Vous nous proposez ensuite de remplacer les quatre modèles actuels de modulation du temps de travail par un seul système qui, sous les apparences de la simplification, se révèle, une fois encore, un véritable démantèlement des droits des salariés.
Je ne prendrai que l'exemple des entreprises qui travaillent en continu. Le nouvel article L. 3122-3 donnerait le pouvoir unilatéral à l'employeur d'organiser le temps de travail sur plusieurs semaines. Que se passera-t-il si l'employeur, par une décision unilatérale, fixe, comme il en a le droit, la limite haute à 48 heures hebdomadaires ? Le résultat sera très simple. Il n'y aura jamais d'heures supplémentaires possibles pour les salariés.
Outre la déréglementation à tout va, le fil rouge de votre réforme est la priorité donnée à l'accord d'entreprise. Les accords de branche deviennent supplétifs, en l'absence d'accords d'entreprise. Le principe de faveur qui permettait aux salariés de bénéficier des dispositions plus favorables d'un accord de branche est abandonné au profit de l'application obligatoire de l'accord d'entreprise, même moins favorable, pour tout ce qui concerne le contingent d'heures supplémentaires, le repos compensateur, les modalités d'organisation du temps de travail. Il ne sera même plus possible pour l'accord de branche de prévoir lui-même son application obligatoire au niveau inférieur puisque votre projet de loi ne prévoit plus sa prise en compte qu'à défaut de signature d'un accord d'entreprise.
Ce projet de loi inverse la hiérarchie des normes puisque, pour la première fois, est affirmée la supériorité de l'accord d'entreprise. Or vous êtes parfaitement conscient de la conséquence immédiate de ce bouleversement, à savoir l'émiettement, l'atomisation des règles d'organisation du temps de travail. Les règles sociales vont ainsi devenir un élément de concurrence entre les entreprises d'une même branche.