Sous la précédente législature, le groupe communiste avait été à l'origine du dépôt et de la discussion d'une proposition de loi qui tendait à supprimer le mot « race » de notre législation. Le présent amendement poursuit un objectif identique en visant à supprimer la référence à ce terme dans le corps de notre texte fondamental.
Rappelons que le terme de « race » n'est apparu dans notre législation que tardivement. Ce point pose un petit problème, qui sera sans doute réglé par les historiens ou les juristes. Pour ma part, je pense que l'apparition de ce terme remonte, non pas au préambule de la Constitution de 1946, mais au décret Marchandeau du 21 avril 1939, qui a introduit pour la première fois le mot « race » dans le lexique juridique. Ce texte réprimait la diffamation commise par voie de presse envers « un groupe de personnes appartenant par leur origine à une race ou à une religion déterminée ».
C'est le régime de Vichy qui devait consacrer l'usage de ce terme, dans les lois tristement célèbres des 3 octobre 1940 et 2 juin 1941, érigeant des règles vexatoires et discriminatoires en raison de l'appartenance à la « race » juive. À partir de 1945, un grand nombre de textes sont venus proscrire les discriminations fondées sur la « race ». S'il s'agissait là d'une réaction contre le nazisme et le régime de Vichy, il n'en reste pas moins que le législateur a conservé le terme de race et, par conséquent, la catégorie juridique.
Malgré lui, et malgré sa volonté de signifier solennellement que les discriminations raciales et les actes commis contre des individus « à raison de leur appartenance ou de la non-appartenance à une nation, une race, une ethnie ou une religion déterminée » étaient inacceptables et contraires à nos valeurs fondamentales, le législateur a implicitement reconnu l'existence des « races ».
C'est afin de mettre un terme à cette incohérence qui veut que la race constitue une catégorie juridique, alors que l'ensemble de notre législation vise à combattre le racisme, que nous vous proposons le présent amendement, convaincus par ailleurs que ce terme de « race » fonde malheureusement encore la conviction de certaines doctrines politiques, auxquelles seules ce terme peut encore servir d'outil.
Je ne doute pas que la majorité de notre assemblée soutiendra et approuvera le présent amendement.