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Intervention de Valérie Létard

Réunion du 2 juin 2009 à 21h30
Bilan de l'application de la loi pour l'égalité des droits et des chances la participation et la citoyenneté des personnes handicapées — Débat d'initiative parlementaire

Valérie Létard, secrétaire d'état chargée de la solidarité :

J'avais donc souligné à quel point il me paraissait important que ses conclusions puissent faire l'objet, comme le prévoit d'ailleurs la loi, d'un débat devant la représentation nationale. Aussi suis-je particulièrement heureuse que votre assemblée ait pris l'initiative de ce débat, qui va nous permettre de faire le point sur le bilan et les orientations de la politique du Gouvernement en direction des personnes handicapées.

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dont nous avons fêté le quatrième anniversaire en février dernier, a profondément renouvelé notre politique en faveur des personnes handicapées.

Elle repose désormais sur deux piliers répondant aux deux facteurs caractérisant le handicap : à l'inadaptation de la cité, la loi répond par « l'accès à tout pour tous » ; aux conséquences des déficiences de la personne, elle répond par la reconnaissance d'un droit à compensation des conséquences du handicap par la solidarité nationale.

Afin de tenir les objectifs fixés, la loi prévoit un calendrier de mise en oeuvre jalonné de plusieurs étapes, au premier rang desquelles la tenue, tous les trois ans, d'une conférence nationale du handicap. La première a eu lieu le 10 juin 2008, et elle a donné au Président de la République l'occasion d'annoncer un plan d'action, décliné par tous les ministères. Le rapport dont nous débattons des conclusions fait le point à la fois sur la mise en oeuvre de la loi et sur celle de ce plan d'action.

Faire que la réforme de 2005 se traduise concrètement dans la vie quotidienne des personnes handicapées est au coeur de l'engagement du Gouvernement. En quatre ans, l'effort public en faveur des personnes handicapées a augmenté de six milliards d'euros.

Les résultats de cet investissement collectif sont désormais visibles. Le nombre d'enfants handicapés scolarisés à l'école ordinaire a augmenté de 30 % depuis 2005 ; 170 000 enfants handicapés fréquentent désormais l'école de la République, pour leur plus grand bienfait, mais aussi au profit de tous les autres enfants qui sont ainsi éduqués au respect de la différence et à l'accueil des plus fragiles.

Actuellement, 58 000 personnes handicapées bénéficient de la nouvelle prestation de compensation du handicap dont le montant moyen s'élève à 1 000 euros, soit le double de la somme à laquelle ces personnes pouvaient prétendre auparavant. Afin de financer cette nouvelle prestation, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a versé plus de 2,1 milliards d'euros aux conseils généraux, ce qui a été rendu possible par la journée de solidarité.

Quelque 38 490 places nouvelles en établissements et services pour personnes handicapées ont été financées par l'État et l'assurance maladie entre 2005 et 2009.

Toutefois, ces résultats encourageants ne doivent pas masquer les difficultés réelles – que vous avez rappelées, monsieur le président Méhaignerie –, lesquelles doivent impérativement être résolues pour que la loi produise tous ses effets.

La première priorité du Gouvernement est d'améliorer le fonctionnement des MDPH, les maisons départementales des personnes handicapées, qui constituent un élément central de la réforme de 2005. Leur création a en effet permis d'engager, au plan local, un véritable travail partenarial sur la politique d'accompagnement des personnes handicapées. Mais trois ans et demi après leur création, personne ne peut nier les difficultés de fonctionnement qu'elles connaissent, en dépit des moyens de fonctionnement importants qui leur ont été consacrés par les conseils généraux, l'État et la CNSA, la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Ces difficultés sont d'abord liées à la révolution culturelle que nous avons demandé aux équipes de réaliser en un temps record. Il a fallu que les MDPH passent d'un traitement administratif de masse à un accompagnement individualisé de chaque personne handicapée pour bâtir son projet de vie. C'est la raison pour laquelle notre priorité reste d'accompagner cette révolution culturelle et de poursuivre l'amélioration de la qualité du service rendu aux personnes handicapées et à leur famille : nous avons engagé, avec les associations et les MDPH elles-mêmes, un travail de simplification des procédures et de formation des professionnels des maisons. Nous devons agir plus vite et de façon plus compréhensible, pour les personnes comme pour les équipes.

Mais les difficultés des MDPH viennent également, reconnaissons-le, de la constitution et de la gestion des équipes, liées en particulier aux conditions de la mise à disposition des personnels de l'État. J'entends parfois dire que l'État ne s'est pas investi dans ce dispositif ; c'est faux, bien entendu. Depuis la création des MDPH, en plus du millier d'agents effectivement mis à disposition par l'ensemble des ministères, l'État et la CNSA ont consacré 245 millions d'euros à leur fonctionnement, restant ainsi leurs premiers financeurs, en contribuant à 60 % de leur budget.

L'État s'était engagé à mettre à la disposition des MDPH l'ensemble des moyens humains et matériels jusqu'alors affectés à ses services qui en remplissaient les missions. Cet engagement sera tenu en 2009 : tout sera mis en oeuvre pour que les postes devenus vacants depuis la création des MDPH en 2006 – pour quelque motif que ce soit – soient effectivement pourvus ; ceux qui ne le seraient pas seront systématiquement compensés au plan financier. Un premier versement provisionnel sera opéré avant l'été en fonction des besoins constatés, et le solde sera versé en fin d'année en fonction des postes encore vacants à cette date.

Parce que nous avons demandé aux MDPH d'assumer de nouvelles missions, nous avons également demandé à la CNSA d'augmenter sa dotation en leur faveur de 15 millions d'euros. La dotation de chaque département a été recalculée, et la régularisation est intervenue il y a un mois, le 5 mai dernier. Mais vous conviendrez qu'on ne peut en rester là : améliorer réellement et durablement le fonctionnement des MDPH suppose désormais de faire évoluer leur statut et celui de leur personnel.

Compte tenu de l'urgence qu'il y a à donner aux MDPH les moyens de remplir leurs missions, le Gouvernement pourrait proposer d'avancer sur ce sujet d'ici à la prochaine rentrée. En tout état de cause, cette évolution se fera en concertation avec les différents partenaires concernés, afin que tout soit mis en oeuvre pour permettre aux MDPH de tenir correctement et efficacement leur rôle auprès des personnes handicapées.

Le Gouvernement a également entendu les craintes du monde associatif s'agissant d'éventuels retards dans la mise en oeuvre de la politique d'accessibilité. S'il est inévitable, compte tenu du calendrier fixé par la loi elle-même, que ce volet soit celui pour lequel des progrès importants restent à accomplir, la mobilisation de l'ensemble des acteurs, publics et privés, pour respecter l'objectif d'une société accessible en 2015 est essentielle. Cette date n'est pas seulement importante parce que la loi l'a fixée, elle l'est aussi parce que les personnes handicapées attendent depuis trop longtemps qu'on leur donne les moyens de participer pleinement à la vie de la cité. Pour le Gouvernement, il s'agit d'une priorité absolue et d'un véritable projet de société.

C'est pourquoi, depuis mon arrivée au Gouvernement, j'ai veillé à ce que les engagements pris en matière d'accessibilité soient tenus. Nous avions annoncé un resserrement du calendrier des diagnostics d'accessibilité ; c'est chose faite. Les établissements les plus importants qui accueillent du public devront avoir été diagnostiqués d'ici à la fin de cette année, et non en 2011.

Nous avons voulu renforcer la formation à l'accessibilité ; c'est également chose faite. Le référentiel applicable à toutes les formations concernées – initiales et continues – a été publié en janvier 2009.

Nous avons voulu rendre le téléphone accessible pour les personnes sourdes ; c'est en bonne voie. Le comité de pilotage du premier centre relais téléphonique a été installé en janvier, et il produira un cahier des charges d'ici à cet été.

Par ailleurs, pour tenir les objectifs, le chantier de l'accessibilité doit être accompagné. C'est la raison pour laquelle le plan de relance annoncé par le Président de la République comporte un volet « accessibilité » qui, en matière de transport ferroviaire, par exemple, permettra de doubler en 2009, par rapport à la programmation initiale, le nombre de gares rendues accessibles.

Enfin, le chantier de l'accessibilité doit être piloté ; c'est pourquoi, comme Brice Hortefeux l'avait annoncé en janvier, des travaux préparatoires ont été lancés pour l'installation d'un Observatoire de l'accessibilité chargé de suivre les progrès de ce chantier dans tous les domaines, en lien avec les représentants associatifs et ceux des collectivités locales.

Au-delà de la mise en oeuvre de la loi, le Président de la République a fixé au Gouvernement, le 10 juin dernier, une feuille de route ambitieuse pour la politique en faveur des personnes handicapées, qui s'attache à apporter des réponses adaptées au projet de vie de chacune d'entre elles, quelle que soit sa situation.

Parce que la crise économique ne doit pas devenir une crise de la solidarité, la réforme de l'AAH, l'allocation aux adultes handicapés, vient soutenir le pouvoir d'achat des personnes handicapées. Conformément aux engagements pris par le Président de la République, une revalorisation de 25 % en cinq ans a été mise en oeuvre, ce qui représente un effort de 1,4 milliard d'euros. En septembre 2009, l'AAH atteindra 682 euros, soit, chaque mois, 60 euros de plus qu'au début de 2008.

Au-delà de cette revalorisation exceptionnelle, le Gouvernement a fait le choix d'une politique des ressources adaptée aux différentes situations de vie des personnes handicapées. Pour les personnes qui peuvent travailler, et parce que l'accès à l'emploi doit se traduire par une amélioration des ressources, le Gouvernement a engagé une réforme des règles de cumul entre AAH et salaire : depuis le 1er janvier 2009, la condition d'inactivité d'un an pour percevoir l'AAH est supprimée. Au début de 2010, l'AAH sera calculée tous les trois mois pour s'ajuster plus rapidement aux changements de situation : allocation et salaire pourront être cumulés intégralement pendant six mois, puis de façon partielle jusqu'à 1,3 SMIC sans limitation de durée. Au total, avec la réforme, une personne handicapée avec un salaire de 400 euros verra ses ressources, AAH comprise, augmenter de 118 euros par mois. À temps plein, elle conservera une AAH de 213 euros, là où elle aurait perdu tous ses droits.

Pour compléter les ressources des personnes handicapées qui ne peuvent accéder à l'emploi, les compléments de l'AAH – majoration pour la vie autonome et complément de ressources – seront réformés.

Parce que la dimension professionnelle du projet de vie est essentielle, le Président de la République a également proposé aux employeurs et aux personnes handicapées en situation d'accéder à l'emploi un pacte national pour l'emploi. Celui-ci repose sur des engagements réciproques entre, d'une pat, l'État, qui doit mieux accompagner les personnes handicapées dans leur parcours d'accès à l'emploi et lever les obstacles à leur recrutement, et, d'autre part, les employeurs, qui doivent s'engager sur des plans pluriannuels ambitieux d'embauche et de maintien dans l'emploi.

Un an après, ces orientations, qui acquièrent une importance toute particulière compte tenu de la dégradation actuelle du marché du travail, se sont concrétisées. Depuis le 1er janvier 2009, pour mieux repérer et accompagner les personnes handicapées en capacité d'accéder à l'emploi, les MDPH réalisent un bilan professionnel auprès des demandeurs de l'AAH, ce qui permet à ces derniers de se situer par rapport à leur projet professionnel et, le cas échéant, de bénéficier d'une reconnaissance de leur qualité de travailleur handicapé et d'une orientation professionnelle, ainsi que d'un accompagnement spécifique par le service public de l'emploi. Par ailleurs, une mission d'experts a été chargée d'élaborer un outil d'évaluation global de la situation des personnes handicapées au regard de l'emploi ; elle rendra ses conclusions d'ici à l'été.

Pour lever les obstacles au recrutement des personnes handicapées, un effort particulier a été engagé dans le domaine de la formation : la suppression de la limite d'âge pour l'accès des personnes handicapées à l'apprentissage est effective depuis le 1er janvier 2009. L'ensemble des régions seront prochainement couvertes par des politiques concertées d'accès à la formation professionnelle des personnes handicapées. Par ailleurs, 4 000 entreprises ont d'ores et déjà pu bénéficier d'une aide à la mise en accessibilité de leurs locaux professionnels, et le secteur public peut bénéficier, depuis cet automne, d'une aide équivalente.

Le pacte pour l'emploi a permis une nouvelle mobilisation des employeurs : le nombre d'établissements ayant conclu un accord collectif sur l'emploi des personnes handicapées a augmenté de 15 % en un an dans le secteur privé. Tous les ministères se sont engagés sur des plans pluriannuels d'embauche comportant une hausse d'au moins 25 % du recrutement de travailleurs handicapés en 2008, grâce notamment à l'action du fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Les résultats sont à la hauteur de cette mobilisation : les insertions professionnelles réalisées avec le soutien de l'AGEFIPH – l'Association de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées – ont progressé de 3 % en 2008, au bénéfice de 72 000 personnes handicapées. La fonction publique est particulièrement exemplaire : en 2008, le nombre de recrutements de travailleurs handicapés a augmenté de 50 % dans les administrations de l'État.

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