Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi nous inquiète, comme il inquiète celles et ceux de nos concitoyens qui sont ou seront touchés un jour par ce drame qu'est la perte d'un emploi.
Le chômage, ce n'est ni la sanction d'une existence professionnelle laxiste, ni une fatalité à accepter dans un univers économique troublé. Le chômage, c'est avant tout une rupture : c'est une part de ce que l'on est, de sa représentation sociale, qui disparaît. Cette mise en difficulté, cette fragilisation impose donc une réponse sociale qui allie réalisme, clarté et compréhension. Le mépris comme la compassion doivent être écartés dans le traitement de ces situations. Hélas ! ce texte tombe dans certains de ces travers.
À sa lecture, on est d'abord frappé par l'absence de nouveauté concernant la définition des droits du demandeur d'emploi. En effet, le projet de loi ne fait que reprendre, quand il ne les supprime pas, les outils du code du travail et du règlement de l'UNEDIC, qui existent mais ne sont pas appliqués. Pas d'avancées en direction de la formation des demandeurs d'emploi, notamment les moins qualifiés. Pas d'évolution dans la prise en compte de leurs compétences ni pour le suivi de leur projet personnel – le PPAE, par exemple, existe déjà.
Ce texte n'accorde pas de crédibilité à la volonté des chômeurs de retrouver une place réelle dans notre société. Plus inquiétant encore, la mise en place de l'opérateur unique ANPE-UNEDIC risque d'aboutir, comme c'est déjà le cas dans certains départements, à des compressions de personnels qui ne feront que niveler par le bas les services rendus aux chômeurs.
En revanche, le projet de loi est particulièrement ambitieux en ce qui concerne les devoirs des demandeurs d'emploi. De la dégressivité des allocations au temps de transport, de la radiation en cas de refus de deux offres à la notion d'offre raisonnable d'emploi, ce texte marque une véritable rupture avec ce que l'on pouvait attendre d'un service public d'aide aux demandeurs d'emploi. Ces derniers, rendus coupables de leur situation, doivent ainsi accepter des offres que d'autres auront jugé raisonnables pour eux. Loin d'aider à un retour à un emploi stable et convenablement rémunéré, ce texte va instituer la proposition d'emploi précaire, le plus souvent dans les secteurs en tension, sans donner la possibilité aux demandeurs d'exprimer leur point de vue.
Ce texte est inquiétant, et le contexte politique accentue encore la sensation de malaise qui nous étreint à sa lecture. Après les attaques contre le code du travail, la fusion entre l'UNEDIC et l'ANPE – qui ne semble pas prendre le chemin de l'amélioration du service rendu aux demandeurs d'emploi –, après la modernisation du marché du travail et la réforme de la démocratie sociale et du temps de travail – qui aura les conséquences que l'on sait et que l'opinion découvre peu à peu –, cette nouvelle offensive souligne bien la cohérence de votre action.
Cette action, nous ne pouvons que la blâmer, et ce pour trois raisons. Tout d'abord, elle ne répond pas aux besoins des Français, qui, en plus de sentir fragilisés par la baisse de leur pouvoir d'achat et les soubresauts de l'économie mondiale, constatent que l'État accepte de généraliser la précarisation de ceux qui se trouveront touchés par ces fléaux. Ensuite, elle institue le règne de l'individualisme et, surtout, de la stigmatisation d'une part croissante de notre société. Enfin, elle n'assume pas ce qu'elle fait et préfère attaquer les décisions socialistes passées, plutôt que de présenter au grand jour la vision de la société qu'elle fait pourtant prévaloir.
Ce texte est inquiétant et le moment est grave. En cette période estivale,…