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Intervention de Michel Havard

Réunion du 24 juin 2008 à 15h00
Responsabilité environnementale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Havard :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, alors que la France va prendre la présidence de l'Union européenne dans une semaine, le texte que nous commençons à examiner revêt un caractère particulier.

D'abord, il montre l'intérêt que nous portons et que nous devons porter de façon toujours active à l'élaboration des textes communautaires et à leur transposition dans le droit national. Ensuite, dans la droite ligne du Grenelle de l'environnement, il montre la priorité que nous accordons aux problématiques environnementales.

Après la première lecture au Sénat, je souhaite formuler trois remarques générales.

La première porte sur la question des transpositions de directives européennes.

Comme notre collègue Dionis du Séjour l'a souligné, cette discussion révèle l'impérieuse nécessité d'anticiper au maximum les textes préparés au niveau européen.

Bien sûr, les ministres français et les députés européens français participent à cette élaboration, donc à la décision. Pourtant, la transposition dans le droit national s'effectue trop souvent avec retard ou sur injonction de la Commission – cela est malheureusement vrai depuis longtemps, toutes majorités politiques confondues.

Nous devons donc organiser nos travaux de façon à pouvoir anticiper sur deux plans : prévoir la prise de décision au niveau européen, afin de mesurer l'écart entre notre législation interne et les engagements communautaires que nous prenons ; disposer d'un état précis des textes à transposer et des délais de transposition pour devenir un bon élève dans ce domaine.

La commission des affaires économiques, de l'environnement et de l'aménagement du territoire a chargé certains de ses membres de suivre la législation européenne, ce qui constitue une première étape dans cette direction. Étant chargé de suivre la législation européenne en matière d'environnement, depuis un an, pour cette commission, je mesure le chemin à parcourir. Cette première étape devrait conduire à faire de nous de meilleurs élèves. En tout cas, monsieur le ministre d'État, je vous sais particulièrement attaché à ces questions.

Ma deuxième remarque générale porte sur la notion de responsabilité du point de vue du droit, et les avancées apportées par ce texte.

Le régime de la responsabilité de droit commun est assez complexe. Les différents travaux ont montré que plusieurs textes ainsi que la jurisprudence récente avaient déjà permis de prendre en compte la question de la responsabilité environnementale. Néanmoins cette prise en compte se faisait souvent par interprétation des textes existants, essentiellement sur la question de la réparation financière du dommage causé.

Ce texte apporte plusieurs améliorations importantes. D'abord, nous passons d'une logique de réparation financière à une logique de prévention et d'action. Ainsi, les exploitants devront prévenir les dommages écologiques graves dans trois domaines clairement identifiés : la pollution des sols, les atteintes à la qualité des eaux de surface et souterraines, les atteintes aux espaces et habitats naturels protégés.

Lorsque les mesures de prévention n'auront pas empêché un dommage grave, le préfet – autorité compétente en France – sera en droit d'imposer les mesures de réparation nécessaires à l'exploitant et, en cas de défaillance de ce dernier, de se substituer à lui. Finalement, l'important sera de tout mettre en oeuvre pour empêcher toute atteinte à l'environnement et, lorsque celle-ci n'aura pas pu être évitée, d'enclencher immédiatement les actions de maîtrise du dommage. La question de la réparation financière n'interviendra qu'au terme de ce processus. Cette logique de prévention et d'action constitue une première avancée très importante.

Ensuite, les travaux préparatoires – et je rends hommage au travail effectué par le rapporteur Alain Gest – nous ont montré que l'application du droit commun de la responsabilité à la réparation des atteintes à l'environnement, présente de nombreuses limites. Ce texte permet donc, pour des événements importants, de fixer un cadre clair et précis qui facilitera la protection de l'environnement et, par la suite, donnera une base juridique claire à la réparation de certains préjudices.

Je vais terminer cette intervention par ma troisième remarque générale qui porte sur le cadre plus général des obligations nouvelles imposées aux entreprises européennes en matière environnementale.

Nous le savons tous, l'Espace européen a vocation à être un espace ouvert à la libre circulation des biens et des services entre pays membres bien sûr, mais également avec des pays extérieurs à l'Union. Pour autant, nous devons nous mobiliser pour établir dans les relations commerciales entre l'Union européenne et les autres pays, une règle qui tienne compte du modèle environnemental et aussi social que nous avons bâti depuis des années et que nous continuons à bâtir.

Il serait en effet paradoxal que nous imposions aux entreprises européennes des contraintes sociales et environnementales – avec un coût répercuté dans le prix des produits et services vendus – et que, dans le même temps, nous les laissions en concurrence avec des entreprises n'ayant pas ces mêmes contraintes. Si la technologie et la qualité de nos entrepreneurs et de leurs salariés sont un garde-fou à cette concurrence que je qualifierais de déloyale, il est temps que l'Union européenne prenne pleinement la mesure de cette situation, pour apparaître aussi comme un espace de protection de ses entreprises et de ses citoyens et, au-delà, un défenseur du modèle européen que nous souhaitons promouvoir.

Je sais, monsieur le ministre d'État, que vous êtes sensible à ce sujet et que vous porterez la voix de la France au niveau européen. Je sais que le Président de la République et tout le Gouvernement sauront aussi, lors de la présidence française et dans les grandes négociations internationales à venir, faire valoir ce point de vue avec conviction et efficacité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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