Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, le débat qui s'ouvre cet après-midi est principalement destiné à transposer dans notre droit interne la directive 200435CE du 21 avril 2004, qui vise à créer un régime de responsabilité applicable à la prévention et à la réparation des dommages causés à l'environnement. « Principalement », parce que le texte qui nous est présenté comporte désormais deux titres, dont le premier seulement concerne la directive. Le second, qui résulte d'amendements adoptés au Sénat – et n'existait donc pas le mois dernier, lorsque votre rapporteur a été désigné par la commission des affaires économiques –, procède, de façon tardive, à la transposition d'une série de directives.
Certes, on peut comprendre que le Gouvernement ait déclaré l'urgence pour la transposition d'une directive qui aurait dû être transposée avant le 30 avril 2007. Certes, il est louable, de la part de nos collègues du Sénat, de souhaiter que la France soit, à la veille de présider l'Union, irréprochable au regard de ses obligations environnementales. Mais, monsieur le ministre, la commission des affaires économiques aurait aimé discuter de ce projet depuis avril 2007, comme son homologue du Sénat. L'accélération de notre ordre du jour, que vous venez d'ailleurs de reconnaître, ne peut que donner raison à ceux qui souhaitent en rééquilibrer la définition en votant la réforme de notre Constitution.
Compte tenu de l'aspect essentiellement technique des dispositions des articles 6 à 13, je centrerai mon intervention sur ce qui demeure l'essentiel, la transposition de la directive « responsabilité environnementale ». Ce texte, relativement court, revêt pourtant, à mes yeux, une importante portée politique. Il vient en effet ajouter – et non substituer à l'existant – un régime de responsabilité en matière environnementale. Dans ce dessein est instituée une nouvelle police administrative destinée à prévenir et à réparer les dommages causés non à des biens appartenant à une personne physique ou morale, mais à des biens non susceptibles d'appropriation, autrement dit aux biens d'intérêt collectif que constituent les ressources naturelles.
Les modifications que ce texte entraîne pour notre code de l'environnement représentent bien une mini-révolution : elles mettent en oeuvre les principes édictés par la Charte de l'environnement que nous avons intégrée dans notre Constitution, dans son article 3 pour la prévention, et dans son article 4 pour ce qui est de la réparation. Il ne s'agit pas, dans ce texte, de prévoir une réparation pécuniaire, mais d'éviter la dégradation d'un site ou d'en organiser la remise en état. Même si la jurisprudence récente concernant l'affaire de l'Erika a démontré que les juges pouvaient prendre en compte le préjudice moral évoqué par une association ou l'atteinte à l'image d'une collectivité locale, ce texte franchit une nouvelle étape dans la reconnaissance de la responsabilité d'une activité, quelle qu'elle soit, à l'égard de ce bien commun qu'est la nature.
Comme la directive, le texte que nous propose le Gouvernement consacre le principe pollueur-payeur mais il ne l'interprète pas comme un droit monnayable à polluer. En cela, il est fidèle au débat que nous avions eu lors de la discussion de la Charte de l'environnement. Est-ce à dire qu'avec ce texte nous allons engager la responsabilité pleine et entière des entreprises, s'agissant de tous les dommages environnementaux que leurs activités peuvent éventuellement entraîner ? La réponse est négative.
En premier lieu, ce texte ne concerne que les détériorations qui présentent un réel caractère de gravité dans trois domaines : pour la santé humaine du fait de la contamination des sols, pour l'état écologique de l'eau et pour l'atteinte aux espèces et aux sites protégés en application de la directive Natura 2000.
En second lieu, si la responsabilité sans faute est la règle pour les activités les plus dangereuses, il en va autrement pour les dommages liés aux activités ne présentant pas, a priori, de risques pour l'environnement. Dans ce cas, la pollution doit résulter d'une faute ou d'une négligence de l'exploitant. Le lien de causalité doit être clairement établi par l'autorité compétente, à savoir le préfet, comme l'indiquera le projet de décret d'application que le Gouvernement a déjà préparé.
Pas plus que nos collègues sénateurs, votre commission des affaires économiques n'a souhaité bouleverser les équilibres de ce texte…