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Intervention de Marc-Philippe Daubresse

Réunion du 9 juin 2008 à 21h30
Modernisation de l'économie — Article 32

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc-Philippe Daubresse, président :

Je vous précise que sur cet article 32, c'est M. Éric Ciotti, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, qui donnera l'avis de la commission.

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 32.

La parole est à M. Serge Blisko.

INTERM. Serge Blisko. Étrange article, qui ajoute une nouvelle carte de séjour aux multiples existantes – 11, 13, 18 ? on ne les compte plus – dans un texte qui n'y était, a priori, pas destiné. Lors du débat sur le énième projet de M. Hortefeux tendant à retoucher le code d'entrée et de séjour des étrangers, à l'automne 2007, nous étions déjà un certain nombre à exprimer notre trouble face à ce maquis administratif. Parmi les grandes innovations de ces dernières années, la carte « compétences et talents » témoignait du préjugé favorable manifesté par le ministère de l'immigration et de l'intégration à l'égard de certaines personnalités – footballeurs, artistes ou scientifiques de haut niveau – qui se voyaient ainsi offrir la possibilité de résider en France pendant trois ans.

Cette fois, de très heureux élus vont bénéficier d'une carte de séjour de dix ans, attribuée de plein droit – hormis les cas habituels de troubles à l'ordre public ou de situation irrégulière. La liste est particulièrement limitative : PDG de filiales étrangères établies en France, grands investisseurs individuels – mais à partir de quel montant, madame la ministre, un investisseur est-il « grand » ?

Cette prime à l'argent est particulièrement choquante. Un prix Nobel de médecine, de physique, de chimie ou d'économie, s'il est désireux de s'établir en France, se verra attribuer une carte de trois ans. Celui qui met beaucoup d'argent aura une carte de dix ans. C'est une atteinte à la morale et au principe d'égalité devant la loi. C'est une façon pernicieuse de faire payer le droit de rester sur notre territoire sans être inquiété. Car une carte de dix ans, c'est confortable ! Cela permet d'éviter de se présenter chaque année à la préfecture, au bureau des étrangers, en faisant la queue dès trois heures du matin pour voir sa demande examinée. Là, on est dans un autre monde – pour un peu, les papiers vous seraient livrés par coursier !

Que l'on favorise les personnes, morales ou physiques, qui veulent investir en France, nul n'y trouvera à redire. Mais alors que l'on favorise aussi ceux qui apportent leur talent, même modeste, le peu d'argent dont ils disposent ou leur force de travail ; ceux qui veulent s'investir dans ce pays et en devenir des citoyens ; ceux qui prennent des risques ; ceux que l'on voit sur les chantiers, qui s'exposent à des accidents du travail, qui acceptent les tâches les plus ingrates, dans le bâtiment, les travaux publics ou les services à la personne – ces professions, nous le savons, étant celles qui emploient le plus grand nombre d'étrangers. Mais réserver un traitement de faveur à ceux qui amènent des espèces sonnantes et trébuchantes est particulièrement choquant. Je vous demande, madame la ministre, d'abandonner cette nouvelle carte, qui ne fera que compliquer une situation déjà très confuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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