Sans cela, vous maintiendrez la grande majorité des Français dans une situation sociale intenable, les contraignant à vivre dans des conditions très difficiles, notamment en matière alimentaire. J'en veux pour preuve cette publicité envoyée par un grand distributeur à l'ensemble des députés des la commission des affaires économiques. Ce prospectus, intitulé « Mon plan discount », propose aux consommateurs un repas complet pour 0,94 euro. Par repas complet, il entend : des carottes sous cellophane, de la purée sans lait, des saucisses de Strasbourg au premier prix et un yaourt nature sans sucre. On est loin du Fouquet's ! Voilà, madame la ministre, ce que signifie la concurrence par la baisse des prix. M. Barnier souhaite que les Français mangent plus de fruits et légumes. Soit ! Mais donnez leur les moyens de le faire sans que cela se répercute sur les situations sociales et financières des agriculteurs français et des salariés. Seriez-vous prêts à organiser un véritable Grenelle du pouvoir d'achat, comme celui de 1968, qui n'avait fait que du bien à l'économie nationale, ainsi que vient de le déclarer M. Balladur lui-même – à sa grande surprise, ajoute-t-il !
Enfin, concernant la banalisation du livre A, nous sommes encore une fois en pleine injustice, car c'est l'épargne populaire que vous livrez aux banques privées, des milliards en liquidités offerts à ces spéculateurs. Vous arguez que les consommateurs se retrouveront dans cette réforme, car ils pourront ouvrir un livret A dans la banque de leur choix. La belle affaire, quand ces banques verront des dizaines de milliards d'euros renflouer leurs caisses au détriment du logement social ! Certes, Bruxelles a ordonné la généralisation du livret A, mais vous n'étiez nullement contraints d'en décentraliser la collecte. Le choix de laisser à la disposition des banques près de 30 % des sommes collectées est d'ailleurs dans le collimateur de la Commission européenne au nom du principe de concurrence. C'est un peu le serpent qui se mord la queue !
Les milliards de liquidités offerts aux banques françaises représenteraient ainsi une aide indirecte de l'État qui permettrait la participation accrue des établissements bancaires français dans le capital des banques européennes. Daniel Bouton peut vous remercier ; vous lui permettez de garder son poste et de renflouer les caisses de la société générale !
Inefficacité, injustice et conservatisme, tels sont les maîtres mots de la modernisation au sens où vous l'entendez. C'est pourquoi je propose, comme François Brottes, de modifier le titre de ce texte et de l'appeler non pas LME, mais LEL : loi pour l'économie libérale. Bien entendu, les députés communistes et républicains voteront contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)