La seconde question qu'il faut se poser est de savoir si, dans le système actuel, cette ressource est définitivement sécurisée. Nous savons bien que les dépôts sur le livret A ont toujours été sujets à des fluctuations significatives – et ce qui se passe en ce moment en est l'illustration, alors même que la réforme n'est pas encore votée. Certes, il n'y a pas eu de décalage entre la collecte et les besoins de financement du logement social, mais la collecte est d'ores et déjà fluctuante.
Le risque de siphonnage n'existe-t-il pas déjà ? Peut-on réellement considérer que les Caisses d'épargne, qui font malheureusement partie des établissements financiers qui, comme l'a rappelé Jean-Louis Dumont, ont beaucoup perdu sur d'autres marchés, se comportent aujourd'hui comme la Caisse d'épargne de Paris en 1818 ? Non, car elles possèdent d'autres produits financiers qu'elles peuvent distribuer en marge du livret A et elles proposent aussi des comptes bancaires.
Le Crédit mutuel qui, pour le coup, est une banque ordinaire, même si elle est mutualiste, n'a-t-il pas déjà la possibilité de siphonner une partie des ressources du livret Bleu au bénéfice d'autres produits bancaires ? La Banque Postale, au fur et à mesure qu'elle se transforme en banque ordinaire, n'a-t-elle pas également cette possibilité pour les plus gros livrets qu'elle détient ?
En définitive, l'ouverture de la distribution ajoute-t-elle au risque ou ne fait-elle que nous confronter à un risque déjà existant, fruit d'une évolution de la ressource que nous n'aurions pas la possibilité de maîtriser en totalité ?