Mais, monsieur Novelli, votre texte ne vise pas cela, même si, bien évidemment, certains de ses articles proposent des mesures de bon sens que nous approuvons.
Comment accepter qu'une surface commerciale de plusieurs centaines de mètres carrés puisse ouvrir sans passage en commission départementale, tuant ainsi des dizaines de petits commerces ? Par ailleurs, monsieur Novelli, vous faites référence à la loi TEPA ! Faut-il rappeler que la promesse d'un pouvoir d'achat revalorisé pour ceux qui seraient prêts, ou contraints par leur employeur, à travailler plus pour quelques euros supplémentaires n'a pas été tenue ? Les bas salaires pèsent dans notre pays, menant à une réelle précarité et, phénomène nouveau, la vie devient de plus en plus difficile même pour les classes moyennes.
Le nombre de créations d'entreprises est en hausse de façon continue depuis le début des années 2000, mais cela n'empêche pas un chômage persistant, une précarité montante et un accroissement des inégalités visible et inquiétant.
En 2006, 40 % des nouveaux entrepreneurs étaient d'anciens chômeurs. Nul doute que, si certains souhaitent se mettre à leur compte, d'autres en sont réduits à l'entrepreneuriat contraint, avec le risque lourd d'un retour, non pas au chômage, mais à une situation encore plus précaire.
Ainsi, selon l'Observatoire des inégalités, alors que les indépendants représentent 9 % des actifs, le taux de pauvreté dans leur catégorie est de 11 %, soit deux fois le taux moyen en France ; en fait, un actif pauvre sur cinq est un travailleur indépendant.
Et alors qu'il faudrait sécuriser ces entreprises, vous supprimez le recours obligatoire aux commissaires aux comptes !
Et le durcissement des conditions de l'indemnisation du chômage n'est pas pour rien dans l'augmentation du nombre de créations d'entreprises par des chômeurs, avec les risques que cela fait courir d'un échec supplémentaire pour beaucoup d'entre eux.
Cet accroissement de la création des entreprises est donc aussi le reflet des difficultés sociales dans un pays malade de son manque d'emplois, de la course à la rentabilité acharnée à laquelle se livrent de nombreuses entreprises, et des suppressions d'emplois qui vont avec.
Ainsi, dans votre article 3, vous permettez à des personnes salariées, à temps plein ou partiel ou retraitées, de déroger au droit commun en créant leur activité indépendante : est-ce là votre réponse aux revendications de nombreux actifs et retraités dans ce pays ? Vous êtes caissière à temps partiel dans un hypermarché, payée moins de 1 000 euros par mois ? Créez votre entreprise ! Vous êtes retraité de la fonction publique, avec moins de 1 000 euros par mois ? Créez votre entreprise ou travaillez comme remplaçant comme, par exemple, dans l'Éducation nationale ! Est-ce là la société moderne que vous voulez ? Est-ce là la modernisation de l'économie dont vous nous parlez ? Vivre pour travailler, seul moyen de s'en sortir avec un revenu décent ?
Car, dans ces TPE, on ne compte pas ses heures, et, dans le petit commerce notamment, beaucoup, pour tenir, travaillent dix à douze heures par jour, si ce n'est plus ! C'est sans doute cela aussi la « modernisation » des conditions et des horaires de travail, avec l'extension du travail le dimanche, sa banalisation, l'appel à la création de plus de grandes surfaces..., sans oublier l'actualité, avec la flexibilisation du temps de travail et, au bout, l'alignement de notre pays sur la durée européenne de quarante-huit heures. Vous acquiescez, monsieur Novelli !
Ce texte est bien fidèle à votre logique libérale, celle dont je parlais au tout début de notre propos, celle qui éclaire tous vos projets. C'est pour cela que, bien évidemment, nous ne l'approuverons pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)