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Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Réunion du 22 mai 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Urvoas :

Il va de soi que notre groupe est très attentif à cet article.

D'abord, je précise qu'il ne concerne pas que l'Assemblée nationale. Rien ne dit, dans son libellé, qu'il est destiné à mieux organiser l'opposition parlementaire même si ce point est évoqué par l'article 24 qui crée l'article 51-1 de la Constitution. Il faut donc considérer ici l'opposition au sens général dans notre système politique, ce qui nécessite qu'on définisse ce qu'est une opposition. S'agit-il d'une opposition politique, d'une opposition légale, d'une opposition locale ? Faut-il décliner ces droits spécifiques en fonction des assemblées dans lesquelles nous siégeons ? S'agit-il en effet des mêmes pour le conseil général, pour le conseil régional ?

Le rapporteur avait raison de souligner, en commission, que cet article recelait de grandes potentialités. En effet il faut commencer par constater qu'aujourd'hui il est impossible de décider de conférer des droits particuliers à l'opposition. Une tentative avait été conduite en 2006 à l'occasion de la révision du règlement de l'Assemblée. Or le Conseil constitutionnel avait supprimé cette disposition, considérant qu'on ne pouvait donner des droits supérieurs à ceux auxquels l'opposition pouvait arithmétiquement prétendre, dans la mesure où elle instaurait entre les groupes une différence de traitement injustifiée.

La décision du Conseil constitutionnel n'est d'ailleurs pas totalement convaincante et il eût été avisé de suivre à la lettre le rapporteur de l'époque – c'était déjà Jean-Luc Warsmann –, qui avait noté, avec beaucoup de justesse, qu'il existait déjà, au sein de l'Assemblée, une discrimination entre les parlementaires appartenant à un groupe et les non-inscrits qui ne disposaient pas exactement des mêmes droits.

Quoi qu'il en soit, il y a là un verrou juridique, d'ordre constitutionnel, qu'il faut faire sauter. Je ne sais pas si l'article 1er fait sauter ce verrou, mais en tout cas il le dégrippe. Il s'agit d'un premier pas. C'est l'une des raisons pour lesquelles, sur le principe, nous soutenons cet article.

Reconnaître des droits particuliers à l'opposition, cela consiste, comme je m'étais permis de le dire hier, lors de la discussion générale, à lui reconnaître des droits qui peuvent être supérieurs à ce qui lui serait accordé en fonction de la seule arithmétique. C'est une forme de discrimination positive en faveur de la minorité, qui correspond à une manière nouvelle d'envisager la séparation des pouvoirs, laquelle ne doit pas simplement être vue sous l'angle des rapports entre l'exécutif et le législatif, mais aussi, cela est au moins aussi important, sous celui des rapports entre l'exécutif et l'opposition.

C'est d'ailleurs ce qu'ont compris nombre de nos voisins européens, qui ont déjà adopté des dispositions concrètes à cet égard. Chacun de nous connaît le statut de l'opposition de Sa Majesté à la Chambre des communes, statut qui donne des droits considérables à l'opposition parlementaire, et singulièrement à son chef, qui est à la tête du groupe le plus important de l'opposition, les libéraux ayant également des droits au sein de la Chambre des communes.

Il y a donc une tendance européenne. La suivre est une manière de moderniser notre vie publique. Sur le strict plan des principes, nous ne pouvons qu'y être favorables. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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