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Intervention de Philippe Duron

Réunion du 24 juin 2008 à 15h00
Réforme portuaire — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Duron :

Les grands ports européens de Rotterdam ou Anvers ont vu croître leur trafic de plus de 6 % par an quand les ports français progressaient en moyenne de 2 %. Une part importante des échanges extérieurs de la France se fait aujourd'hui par l'intermédiaire de ports comme Anvers ou Barcelone.

Les causes de la faiblesse des ports français sont connues. Elles tiennent à l'absence d'une grande politique maritime et portuaire, au sous-investissement chronique dont ont pâti les ports autonomes et plus encore les ports d'intérêt national que l'État a transférés aux collectivités territoriales, à la médiocrité et à l'insuffisance des liaisons ferroviaires et fluviales avec les hinterlands portuaires, enfin à l'organisation des ports français.

Le projet de loi portant réforme portuaire nous offrait l'occasion d'un grand débat à l'Assemblée nationale et la possibilité d'élaborer une réforme susceptible de redonner à nos ports l'efficacité dont ils ont le plus grand besoin.

Les parlementaires de tous les départements concernés par la réforme ont, par leur présence dans l'hémicycle, montré leur intérêt pour le débat. Michel Delebarre, le maire de Dunkerque, qui avait initié la loi Le Drian de 1992, le Président de la Région PACA, Michel Vauzelle, les maires de Rouen, Valérie Fourneyron, de Nantes, Jean-Marc Ayrault, de La Rochelle, Maxime Bonnot, les députés des Bouches-du-Rhône, de la majorité comme de l'opposition, de Seine-Maritime, de Gironde ou encore de Loire-Atlantique ou du Pas-de-Calais, s'étaient mobilisés pour un texte qu'ils attendaient.

Monsieur le secrétaire d'État, ce débat, attendu par la communauté portuaire et l'Assemblée nationale, vous l'avez confisqué. Qu'on en juge : les parlementaires de votre majorité ont été réduits au silence. N'avaient-ils rien à dire, aucun amendement à proposer ?

Les amendements de l'opposition, raisonnables et constructifs, ont tous été repoussés parfois sans explication. Ne voyez-vous pas la contradiction qu'il y a à prétendre renforcer les pouvoirs du Parlement à travers le projet de réforme constitutionnelle et, dans le même temps, empêcher l'Assemblée de faire son travail législatif et d'améliorer la loi par voie d'amendement ? Ne voyez-vous pas la contradiction qu'il y a à réserver cette possibilité au Sénat élu au second degré et à l'interdire, comme le faisait remarquer ici Michel Vauzelle, à l'Assemblée qui fonde sa légitimité sur le suffrage universel direct ?

Monsieur le secrétaire d'État, votre ignorance, votre mépris de la représentation nationale suffirait à expliquer notre refus de voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Mais en fait, notre vote se fonde sur une conviction : votre réforme n'est pas à la hauteur de ce que devrait être une vraie politique maritime et portuaire.

Vous n'apportez pas aux grands ports maritimes les investissements dont ils ont besoin. Vous annoncez 45 millions d'euros de crédit d'État pour les sept grands ports maritimes quand Rotterdam investira un milliard d'euros dans la même période. Et encore, nous doutons de votre capacité à mobiliser ces crédits quand l'Agence de financement des infrastructures terrestres de France annonce, pour les années à venir, une impasse de financement de deux milliards d'euros par an.

Les 15 milliards d'euros engagés trop vite, les cadeaux fiscaux imprudemment distribués dans le cadre de la loi TEPA auraient été fort utiles pour moderniser les infrastructures portuaires, ferroviaires et fluviales. Ce point de croissance dont la France a le plus grand besoin, vous l'aviez dans le transport et la logistique.

Dans notre pays, ce secteur d'activité ne contribue qu'à hauteur de 6 % du produit intérieur brut contre 11 % au Benelux.

Ensuite, nous considérons que la réussite de la réforme portuaire ne peut se faire qu'à condition de mobiliser l'ensemble de la communauté portuaire. En refusant d'associer les personnels de manutention, les portiqueurs et les dockers à la nouvelle gouvernance des ports, vous stigmatisez ces personnels et privez les ports de leur expérience.

Au moment où vous peinez à présenter au Parlement les lois de mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, vous avez refusé tous les amendements de l'opposition qui auraient permis de mobiliser l'expertise des organismes et associations de protection de l'environnement au service des ports.

Enfin, nous avons souhaité élargir aux ports décentralisés les avancées que ce texte permettait notamment en termes d'avantages fiscaux. Nous vous avons également montré que cette réforme introduirait une flagrante distorsion de concurrence entre les grands ports maritimes et les ports décentralisés. Mais, une fois de plus, vous n'avez pu ou pas voulu entendre.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche votera contre le projet de loi portant réforme portuaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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