Où est la cohésion sociale ? Ces cadeaux ne sont rien d'autre que des transferts d'impôts, fondamentalement injustes, au profit des classes supérieures.
S'agissant de la croissance économique, le paquet fiscal voté en toute hâte cet été, pour un montant de 15 milliards d'euros dont 8 à 9 milliards de purs cadeaux fiscaux, a suscité le scepticisme général des économistes de toutes sensibilités. Il commence à démontrer son inefficacité alors qu'aucun effort n'est fait pour accroître le pouvoir d'achat des ménages modestes et pour encourager la consommation. Il n'y rien pour le SMIC, moins que rien pour les retraites, rien pour la prime pour l'emploi. Il n'y a rien non plus pour l'investissement : votre mesure sur le crédit d'impôt-recherche n'aura d'effet qu'en 2009. La mise en oeuvre d'un prélèvement libératoire sur les dividendes va au contraire encourager la distribution des bénéfices au détriment de l'investissement.
S'agissant, enfin, de la discipline des finances publiques, sans cesse invoquée par les ministres successifs de la dernière législature, la dette publique est passée de 56,2 % du PIB en 2002 à 64 % du PIB, selon les prévisions pour 2008, soit une augmentation de plus de 6 000 euros de la dette moyenne publique par Français en six ans.
Et voilà qu'après avoir laissé croître la dette et les déficits, votre gouvernement est en train d'inventer les découverts, en autorisant un plafond de découvert pour l'ACOSS et pour le FIPSA. Cela représente 40 milliards d'euros de dettes camouflées, génératrices de 1,5 milliard d'euros de frais financiers. Et tout cela pour gérer des déficits sociaux que vous ne maîtrisez pas non plus.
Effet conjugué de l'héritage de la législature précédente et du paquet fiscal – qui est votre enfant, madame la ministre, monsieur le ministre –, l'explosion de la dette fiscale ne peut déboucher que sur des hausses massives de prélèvements.
Passées les élections municipales, la hausse de la CRDS est inévitable. Elle est pour ainsi dire déjà inscrite, compte tenu de l'augmentation de la dette de la sécurité sociale et de l'interdiction de prolonger la durée de vie de l'amortissement. À moins, madame la ministre, que vous ne décidiez, comme le bruit en a couru, de supprimer la CADES en réintégrant la dette sociale – quelque 100 milliards d'euros à l'horizon 2009 – dans la dette publique générale. Il serait important que vous précisiez vos intentions à ce propos.
Qu'en sera-t-il pour la suite ? Une augmentation de la TVA antisociale ainsi qu'un projet de réforme de l'impôt sur le revenu qui nous ramènerait un siècle en arrière, avant la loi Caillaux. M. Philippe Marini, rapporteur du budget au Sénat, l'a déjà proposé. Il s'agit de l'abolition de toute progressivité par la création d'un taux unique, appelé flat tax par les néoconservateurs américains. D'ores et déjà, le coût cumulé de la baisse de la progressivité de l'IRPP depuis 2001 est chiffré à 50 milliards. L'impôt sur le revenu vient de passer en troisième position parmi les postes de recettes fiscales de l'État.
Votre choix, fidèle aux valeurs invoquées par M. Mathis, est un refus symbolique de l'impôt minimum sur le revenu, comme l'a rappelé le président de la commission des finances. Votre choix, c'est la tolérance des plus grandes inégalités, de la fragmentation sociale et de la désagrégation du pacte social.
Notre choix, c'est celui de la solidarité, de la lutte contre les inégalités excessives et contre la pauvreté. Il est fidèle à la vision républicaine de la contribution de chacun au bien commun en proportion de ses facultés contributives. Votre projet de loi de finances prend la direction opposée. C'est pourquoi nous continuerons à défendre notre choix républicain de justice sociale et fiscale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)