettes supérieures, monsieur le ministre, aux 5 milliards de recettes déjà reprises dans le premier collectif. Je pense que nous serons malheureusement au-delà d'ici à la fin de l'année, peut-être même dépasserons-nous les 7 milliards d'euros. La dégradation observée en 2008 devrait se traduire par une base 2008 modifiée, ce qui aura nécessairement des répercussions sur les recettes en 2009. Par ailleurs, le taux d'élasticité de 0,8 retenu pour 2009 n'est-il pas encore trop optimiste ? Souvenons-nous qu'en 2003, avec 1,1 % de croissance, l'élasticité avait été de 0 –je me réfère au rapport économique et financier que vous nous avez remis.

Comme l'année dernière, nous nous posons des questions sur les chiffres de la croissance et de l'inflation ; comme l'année dernière, au moment où nous discutons du projet de loi de finances, les hypothèses auxquelles il s'adosse n'ont déjà plus cours. Au total, nous sommes dans le flou puisque le Gouvernement sera bientôt amené à constater qu'il lui faut s'adapter à une nouvelle donne – vous l'avez dit vous-mêmes tout à l'heure, madame la ministre, monsieur le ministre –, et le Parlement se sera prononcé à partir d'un ensemble de données devenues quelque peu obsolètes. La sincérité des lois de finances, nous précise la LOLF – et le Conseil constitutionnel l'a confirmé –, s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler. Le projet qui nous est soumis respecte-t-il le principe de sincérité ? Avec un rebasage par rapport à 2008, une croissance de 0,2 % et un taux d'élasticité de 0 – hypothèses malheureusement vraisemblables –, les moins-values de recettes par rapport à l'estimation du PLF pour 2009 pourraient représenter jusqu'à 8,5 milliards d'euros.

Il me semble que, dans un contexte particulièrement mouvant comme celui que nous allons continuer à connaître dans les temps qui viennent, il conviendrait que le Parlement dispose de plusieurs scénarios qui lui permettent de savoir de quelle manière le Gouvernement entend s'adapter à une situation évolutive. Pour cela, le Gouvernement devrait indiquer, dans le rapport économique, social et financier, comme il le fait dans le programme de stabilité, non seulement les hypothèses qu'il retient pour bâtir son projet, mais aussi deux autres scénarios, en fonction de la variation des grandes données – croissance, inflation –, et les conséquences qu'il en tirerait au niveau budgétaire.

Le rapporteur général a d'ailleurs initié cette démarche dans son rapport, avec des résultats inquiétants : une croissance de 0,5 % en volume en 2009, suivie d'une période de croissance molle en 2010-2011 conduirait à une aggravation du déficit public, qui atteindrait 3 % du PIB dès 2009, et resterait supérieur à 2 % en 2012 ; la dette publique serait bloquée autour de 68 % de PIB. Disposer de plusieurs scénarios me paraît donc nécessaire : je proposerai un amendement tendant à compléter en ce sens le rapport économique, social et financier.

La crise économique est là. La question est donc : la politique du Gouvernement répond-elle à cette crise ? Vous répondez oui, mais il est possible de ne pas partager votre point de vue.

Concernant les aspects financiers de la crise, nous avons, il y a quelques jours, examiné le plan des garanties au secteur financier, plan que vous avez proposé, madame la ministre. J'ai eu l'occasion de dire que la rapidité de la réaction de la France, après quelques atermoiements,…

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