…montrent à quel point cette notion de discrimination est délicate. Vous repassez aujourd'hui du côté de la CNIL pour lancer cette affaire de statistiques ethniques.
Vous l'avez dit, vous l'avez même écrit – et dans l'exposé des motifs, c'est ce qui est grave –, vous ne cherchez pas les meilleurs moyens de lutter contre les discriminations, vous dites simplement vouloir obtenir des données faisant directement ou indirectement apparaître les origines raciales ou ethniques des personnes pouvant être accueillies.
C'est très grave, j'insiste, parce que cela revient à réduire la discrimination – même si cet aspect reste très important –, à ce qu'il est convenu d'appeler les origines raciales ou ethniques. Je vous rappelle que le mot « race » est ancien et qu'un mouvement associatif, d'ailleurs relayé à l'Assemblée, souhaite le retirer de la Constitution et d'un certain nombre de textes fondamentaux, parce qu'il ne correspond plus aujourd'hui à autre chose qu'une réminiscence des théories racistes qui ont fait tant de mal il y a plus de cinquante ans, en Europe et dans le monde. Nous ne souhaitons donc plus voir ce mot, « race », qui, d'ailleurs, de l'avis de tous les anthropologues, ne correspond à rien. On connaît des races de chiens, mais les races humaines ne veulent rien dire.
On parle aujourd'hui d'origines ethniques, mais pourquoi pas demain d'origines ethnico-religieuses ? Tout cela est extrêmement « complexe et délicat », j'en conviens avec vous. Or derrière ce brûlot, je soupçonne aussi une opération bassement politicienne : vous êtes très influencés par le Conseil représentatif des associations noires, le CRAN, mouvance proche de l'UMP. En lançant ce brûlot sans précaution sur la place publique, en permettant le recueil d'origines raciales ou ethniques, vous êtes en train d'allumer un feu qui ne pourra plus s'éteindre. Demain, on demandera des statistiques pour tout et l'on aura tôt fait de considérer comme discriminés ceux qui proviennent de telle ou telle origine, de telle ou telle religion, et l'on entrera dans le détail parce que la CNIL n'a pas vu ce que la présente discussion nous a permis de montrer.