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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 16 juillet 2008 à 21h30
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi — Discussion d'un projet de loi adopté par le sénat après déclaration d'urgence

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

Monsieur le président, madame la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, mesdames et messieurs les députés, au coeur de l'engagement présidentiel figure le plein emploi. Nous voulons abaisser notre taux de chômage à 5 % à la fin du quinquennat, c'est-à-dire en 2012, et ramener le plus grand nombre de nos concitoyens vers l'emploi avec un taux d'emploi de 70 %.

Cette question du plein emploi est étroitement liée à celle du pouvoir d'achat, car l'emploi est le premier des combats pour améliorer le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Une personne qui retrouve un emploi, c'est un revenu supplémentaire pour le foyer et du pouvoir d'achat pour toute la famille.

Aujourd'hui de 7,2 %, notre taux de chômage est le plus bas depuis vingt-cinq ans et notre taux d'emploi remonte enfin à 65,1 %. Nous nous approchons donc, sans l'avoir encore atteint, de notre objectif de 70 %.

Pour y parvenir, il nous faut bien entendu prendre des mesures de fond pour encourager la croissance et créer les emplois de demain. Cela passe par la réhabilitation du travail, la compétitivité, l'innovation, l'attractivité. Un ensemble de lois importantes adoptées depuis juillet 2007, à commencer par la loi « travail, emploi et pouvoir d'achat », s'inscrivent dans le combat que nous menons contre le chômage et pour l'emploi. Quant à la loi de modernisation de l'économie, qui a été débattue devant cette assemblée et devant le Sénat, elle contribuera elle aussi à améliorer l'attractivité de notre territoire, sa capacité d'innovation et, par conséquent, à créer des emplois.

S'il est essentiel de créer des emplois, il faut aussi être en mesure de les pourvoir avec des salariés formés et compétents. Or nous sommes face à une situation très paradoxale : 1,9 million de personnes sont au chômage tandis que plusieurs centaines de milliers d'offres d'emploi dans nos entreprises ne trouvent pas preneur. Cela signifie que nous sommes en présence d'une offre et d'une demande qui ne se rencontrent pas de façon harmonieuse : nous devons donc améliorer le marché de l'emploi.

Pour cela, de nombreux chantiers ont déjà été lancés, notamment par les partenaires sociaux. Depuis l'accord interprofessionnel du 11 janvier 2008, notre pays a franchi un pas important en termes de sécurisation des parcours professionnels. Cet accord a été transcrit dans notre législation par la loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail.

Parallèlement, depuis la loi du 13 février 2008, votée dans cette assemblée, le processus de création du nouvel opérateur issu de la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC est lancé. Avec Laurent Wauquiez, nous nous attachons à faire avancer ce chantier avec détermination, afin qu'il se traduise le plus vite possible par des améliorations concrètes et visibles sur le terrain à la fois pour les demandeurs d'emploi et les entreprises qui recrutent. Nous y sommes l'un et l'autre particulièrement attentifs. Nous avons eu de longs débats sur ce sujet. Ce n'est pas une réforme institutionnelle : il s'agit au contraire de créer une plateforme de services afin d'offrir un meilleur service aux usagers de ce nouveau service public de l'emploi que sont les candidats à l'emploi et les entreprises.

Certains changements concrets sont déjà intervenus. Je pense notamment à l'amélioration de l'offre de service en direction des seniors, mise en oeuvre depuis le 1er mars. Les agences nationales de l'emploi issues de la nouvelle institution procèdent à un suivi mensuel des futurs salariés seniors pour les rapprocher, le plus vite et le mieux possible, de l'emploi.

Toutes ces réformes sont interdépendantes. Depuis le début de l'année, le chantier de la réforme de la formation professionnelle est également en marche. Nous avons tenu, le 10 juillet, avec Laurent Wauquiez, une importante réunion en présence des partenaires sociaux et des représentants des régions – tous ces acteurs étant concernés par la formation professionnelle. Dans ce domaine, nous devons réformer le système en profondeur afin de pallier les déficiences du système de formation, qui est l'une des étapes indispensables pour créer un marché du travail efficace où offre et demande puissent se rencontrer.

Je voudrais mentionner un dernier chantier, qui fait lui aussi partie aussi du paysage de ce marché de l'emploi que nous devons améliorer : les négociations paritaires sur la prochaine convention d'assurance chômage, qui devraient s'ouvrir à la rentrée prochaine. Il s'agit d'élaborer les mécanismes d'indemnisation les plus efficaces possibles au service des candidats à l'emploi qui ne trouvent pas rapidement un nouvel emploi.

Ces réformes particulièrement importantes pour nos concitoyens forment un ensemble cohérent et s'emboîtent les unes dans les autres. C'est tout le sens de ce projet de loi sur les droits et les devoirs des demandeurs d'emploi, qui contribuera lui aussi à accroître l'efficacité de l'intermédiation sur le marché du travail, car nous voulons mettre en place un marché du travail où se rencontrent l'offre et la demande, dans un souci de droits et de devoirs réciproques.

Ce sujet a été trop longtemps délaissé – comme celui de la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, nous en parlions depuis des années mais personne n'avait le courage de le traiter. Les partenaires sociaux, saisis en juin dernier de ce sujet, ne sont pas parvenus à trouver un accord, après avoir déjà échoué lors des négociations sur de précédentes conventions d'assurance chômage depuis 2000. C'est pourquoi le Gouvernement, au terme d'un processus engagé en juin 2007, doit agir aujourd'hui et traiter cette question de l'équilibre entre les droits et les devoirs et de la définition de l'offre raisonnable d'emploi, avec sérénité mais aussi avec détermination. Cet équilibre est l'un des éléments importants de ce paysage que j'essayais de vous décrire et dont les pièces s'emboîtent les unes dans les autres, notre objectif étant de rapprocher le plus possible les candidats à l'emploi de l'emploi.

Après une concertation approfondie avec les partenaires sociaux, nous sommes parvenus à un projet équilibré, qui répond à un besoin d'amélioration du fonctionnement de notre marché du travail et qui rencontre aussi – c'était une promesse du Président de la République – une légitime préoccupation de nos concitoyens.

Je voudrais vous présenter les principes généraux de la réforme, avant de vous indiquer quelles pourraient être ses modalités d'application.

Cette réforme se fonde sur trois principes clairs, qui sont d'ailleurs des idées de bon sens : une approche personnalisée, l'équilibre entre les droits et les devoirs, et enfin l'équité.

Premièrement, nous souhaitons une approche personnalisée car on ne peut en effet appliquer les mêmes méthodes, anonymes et globalisées, au chômage – qui, nous l'espérons, ne sera plus un chômage de masse mais sera réduit jusqu'à devenir portion congrue, puisque notre objectif est de le ramener à 5 % à la fin du quinquennat. Tout simplement parce qu'on ne traite pas de la même façon un cadre célibataire de trente ans habitant en région parisienne et une femme avec deux enfants, vivant en milieu rural et ayant des difficultés pour se déplacer.

L'offre raisonnable d'emploi doit donc être adaptée à la situation de chacun. Elle doit se fonder sur le projet professionnel que les candidats à l'emploi élaborent avec leur conseiller du service public de l'emploi. Elle doit aussi s'appuyer sur des critères objectifs pour éviter l'arbitraire, assurer une égalité de traitement et garantir l'efficacité du dispositif.

Le deuxième principe est tout aussi important puisqu'il s'agit de l'équilibre entre les droits et les devoirs. Qu'il n'y ait pas de droits sans devoirs est une évidence, qu'il est bon de rappeler, et que, j'imagine, personne sur les bancs de cette assemblée ne saurait contester.

Ce que nous souhaitons, c'est renforcer à la fois les droits et les devoirs, et ce de manière concomitante.

Davantage de droits, cela a été évoqué lors de la discussion sur la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC : c'est tout simplement, dans le cadre de la modernisation du marché du travail, la portabilité de certains droits et la réforme du service public de l'emploi, qui crée un service personnalisé auprès de chaque candidat à l'emploi.

La fusion ANPE-ASSEDIC permettra de déployer davantage de moyens humains au contact des usagers. Elle sera aussi l'occasion de rénover profondément l'offre de service aux demandeurs d'emploi, qu'ils soient indemnisés ou non. Ceux qui ont participé au débat sur la fusion s'en souviennent : il nous avait alors paru important d'offrir un service personnalisé à tous les candidats à l'emploi. Ce que nous souhaitons faire, c'est en quelque sorte du « sur mesure », adapté à chaque cas particulier.

Davantage de devoirs, en contrepartie, c'est tout simplement – ce n'est pas compliqué – accepter une offre d'emploi quand elle est raisonnable, quand elle correspond à ce qui a été défini dans le projet personnalisé.

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