Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le rapporteur, je ferai d'abord une remarque d'ordre général : je me réjouis de la tonalité de ce débat, qui est à la hauteur de la complexité des interrogations et de notre volonté commune d'avancer sur un chemin qui n'est pas simple, en évitant les faux amis et les pièges.
Je veux indiquer à M. Poignant que nous élaborerons ensemble les décrets, en particulier le principal, mais permettez-moi de dire aux parlementaires que vous êtes, en particulier à MM. Chassaigne, Fruteau et Launay, que ce ne serait pas respecter le Parlement que d'inscrire dans la loi des modalités pratiques qui sont par nature évolutives, car cela nous oblige à revenir régulièrement devant le Parlement.
Je prendrai l'exemple des normes en matière d'habitat, que vous aurez à connaître lors de l'examen du texte issu du Grenelle de l'environnement.
Franchement, nous allons passer de longues nuits à édicter des normes électriques qui ne manqueront pas d'évoluer. Pourquoi fixer dans la loi un objectif de 50 ou de 88 kilowatts-heure, alors que ces normes relèvent du règlement, simplement parce qu'on les a inscrites dans une loi précédente ? Nous ne voulons rien cacher, et le Gouvernement agira dans la plus grande transparence en vous soumettant une première version du décret. Cependant de grâce, ne faisons pas faire au Parlement un métier qui n'est pas le sien, au risque de l'encombrer inutilement !
J'en viens aux sanctions pénales, aux sociétés mères et à l'exonération du permis, qui préoccupent notamment M. Poignant et M. Dionis du Séjour.
S'agissant des sanctions pénales maritimes, je suis très embarrassé. Je comprends pourquoi le rapporteur veut relever considérablement le niveau des amendes, qui pourront aller jusqu'à 15 millions d'euros, et je ne parle pas des dommages et intérêts civils, ni des dommages et intérêts pour dommages écologiques, puisque nous allons créer trois types de sanctions financières. Quoi qu'il en soit, le fait de passer d'amendes dérisoires à des amendes lourdes est, à l'évidence, un signal fort.
M. le rapporteur souhaite poursuivre la reconquête du pavillon français. Il est vrai que, sur le plan économique et social, c'est une bonne chose. Nous en convenons tous, la reconquête du pavillon français, entreprise il y a plusieurs années, est une nécessité, et non le reflet d'un patriotisme déplacé. Le Gouvernement, s'il comprend la position du rapporteur, est plus réservé, pour la raison suivante : que ferons-nous si, cette nuit, il se passe quelque chose ? Serons-nous en mesure d'appréhender convenablement la situation ? N'entrons-nous pas dans une logique génératrice de troubles ? Nous allons en discuter ensemble. Le Gouvernement ne fuira pas ce débat. J'ai bien entendu les craintes de Mme Lebranchu dans ce domaine.
Quant à l'exonération de responsabilité de l'exploitant pour respect de permis, qui intéresse M. Poignant et M. Dionis du Séjour, on peut toujours dire qu'il vaut mieux respecter la règle que ne pas la respecter, mais ne risque-t-on pas de dédouaner les autorités qui délivrent les permis, quelle qu'en soit la forme, puisqu'on peut poursuivre un exploitant alors même qu'il a obtenu un permis ? Inversement, si l'on inquiète trop ces fameuses organisations qui délivrent les autorisations et les permis, elles pourraient refuser de délivrer quoi que ce soit pour éviter de prendre le moindre risque. Il nous faudra donc trouver un équilibre, dans ce texte ou dans le cadre du projet de loi relatif au Grenelle de l'environnement, pour régler l'une des deux grandes questions que pose ce texte.
Je vous indique par ailleurs que la directive n'a pas à interférer sur les conventions internationales.
M. Poignant a interrogé le Gouvernement sur les quotas de CO2 définis par le PNAQ, le plan national d'affectation des quotas. La France a d'ores et déjà délivré ses quotas gratuits aux opérateurs. Les nouveaux entrants sur le marché n'y auront donc pas accès. Nous souhaitons assouplir ce dispositif. Nous allons mener une étude d'impact et nous en discuterons lors de l'examen de la loi de finances initiale.
S'agissant des ordonnances, j'indique à Mme Reynaud qu'ayant été longtemps parlementaire, je sais ce qu'elle en pense. Franchement, ce sont des ordonnances très techniques, qui visent à harmoniser des dispositions. Elles ne portent pas sur des principes et ne seront pas prises dans la précipitation, mais elles sont le fruit d'un travail particulier. Je lui ferai la même réponse que pour les décrets. Sur le règlement REACH, qui est très important, je proposerai au président de la commission de constituer un groupe de travail, sur le modèle du Grenelle de l'environnement, réunissant le Parlement et le Gouvernement. Il ne s'agira pas d'une coproduction d'ordonnances, cela pourra y ressembler, car nous ne sommes pas certains que notre position est partagée par tous et il est toujours utile de comparer nos points de vue.
S'agissant du décret, je renvoie M. Chassaigne aux réponses que j'ai adressées à M. Poignant. Quant à M. Dionis du Séjour, j'ai répondu à ses deux questions.
Monsieur Fruteau, honorable parlementaire de La Réunion, je ne voudrais pas que les Réunionnais s'inquiètent en lisant le Journal officiel : il n'y a pas, à ma connaissance, de mise en examen de maires de communes, mais une mise en demeure de communes, ce qui est un peu plus rassurant. De quoi s'agit-il ?
En matière d'eau résiduelle urbaine, sur 156 sites – communes, intercommunalités, syndicats – les installations ne sont pas conformes, c'est-à-dire en état déplorable, voire inexistantes. Cela vaut pour l'ensemble de notre territoire comme pour La Réunion.
Il y a un an, j'ai « piqué » une colère. Nous avons mis en demeure les collectivités qui ont la charge de cette question, mais qui sont en partie financées par les agences de l'eau. Nous avons fait le point opération par opération, et nous avons constaté les moyens financiers nécessaires pour accélérer la mise en conformité. L'État n'a pas de responsabilité financière ; il n'est que le garant du respect des lois.
Par ailleurs, nous avons pris la précaution de nous munir d'un complément de financement d'un milliard d'euros, prévu par la Caisse des dépôts. À cette heure, 148 collectivités se sont mises en conformité, ont lancé les appels d'offres ou commencé les travaux. Il y a eu une forte accélération. Si certains sites ne sont pas achevés, c'est en général pour des raisons matérielles ou techniques, par exemple un conflit avec la loi Littoral.
Enfin, le système est initié et les 60 millions d'euros évoqués par le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, Yves Jego, correspondent à un financement complémentaire alloué à ces opérations de responsabilité communale ou intercommunale.
M. Jung souhaite savoir si ce texte changerait la donne pour Quebecor. La réponse est oui, mais pas dans tous les cas de figure. Ce texte permet en effet de poursuivre une entreprise pour un nouveau type de dommages – ce que l'on ne pouvait pas faire auparavant –, dès lors qu'ils figureront sur la liste prévue à cet effet. S'agissant de Quebecor, en l'occurrence propriétaire des sites évoqués, et si la situation est bien telle que décrite, sa responsabilité pourrait être engagée.
M. Jung se demande également si Quebecor se trouve dans le même cas de figure que Metaleurop, soit la disparition d'une personne morale du fait d'une faillite. Non, car il s'agit là de la responsabilité d'une maison mère dans le cadre du droit des faillites. C'est sur ce cas particulier que le Président de la République s'est exprimé, en souhaitant que ce problème de droit commercial prenne une dimension internationale. Pour une entreprise comme Quebecor, qui n'est pas en faillite, le texte apporte beaucoup. Il ne résout pas, en revanche, le problème posé par l'engagement de la responsabilité d'un actionnaire identifiable éventuel dans le cadre de la disparition d'une personne morale.
M. Havard a rappelé tout le monde à l'ordre concernant la transposition des directives. Michel Barnier a effectué un travail remarquable sur les nitrates, notamment en Bretagne. Les eaux résiduaires urbaines constituent l'un des rares cas, sinon le seul, où une cour de justice ayant été saisie, la Commission a retiré ses observations pour tenir compte des travaux réalisés sur les 156 sites. Avec ce texte et celui sur les OGM, nous rattrapons largement notre retard.
Enfin, j'ai bien noté les interrogations de Mme Lebranchu sur la convention Marpol et sur le débat entre amendes et responsabilité. Nous allons en reparler en toute loyauté. Personne n'a un avis tranché en la matière, mais, grâce au débat parlementaire, nous y parviendrons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)