Je ne vais pas répéter ce qu'a déjà très bien dit Alain Vidalies en défendant notre exception d'irrecevabilité, mais je souhaite insister sur deux points.
Premièrement, monsieur le ministre, nous condamnons votre singulière conception du dialogue social. Car, dans cette affaire, le dialogue social a été bafoué, les partenaires sociaux ont été trahis et, si cette expression n'avait pas été galvaudée par le passé, je dirais qu'ils ont été bernés. Votre conception du dialogue social est à géométrie variable : d'un côté, vous transposez les accords qui vous agréent – par exemple le volet flexibilité de l'accord sur la modernisation du marché du travail –, de l'autre, vous vous montrez moins empressé, notamment lorsqu'il s'agit de transposer l'accord UPA, celui sur les mécanismes de compensation de la pénibilité au travail ou encore ceux portant sur la question des golden parachutes des dirigeants d'entreprise. Enfin, vous piétinez la volonté des partenaires sociaux quand leurs conclusions ne correspondent pas à vos points de vue. C'est le cas avec le fameux titre II de ce projet de loi qui, en dynamitant le code du travail dont il ne modifie pas moins de 60 articles, va enclencher un dangereux renversement de la hiérarchie des normes sociales.
La deuxième raison pour laquelle nous voterons l'exception d'irrecevabilité, c'est que ce projet de loi constitue un recul sans précédent pour les droits des salariés – en France, mais aussi sur le plan européen. Le repos compensateur et toutes les garanties collectives constituant des protections élémentaires – que vous qualifiez de « rigidités » – sont appelés à disparaître purement et simplement du code du travail. Monsieur le ministre, les salariés n'ont pas à faire les frais, au prix de leur santé, de vos prises de position tactiques vis-à-vis de M. Copé ou de M. Devedjian !
Je conclurai en disant que ce projet de loi est un formidable aveu d'échec et une fuite en avant. Vous nous proposez finalement de poursuivre et aggraver une politique qui ne marche pas – ce que vous devriez commencer à comprendre, après vous être tant acharnés : en six ans, vous avez imposé sept modifications de la législation sur la durée du travail ! Aujourd'hui, 20 % seulement des salariés utilisent le contingent d'heures supplémentaires mis en place en 2004, les heures supplémentaires prévues par la loi TEPA sont un échec, tout comme le rachat des RTT ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, vous avez dit en introduction du débat que cette loi serait sans doute historique. Historique, elle le sera, mais dans le sens d'une formidable régression pour des millions de salariés ! C'est la raison pour laquelle notre groupe votera l'exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)