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Intervention de Dominique Baert

Réunion du 16 octobre 2007 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Baert :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour ne pas vous laisser dans l'incertitude, je le dis tout de go : je ne voterai pas ce projet de budget. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

D'abord, il n'est pas le bon projet pour la croissance économique. D'ailleurs, a-t-il la moindre ambition à cet égard ? Hormis le crédit d'impôt recherche, qu'y a-t-il pour stimuler la consommation ou l'investissement ? À vrai dire, rien ! Ce texte n'est pas le coeur de votre politique économique. Le texte fondateur du quinquennat, celui dont vous attendez beaucoup et qui restera l'erreur historique de ce gouvernement, c'est le fameux projet bien mal nommé TEPA – Travail, emploi et pouvoir d'achat –, que vous avez fait adopter à marche forcée et en urgence l'été dernier. C'est lui qui porte la marque de vos références idéologiques et qui est l'instrument premier de votre stratégie économique. Avec lui, vous avez beaucoup donné. Vous dites que c'est pour la croissance : en fait, vos choix ne sont qu'une accumulation d'erreurs financières qui seront demain autant d'erreurs économiques.

Avec le TEPA, dites-vous, le recours aux heures supplémentaires sera facilité : c'est le chômage qui augmentera, car ces heures supplémentaires se substitueront aux créations d'emplois. Les cotisations patronales des entreprises sont allégées : c'est plutôt leur profitabilité qui s'accroîtra au détriment d'une répartition équilibrée entre profits et salaires. Les intérêts d'emprunts sont déductibles de l'impôt sur le revenu : ce ne sera qu'une niche fiscale de plus, un effet d'aubaine pour des contribuables qui n'ont pas forcément besoin qu'on les aide à acquérir un patrimoine. Les droits de succession sont réduits : cela ne favorisera que ceux qui thésaurisent, qui placent, et augmentera progressivement les inégalités devant le patrimoine sans stimuler en rien notre croissance économique. Enfin, le bouclier fiscal est abaissé. À 60 %, les reversements auxquels il donne droit sont déjà scandaleux au regard de la perte de pouvoir d'achat, des franchises médicales aux petites retraites écornées, que vous imposez aux plus modestes. Aux plus faibles, les sacrifices, aux plus riches, les remboursements d'impôts ! En portant ce bouclier à 50 %, vous rendez cette politique encore plus injuste socialement et inefficace économiquement. Comment pourrait-il en être autrement quand vous rendez de l'argent à ceux qui épargnent plus qu'ils ne consomment ?

Rien dans tout cela n'est en mesure de créer une once de croissance supplémentaire ! La vérité, c'est qu'aucun des moteurs de la croissance n'est réellement stimulé, ni la consommation des ménages ni l'investissement des entreprises, qui ont besoin de croire à leurs marchés futurs pour pouvoir développer leurs équipements. Les dépenses publiques sont au contraire aveuglément contraintes : l'an prochain, il y aura moins de fonctionnaires dans nos écoles, moins de militaires, moins de policiers même, et surtout moins de services publics sur le territoire. Cela signifie l'appauvrissement de nos territoires, car le facteur structurant déterminant qu'est le service public local est en voie de profonde dégradation. Le "choc de confiance" promis par le candidat Sarkozy n'est qu'un leurre : il a vécu ce que vivent les campagnes électorales, l'espace d'un printemps. Mais ces 15 milliards d'euros inutilement dépensés, c'est une addition qu'il faudra bien payer !

Bientôt, vous nous proposerez de réduire encore les dépenses publiques. D'ailleurs, le ministre du budget a déjà mis en réserve 7 milliards de ce que nous n'avons pas encore voté. C'est dire ! Bientôt, vous reviendrez annoncer une hausse des impôts, à n'en pas douter lourde, pour combler les trous que vous avez creusés. Ce n'est sans doute pas pour rien que le Gouvernement et la majorité ont rédigé des rapports sur la TVA sociale ! Bientôt, vous n'aurez plus d'autre choix que d'aller expliquer à nos partenaires de l'Eurogroupe que la France ne pourra pas respecter son objectif d'équilibre des finances publiques, ni en 2010 – vous le leur avez déjà dit – ni même en 2012 !

Le vrai projet de loi de finances, ce sera la loi de finances rectificative d'après les élections municipales. La vraie facture, ce sera moins de services publics, plus d'impôts, plus de déficit. Et tout cela pour une croissance qui ne sera même pas au rendez-vous ! Le Fonds monétaire international vient d'annoncer qu'il révisait de 2,3 % à 2 % la croissance française pour 2008 : même en dehors de nos frontières, on n'est pas convaincu, par votre politique économique !

Président départemental d'une association d'élus, je veux vous dire mon inquiétude et celle de tous les élus que je rencontre. Qu'ont-ils entendu de ce projet de budget pour 2008 ? Qu'avec lui, les collectivités locales ne profiteront plus de la croissance économique nationale, que leurs dotations augmenteront moins vite que ces dernières années et diminueront de 400 millions d'euros chaque année pendant quatre ans, que la dotation forfaitaire, principale ressource de toutes les communes et des intercommunalités, n'augmente même pas de 1 %, que l'enveloppe de la dotation globale de fonctionnement pour 2008 devrait être diminuée d'une régularisation négative de la DGF 2006 de 84,2 millions d'euros et que la dotation de compensation de la taxe professionnelle baisse de 22 % !

Chers collègues, nous cherchions, dans ce projet de budget, où était la "rupture" annoncée : elle est là, dans les collectivités locales ! Fini le temps de la décentralisation, de l'autonomie politique et du libre choix ! Finie l'idée si pertinente que quand l'État mène une politique de rigueur, les collectivités locales, par leurs dépenses, jouent un rôle contracyclique en stimulant l'économie locale !

La rigueur que vous demandez aux collectivités locales consiste à étrangler leurs budgets et les contraint à abandonner leurs politiques.

Aucune collectivité ne sera épargnée. Aucune ne pourra faire face aux dépenses qu'elle doit engager pour les besoins de sa population avec des recettes qui stagneront, quand elles ne diminueront pas. Cet effet de ciseaux risque d'être un « effet de tondeuse » pour les élus locaux ! (Sourires.)

Osons le dire : le PLF pour 2008 n'est pas bon pour les collectivités locales ; pis que cela, il est dangereux et inefficace.

Enfin, il faut dire "non" à ce texte, parce qu'il ne répond pas aux problèmes lourds que notre économie connaît.

Au problème de la dette publique d'abord. À quel niveau sera-t-elle fin 2007 et en 2008 ? La France risque de s'enfoncer encore un peu plus dans la dette.

Fin décembre 2006, à la suite de ponctions sur les trésoreries et de quelques placements opportuns de fin d'année, le stock de la dette aurait été amené à 63,7 % du PIB ! Baisse sympathique s'il en est, à quelques mois de l'élection présidentielle ! Mais, fin mars 2007, la dette était déjà revenue à 65 % du PIB et, fin juin 2007, elle dépassait 66 % !

Pourtant, on n'avait pas encore voté les dépenses du TEPA. On n'avait pas encore connu la crise bancaire de l'été. On n'avait pas encore voté ce PLF ! Quelles seront les conséquences de ce dernier ? Le président de la commission des finances, Didier Migaud, y faisait allusion cet après-midi : bon nombre d'organismes de prévisions de conjoncture voient une dégradation du déficit public en 2008.

Certes, la prévision du Gouvernement est de moins 2,3 %. Mais il est curieux que l'OFCE voie passer ce déficit de moins 2,58 % en 2007 à moins 3,1 % en 2008, …

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