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Intervention de Aurélie Filippetti

Réunion du 1er juillet 2008 à 15h30
Archives archives du conseil constitutionnel — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélie Filippetti :

Les historiens, les épidémiologistes, les environnementalistes et tous ceux qui travaillent sur ce sujet se verront-ils fermer « pour l'éternité » ce sujet de recherche, comme l'a dit Mme Albanel au Sénat le 15 mai ?

En préférant un délai de communication de cent ans au principe d'incommunicabilité des archives dont le contenu est susceptible de porter atteinte à la sécurité des personnes, c'est-à-dire des archives concernant les agents des services spéciaux de l'État, la majorité a certes infléchi le texte initial dans le bon sens, mais ce délai nous apparaît toujours excessif.

Autre motif d'inquiétude : les dispositions portant sur les documents relatifs à la vie privée des personnes, finalement accessibles après un délai de cinquante ans et non de soixante-quinze ans, comme le voulaient les sénateurs, risquent, par une définition extensive de la notion de vie privée, de rendre à terme plus difficile l'obtention des dérogations. On peut effectivement déplorer la réintroduction de la référence à l'honneur des personnes, dans le cadre de ce texte, alors que cette notion relève du code pénal, qui sanctionne la diffamation et la dénonciation calomnieuse dont un individu peut faire l'objet. De plus, et cela a déjà été souligné dans le débat, les archives notariales, les documents statistiques officiels, les enquêtes de police judiciaire et les dossiers personnels des fonctionnaires seront finalement communicables dans un délai moyen de soixante-quinze ans, alors que le projet de loi initial prévoyait un délai moyen de cinquante ans. Cet allongement très dommageable a pour principale conséquence de reporter d'une génération la libre consultation de ces archives. Sur ce point, la France se doterait d'une des législations les plus restrictives d'Europe sous la pression, comme l'a rappelé mon collègue Chassaigne, du lobby notarial. Là encore, l'Association des usagers du service public des archives nationales s'interroge. Est-il normal de ne pas pouvoir consulter librement les dossiers de justice concernant l'association d'extrême droite La Cagoule au temps du Front populaire ? Est-il admissible de ne pas avoir accès aux minutes notariales concernant la spoliation des juifs et l'aryanisation des biens sous le régime de Vichy ? Ces documents, ayant dépassé le délai de cinquante ans, seraient devenus librement accessibles dès la promulgation de ce texte si le délai proposé par le Gouvernement avait été respecté par les parlementaires de la majorité ; or ils ne pourront être consultés qu'à partir de 2019.

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