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Intervention de Bruno Le Roux

Réunion du 19 septembre 2007 à 21h30
Maîtrise de l'immigration intégration et asile — Après l'article 5

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Le Roux :

En 1992, le Parlement avait franchi une étape importante en différenciant les tests génétiques à usage médical qui permettent, par exemple, de détecter une prédisposition à une maladie, de ceux dont la finalité était d'identifier un individu ou de déterminer une filiation. À l'époque, il avait été décidé que ces examens ne pouvaient être effectués qu'après saisine judiciaire.

Le texte que vous nous proposez, monsieur le rapporteur, met en avant une conception de la famille qui en est totale contradiction avec celle en vigueur dans notre pays. Du reste, cette conception est validée par le sous-amendement n° 268 du Gouvernement qui vise à discriminer très clairement les migrants africains puisqu'il fixe la liste des pays pour lesquels s'appliqueront ces tests génétiques. Et l'on se doute bien qu'il ne s'agira pas des États-Unis ou de la Suède. La mesure proposée concernera uniquement les pays africains dont l'état civil présente des carences.

Je partage le cri du généticien Axel Kahn : « On demande aux familles étrangères à peau noire ou basanée d'être une vraie famille par le sang. Or la vraie famille ne l'est pas toujours par le sang, il y a de nombreuses exceptions. »

Oui, monsieur le ministre, la définition de la famille en France n'a jamais été réduite à sa composante biologique. Notre droit est basé sur la reconnaissance. On peut reconnaître des enfants qui ne sont pas les siens comme en adopter. Cela ne correspond d'ailleurs ni à notre conception, ni à celle des familles visées dans cet amendement qui ont souvent elles-mêmes une vision élargie de la famille. Nous savons d'ores et déjà que l'amendement est discriminatoire pour les migrants africains et qu'il s'adresse à des personnes qui ont souvent une conception de la famille quelque peu différente de la nôtre.

Pour qui légifère-t-on ? Pour les 23 000 étrangers qui ont bénéficié d'un titre de séjour au titre du regroupement familial en 2005 ? Pas du tout, puisque nous légiférons pour les enfants. Mais combien d'enfants y avait-il ? 9 000. Et combien de fraudes ? Je suis prêt à en discuter, le rapporteur voulant faire croire à une invasion.

En résumé, la disposition proposée s'adresse uniquement aux migrants africains, à ceux qui peuvent avoir une conception de la famille différente de la nôtre, et elle ne concerne que très peu de cas. Nous devons nous interroger sur la façon dont nous utilisons ces tests génétiques.

Enfin, ce débat met en jeu l'honneur des parlementaires que nous sommes. Il peut exister différents cas : une femme peut avoir été inséminée par un sperme de donneur, les enfants peuvent avoir été adoptés, le père légal peut être différent du père biologique. Jamais nous n'avons pensé que le lien de filiation pouvait se réduire à sa dimension biologique, tant la question du coeur, du désir, des valeurs est importante dans notre conception de la famille. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quand on veut légiférer pour quelques dizaines de cas, l'on doit se poser des questions relatives à l'honneur et non pas simplement au pragmatisme, au bon sens ou à la pratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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