Chacun a pu noter le malaise qui règne sur l'ensemble de nos bancs malgré les efforts méritoires que vous avez consentis, monsieur le ministre, pour redonner à l'objet non identifié dont nous discutons un aspect juridique à peu près acceptable. Reconnaissez toutefois que les accommodations dont vous l'avez entouré n'ont pu escamoter le vice fondamental qui entache la prétention de gérer la filiation et le regroupement familial par la génétique.
Certes, il est concevable que face à des périls extraordinaires ou des menaces imminentes pour notre société, nous mettions nos hésitations et nos valeurs sous le boisseau. Mais en l'espèce, comme l'a montré notre débat, il s'agit d'écarter des enfants – qui ne seraient pas les enfants biologiques – du regroupement familial. Est-il acceptable, pour empêcher ces quelques enfants de venir dans notre pays, de faire fi de principes fondamentaux de notre société, sinon de notre civilisation ? Il y a une disproportion manifeste entre les problèmes que l'on entend régler – éviter certains regroupements familiaux jugés abusifs – et la mécanique que l'on met en marche, dont vous êtes bien incapable de prévoir l'évolution et les moyens de l'arrêter lorsqu'elle s'emballera.
Les sous-amendements ne sont pas à la mesure de la gravité du problème : nous ne pouvons pas accepter des modifications à la marge d'une disposition si fondamentalement contraire à nos principes. Il est, je le répète, un vice essentiel que vous n'écarterez pas : nul ne se soumettra jamais aux tests génétiques par libre volonté. Dès lors que l'on ne pourra prétendre au regroupement si l'on refuse le test, il est clair qu'il n'y a plus ni liberté ni consentement : nous sommes dans la contrainte. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)