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Intervention de Yvan Lachaud

Réunion du 23 juillet 2007 à 15h00
Libertés et responsabilités des universités — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYvan Lachaud :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, la réforme des universités est à l'ordre du jour du Gouvernement. Enfin ! Depuis plus de vingt ans, il était quasiment interdit de toucher aux règles de fonctionnement de nos facultés alors qu'elles étaient devenues inadaptées à la massification de l'enseignement – cela a déjà été dit – et à la mondialisation. Madame la ministre, nous vous félicitons pour le courage que vous montrez en nous présentant ce texte, sous l'impulsion du Président de la République et du Premier ministre.

Réformer nos universités est aujourd'hui une nécessité, une urgence même. Le nombre de jeunes qui accèdent à l'enseignement supérieur a considérablement augmenté — il faut s'en féliciter — puisque les gouvernements successifs l'on souhaité : plus de 70 % d'une classe d'âge sont désormais bacheliers – tous baccalauréats confondus. Or si le lycée s'est adapté à la massification de l'enseignement, notamment en ce qui concerne la pédagogie et les formations proposées, nos universités – il faut bien le reconnaître – n'ont pas réalisé l'indispensable aggiornamento. La réforme LMD, qui réorganise les parcours universitaires, nous pousse également à la réforme : les étudiants en BTS ou DUT notamment, diplômés à bac +2, attendent avec impatience de trouver leur place dans ce nouveau système, sans que ce soit nécessairement par le biais de licences professionnelles.

Ne nous trompons pas de débat : il ne s'agit pas de choisir entre la sélection au mérite et la promotion sociale, entre l'égalité républicaine et un système d'excellence-concurrence. C'est pourquoi l'autonomie des universités, loin de se faire au prix du désengagement de l'État, doit s'accompagner de la création de postes. Dès lors, la querelle sur la nature de ces créations — postes de fonctionnaires titulaires ou de contractuels — n'a guère de sens. Il est ridicule de s'inquiéter d'une éventuelle précarisation des emplois universitaires alors même que tant de jeunes chercheurs vivotent avec un demi-poste d'assistant pour un an ou tentent une autre carrière dans l'attente d'un emploi définitif. Des postes de trois ou six ans assureraient mieux l'avenir des jeunes chercheurs que les contrats annuels d'aujourd'hui.

Le projet de loi va dans le bon sens, notamment parce que les sujets qui faisaient débat ont été résolus. Une analyse lucide et raisonnable du texte le confirme de façon évidente et seule la mauvaise foi, voire une vision idéologiquement bornée, pourraient faire croire le contraire. Non seulement une place suffisante a été faite à la concertation avec les syndicats étudiants et enseignants, ainsi qu'avec les présidents d'université, mais, de plus, la représentation des étudiants sera préservée. Il ne s'agit pas de faire des présidents les nouveaux propriétaires de l'université.

Madame la ministre, les députés de notre groupe entendent apporter leur pierre à l'édifice. C'est pourquoi nous défendrons les idées fortes suivantes.

Premièrement, nous sommes attachés au modèle universitaire français. Il est pour nous hors de question de toucher au statut national des diplômes.

Deuxièmement, il nous paraît indispensable de revoir la gouvernance des universités, en démocratisant son fonctionnement et en promouvant les fonctions d'encadrement.

Troisièmement, il est tout aussi indispensable de s'attaquer au problème principal de l'université : l'échec en première année, qui touche quelque 40 % des étudiants. Cela implique d'améliorer l'orientation en amont de l'université en préparant mieux les lycéens à la spécificité du travail universitaire. Puisque 70 % des jeunes ont désormais leur baccalauréat – je le rappelle : tous baccalauréats confondus –, l'université doit adapter ses méthodes pédagogiques et ses formes d'évaluation à des élèves habitués au contrôle continu. Le lycée n'est donc pas le seul à devoir s'adapter : il appartient aussi à l'université de le faire. Il n'est pas sérieux de laisser tous ces jeunes sur le bord du chemin : il y va de notre responsabilité.

Quatrièmement, il faudrait réfléchir à renforcer la présence humaine dans les campus. L'université a grand besoin de tuteurs, de moniteurs, d'interlocuteurs pour les étudiants débutants ou de bibliothécaires, c'est-à-dire de toute une gamme de soutiens visant à rendre l'université accueillante en échange de bourses convenables qui changeraient la vie d'un grand nombre d'étudiants et de leur famille.

Cinquième et dernier point, les universités doivent faire leur place à tous, valides et personnes en situation de handicap. Grâce à la loi du 11 février 2005, la scolarisation des enfants handicapés dans les établissements primaires et secondaires est désormais une réalité. Il faut continuer et permettre aux jeunes handicapés, qui rencontrent un grand nombre de problèmes dans les universités, d'y poursuivre leur formation. Nous améliorerons de cette manière leurs chances d'insertion professionnelle : nous avons déposé un amendement en ce sens, précisant qu'il doit relever des missions et des attributions du conseil des études et de la vie universitaire de rendre accessible l'université aux étudiants handicapés en leur offrant les aménagements nécessaires.

Il convient enfin de poser la question des moyens : aujourd'hui, l'État dépense 10 000 euros pour un lycéen contre seulement 7 000 pour un étudiant. Il faut rétablir l'équilibre, ce qui implique un investissement majeur de la nation en faveur de l'enseignement supérieur : il s'agit en effet de doubler en dix ans l'investissement par étudiant pour le porter au niveau de la moyenne des pays performants de l'OCDE.

Nous devons avoir conscience que la bataille du XXIe siècle sera celle de l'intelligence. Nous sommes entrés dans une société de la connaissance, où la puissance dépend de la maîtrise du savoir. Quand on sait qu'il y a plus d'informaticiens à Bangalore que dans la Silicon Valley, on mesure l'enjeu d'une telle bataille pour les pays occidentaux : pour ne pas perdre la maîtrise de la conception comme nous avons perdu celle de la production, il nous faut miser sur l'enseignement supérieur et sur la recherche. C'est l'avenir du pays et de nos enfants qui en dépend.

Pour toutes ces raisons, le groupe du Nouveau Centre examinera d'un oeil très favorable ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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