C'est comme ça ! À partir du moment où Mme Alliot-Marie ouvre cette boîte, on doit y entrer ! Et vous y êtes ! Sans parler du mode de scrutin retenu : des circonscriptions pour l'étranger, on croit rêver ! Nous avions proposé la proportionnelle ; vous l'avez refusée.
Deuxième outil utilisé par le secrétaire d'État : l'argumentaire à géométrie variable.
Tout département, nous dit-il, devrait compter au moins deux députés. L'exemple type, c'est la Lozère. Pour cela, M. Marleix invoque la ruralité, le territoire : « Fait-on le même métier quand on est député de Paris et qu'on fait le tour de sa circonscription en trois stations de métro et quand on est député au fin fond de la province, avec 500 communes réparties sur un territoire de 600 000 hectares ? » Vous poursuivez : « On ne peut pas demander aux députés d'être davantage présents aux commissions et en séance publique et maintenir un système qui les condamne, s'ils veulent être réélus, à être en permanence sur le terrain. »
Alors, pourquoi n'appliquez-vous pas ce genre de raisonnement aux autres départements ? Pourquoi, pour les autres départements, vous en tenez-vous à la stricte arithmétique géographique ? Si vous suivez votre logique, vous devriez utiliser deux paramètres : la population et les territoires. Nous avons tous des exemples en tête, et je peux vous en fournir un : dans ma circonscription il y a 154 communes dont la plus grosse compte 6 000 habitants ; il faut deux heures pour la parcourir d'est en ouest, et une heure et demi pour le faire dans le sens nord-sud. Bien sûr, c'est plus compliqué que dans le centre d'une grande ville.
Troisième outil à disposition du secrétaire d'État : le rééquilibrage ou remodelage des circonscriptions, qui consiste à y rattacher des cantons, ici ou là, de façon tout à fait objective et innocente.
Nous sommes instruits par l'expérience de 1986 : à une circonscription de gauche, on rajoute un ou deux cantons de gauche pour lui assurer un siège qu'elle a déjà, et on dégage ainsi des électeurs de gauche d'une ou deux circonscriptions qui deviennent beaucoup plus faciles à conquérir pour la droite. Cette méthode a été appliquée à partir de 1986 et, dans ce genre d'exercice, il vaut mieux être celui qui tient les ciseaux. Bruno Le Roux en a fait une démonstration très explicite et éclairante qui figure à la page 38 de votre rapport, monsieur de La Verpillière.
Avant de terminer mon intervention, je veux évoquer un cas particulier et assez cocasse sur lequel Christian Eckert a attiré mon attention. Il s'agit de Han-devant-Pierrepont, commune située aux confins de la Meuse et de la Meurthe-et-Moselle et peuplée de 132 habitants.
Par un décret d'août 1996, elle est passée de la Meuse à la Meurthe-et-Moselle. Pour respecter les nouvelles frontières départementales, tout le monde souhaite voir cette commune incluse dans la septième circonscription de Meurthe-et-Moselle : Jean-Louis Dumont, député de la deuxième circonscription de Meuse, Christian Eckert, député de la septième circonscription de Meurthe-et-Moselle, et les habitants. Le hasard a fait que, jusqu'à présent, les habitants devaient voter Jean-Louis Dumont pour élire Christian Eckert. Si la proximité politique de nos deux collègues a facilité les choses, cette anomalie pourrait très facilement cesser, sans bouleverser les équilibres et à la satisfaction générale. Monsieur le secrétaire d'État, quelle réponse pouvez-vous apporter dans ce cas précis ?
Ces quelques points rapidement évoqués – mes successeurs à la tribune développeront d'autres aspects – nous portent à considérer que votre texte répond aux souhaits de redécoupage du Conseil constitutionnel, mais d'une façon qui suscite les plus grandes craintes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)