Madame la secrétaire d'État chargée de la solidarité, je réagis au préalable au propos que vous venez de soutenir : puisque vous vous intéressez aux fraudeurs, j'espère que vous allez également vous occuper des grands voleurs, dont l'importance des méfaits devrait plus encore justifier votre engagement.
J'en viens à mon sujet.
Il est rare qu'on s'intéresse ici aux petites entreprises. Grâce à la détermination et à la dignité des salariés de deux d'entre elles, dont je salue la présence dans les tribunes, c'est chose faite ce matin. Je vais donc évoquer la situation de deux entreprises dont les salariés sont en lutte depuis des semaines : bientôt 150 jours pour les salariés de l'entreprise Griallet, à Montreuil. Ils sont victimes d'employeurs – les entreprises Griallet et SANIR-PLMT – qui les faisaient travailler dans le secteur de la démolition sans protections, bien qu'ils soient exposés au plomb et à l'amiante, et en utilisant à l'occasion de faux numéros de sécurité sociale, que j'ai transmis au procureur de la République.
Griallet comme SANIR-PLMT sont des entreprises de démolition et du BTP qui officient depuis de nombreuses années à Pantin et Montreuil pour Griallet, à Pavillons-sous-Bois, Bondy et Neuilly-Plaisance pour SANIR-PLMT. Leurs patrons pensaient pouvoir mettre ces travailleurs en danger impunément, les exploiter sans vergogne en violant le droit du travail. Cette situation inadmissible et inhumaine a motivé mes interventions auprès des ministres de la justice, du travail et de l'immigration, du préfet de Seine-Saint-Denis, du procureur de la République, de la direction départementale du travail, des inspections du travail et des URSSAF compétentes, ainsi qu'auprès de la caisse de retraites et de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, dont j'ai rencontré, il y a moins de deux heures, le président, pour un entretien qui, je l'espère, nous aidera à avancer.
Chez Griallet comme chez SANIR, les ouvriers ont décidé de se mettre en grève et d'occuper les locaux de leur entreprise pour se faire respecter, ce qui passe par la régularisation de ces sans-papiers. Le mouvement s'inscrit dans le cadre plus général des actions initiées à partir d'avril avec l'aide de la CGT par des travailleurs sans papiers réclamant leur régularisation au titre de l'article 40 de la circulaire Hortefeux.
Le patron de Griallet, Jean-Luc Griallet, comme celui de SANIR-PLMT, Roger Kakou, sont d'authentiques voyous, qui ont commis une multitude de délits, que ce soit au regard du code du travail, du code de la sécurité sociale, du code pénal ou du code de l'environnement. Les deux patrons connaissaient la situation irrégulière de leurs salariés, mais ils ont profité de leur « fragilité administrative » pour les exposer sans retenue à des produits hautement cancérigènes, comme le plomb ou l'amiante, les priver de leurs droits élémentaires – paiement des congés ou des heures supplémentaires – et se comporter avec eux comme des esclavagistes, menaçant à tout bout de champ de les licencier et tenant à leur égard des propos racistes. Établissements ou activités salariées non déclarés, faillites frauduleuses, abus de biens sociaux, mensonges, manipulations… la liste de leurs méfaits est longue et loin d'être encore établie de façon exhaustive. Il revient à la justice et aux diverses administrations de les établir et de punir leurs auteurs, conformément à nos lois.
Pour vous convaincre pleinement, madame la secrétaire d'État, j'ai ici, entre les mains, les fac-similés des lettres du Dr Benjamin Sinnasse, médecin du travail, qui atteste que ces salariés ont été exposés à l'amiante et au plomb, sans que jamais aucune précaution n'ait été prise, sans qu'aucune démarche n'ai été entreprise comme l'exige la loi.
Les salariés de ces entreprises ne réclament rien d'autre que la reconnaissance de leurs droits. Ces salariés, pour avoir démasqué des patrons qui violent nos lois, ont droit à notre respect et à notre reconnaissance. En juin 2006, dans un discours intitulé « Pour la France du travail », Nicolas Sarkozy avait lui-même condamné les patrons voyous et prôné la réhabilitation du travail, laquelle devait passer, selon lui, « d'abord, par une certaine morale » ; j'aurais préféré une « morale certaine » !
Dans le cas des salariés des entreprises Griallet et PLMT, la morale voudrait qu'enfin les demandes légitimes de ces salariés soient entendues. Madame la secrétaire d'État, j'attends de vous, qui venez d'une terre de travail popularisée par le film Bienvenue chez les Ch'tis, une réponse claire à ma question, afin de savoir si les droits de ces salariés seront satisfaits.