Si tant de collègues sont intervenus ce soir sur cet article, c'est qu'il traite d'une question d'importance. La commission des finances a déjà procédé à de multiples auditions, dont celle de plusieurs ministres, qui se sont exprimés sur les articles 39 et 40.
M. Bouvard a essayé de défendre, avec l'indépendance d'esprit et l'objectivité que nous lui connaissons, les garde-fous et les mesures de régulation qui pourraient être mis en place. Il n'empêche, cette réforme est aventureuse et en contradiction avec le recours déposé par le Gouvernement devant la Cour européenne de justice contre la décision de la Commission européenne du 10 mai 2007, qui enjoignait à la France de mettre fin aux droits spéciaux de distribution accordés à la Banque Postale, à la Caisse d'épargne et au Crédit mutuel. La Commission ne s'était pas autosaisie, mais répondait à la démarche de quatre banques.
La France fonde pour sa part son recours sur le risque de décollecte qui découlerait de la volonté de Bruxelles de banaliser les livrets. C'est en totale contradiction avec les trois articles figurant dans le projet de loi et, s'il y a danger de décollecte, attendons donc la décision de la Cour européenne de justice, qui pourrait annuler l'injonction de la Commission européenne !
Ester devant la Cour européenne de justice en prétendant qu'il y a danger de décollecte est parfaitement hypocrite puisque vous nous expliquez ici même que le dispositif que vous mettez en place, complété par les amendements adoptés, nous garantit contre ce danger. À croire que vous sciez délibérément la branche depuis laquelle vous vous adressez à la Cour européenne de justice !
Votre démarche est en réalité de circonstance. C'est une posture à laquelle vous ne croyez pas, comme l'a dit à l'instant M. Garrigue.
Si nous sommes si nombreux à intervenir, c'est parce que ce projet heurte au plus profond les consciences républicaines et civiques et touche à une institution qui, elle-même, est consubstantielle de la cohésion sociale et du droit au logement, notamment pour les familles les plus modestes dans notre pays.
Nous pensons, madame la ministre, que le problème juridique se double d'une grande incertitude, que M. Bouvard vient lui-même de reconnaître à l'instant. Comment, a-t-il demandé, va évoluer le système ? L'engagement des ministres pour ce soir vaut-il pour demain ? Quelle régulation ?
Bien sûr, monsieur Bouvard, on peut aujourd'hui essayer de mettre en place des instruments de régulation et de transparence. Mais quelle est la transparence concernant le système bancaire ? Quelle est la transparence dont ont fait preuve les banques concernant l'utilisation des produits du CODEVI, aujourd'hui livret de développement durable ? Quelle est la transparence du système bancaire en général, alors même que, après chaque crise, tous les plus grands experts internationaux disent : « Il faut mettre de la transparence dans le système bancaire » !
À chaque éclatement d'une bulle, à chacun des errements de gestion d'une banque par l'intermédiaire d'un trader qui ne fait qu'intégrer les méthodes de ce système bancaire – et maintenant avec la crise des subprimes –, quelle est la transparence ?
Courir après une transparence et une régulation de manière extrêmement aléatoire aujourd'hui, monsieur Bouvard, revient à faire oeuvre d'apprenti sorcier. Vous l'avez admis vous-même en parlant d'incertitude,