Le débat montre à quel point la réflexion doit être approfondie de part et d'autre de l'hémicycle.
Il ne faut faire de procès à personne, mais il convient d'essayer de comprendre et de mesurer l'importance de ce genre de décision. Je ne partage pas l'avis du rapporteur lorsqu'il parle de liberté. Je n'ai pas l'impression que la liberté qu'on prétend garantir laisse véritablement la possibilité de choisir. Je n'ai pas l'impression non plus qu'en stigmatisant ces personnes en les présentant comme des fraudeurs potentiels, on aborde ces questions sous le meilleur angle.
Pour reprendre les cas limites déjà évoqués, imaginez que la première personne à être surprise par le test ADN soit l'enfant lui-même, celui qui l'a demandé. On sait très bien qu'en la matière, on l'a répété à plusieurs reprises, on ne peut être assuré à 100 % de la filiation réelle.
S'il existe un vrai problème, celui des pays où les états civils ne permettent pas d'avoir une certitude, la réponse du test ADN n'est certainement pas la plus appropriée. Elle paraît même la moins adaptée. D'ailleurs, le Gouvernement ne s'y était pas trompé qui avait écarté cette possibilité dans son projet initial. Or la voilà qui revient subrepticement par cet amendement. Si l'on en croit la presse, M. le ministre lui-même, il y a quelques jours, ne le soutenait pas de façon fervente. On pouvait même supposer que le Gouvernement allait s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée, mais les choses ont évolué différemment.
Le Gouvernement souhaite assortir cette proposition de certaines conditions, comme si une telle question pouvait faire l'objet de conditions, qu'il s'agisse du remboursement des tests ou de la période d'essai de deux ans. Cela signifie que pendant deux ans on aurait vraiment mauvaise conscience.
En effet, ce ne sont pas les modalités d'application de ce test qui sont en cause, mais le principe lui-même. Or, l'état des connaissances scientifiques, des réflexions sur la bioéthique – souvent évoqué dans cet hémicycle –, ne nous permet pas, à mon sens, de prendre une telle décision dans la précipitation. Mme Hostalier a évoqué avec raison, dans son propos liminaire, l'importance de la conscience. Chacun a rappelé qu'au-delà de la filiation génétique, le code civil comportait – Noël Mamère l'a rappelé et d'autres l'ont confirmé – une notion spécifique à la France : le droit de la reconnaissance.
Prenons un autre cas limite, dans un pays où la guerre a sévi. Que penser des enfants orphelins dont on sait qu'en Europe et a fortiori en Afrique ou dans d'autres cultures, les oncles et les tantes se sentent totalement responsables ? Ils n'auront pas la filiation génétique !