Madame la ministre, je crois que l'université, depuis la campagne présidentielle, est un sujet sur lequel nous pouvons tous nous retrouver – je l'ai dit tout à l'heure et je le pense fondamentalement.
Nous parlons tous d'autonomie. Mais l'autonomie existe-t-elle dans l'université française ? Il est vrai que la loi de 1968, complétée par la loi Savary, défend le principe de l'autonomie. Dans la réalité, nous savons très bien que cette autonomie proclamée a été grignotée et qu'aujourd'hui dans la gestion des universités, 80 % de leurs difficultés et l'essentiel de leur vie quotidienne sont gérées par le ministère de l'enseignement supérieur ou, quand celui-ci n'existe pas, par le ministère de l'éducation nationale. L'autonomie, en réalité, a été progressivement grignotée par l'État et les administrations.
Pour que l'autonomie devienne réalité dans les faits, il faudrait qu'elle soit vécue différemment dans les relations entre les acteurs concernés. C'est l'objectif de ce texte.
D'aucuns tout en étant favorables à l'autonomie, ne souhaitent pas que l'État se désengage. D'ailleurs, l'État ne se désengage pas sur le plan financier. Fondamentalement, l'autonomie signifie que l'État laisse vivre un certain nombre d'initiatives universitaires. Pour sauver l'université, l'autonomie universitaire doit reposer sur une pluralité de financements. Je ne pense pas que les financements privés des fondations réduiront l'investissement public de l'État, je pense plutôt que les deux types de financement sont la garantie d'une véritable autonomie universitaire. Il n'y a pas d'autonomie avec un financement unique.
Votre texte, madame la ministre, est bon, car il jette les bases d'une véritable refondation de la politique universitaire. La gouvernance n'est que la première étape, je le répète. Le Président de la République et le Premier ministre se sont engagés sur un montant de 9 milliards en cinq ans. On ne peut donc pas parler d'un désengagement financier de l'État.
Cela étant dit, je voudrais, dans les quelques minutes qui me restent, appeler l'attention du ministre et du Gouvernement sur deux ou trois difficultés.
D'abord, il faut être conscient que les évolutions dans les modes de gouvernance que vous annoncez vont inciter certaines universités à se regrouper. Cela devra se faire dans le respect de la diversité des disciplines, surtout dans notre pays, où les universités pluridisciplinaires, après quarante ans d'existence, demeurent encore très vivaces. Un certain nombre d'entre nous ont déposé des amendements qui permettent non d'établir des néocorporatismes – ce serait caricaturer la situation – mais d'affirmer notre volonté de voir perdurer des écoles juridiques, de médecine, de sciences, de sciences humaines, à l'encontre éventuellement de décisions prises par une université peu sensible à leur spécificité. Des soupapes de sécurité doivent donc être mises en place. Nous en parlerons lors de la discussion des articles.
Mais je voudrais surtout appeler l'attention du Gouvernement sur les dangers – c'est d'ailleurs un peu ce qu'a dit François Bayrou – de la syndicalisation excessive. Depuis plusieurs décennies, ce n'est pas la notion de syndicalisme au sein de l'enseignement que je combats, mais les déviations constatées, depuis plusieurs décennies, tant dans le secondaire que dans le supérieur. Le syndicalisme, s'est transformé en défenseur des intérêts matériels, entonnant le refrain lancinant que tout doit normalement se comptabiliser.
Je retrouve dans le discours de certains collègues la volonté de quantifier en permanence les demandes, là où il faudrait prendre en considération l'aspect qualitatif. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Par ailleurs, je suis favorable au renforcement des pouvoirs du président d'université, sous réserve qu'il soit épaulé par un véritable secrétaire général – comme cela est prévu – et par une administration de haut niveau, à l'instar de ce qui existe dans la plupart des autres établissements publics.
Enfin, je veux souligner que l'intérêt de l'université, c'est d'être compétitive au niveau international et de délivrer des diplômes à la hauteur des exigences de notre pays, et non de défendre tel clan contre tel autre. Nous en reparlerons au moment de l'examen des amendements. Certains de nos collègues, habitués aux conflits internes des universités qu'ils ont connus et subis, réclament prudemment au Gouvernement une explication de texte très forte avant les élections universitaires, pour que l'esprit de la réforme, voulue par Nicolas Sarkozy, ne soit pas dévoyé par des antagonismes de clans parasyndicaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)