Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Aurélie Filippetti

Réunion du 15 mai 2008 à 15h00
Protection du secret des sources des journalistes — Article 2, amendement 47

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélie Filippetti :

L'article 2, qui modifie et complète l'article 56-2 du code de procédure pénale, accroît les garanties procédurales qui entourent la perquisition concernant un journaliste, mais cela reste insuffisant. Nous pouvons en effet nous interroger sur la pertinence même de l'inscription dans notre droit, et notamment dans la grande loi de 1881 sur la liberté de la presse, d'une officialisation de l'autorisation de perquisitionner les locaux des entreprises de presse, les domiciles des journalistes dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions.

Loin de mettre définitivement fin à la curiosité inévitable des juges à l'égard de ce qui peut se trouver dans les salles de rédaction et les ordinateurs des journalistes, le projet de loi leur en ouvrirait l'accès en toute licéité, sauf à ce que le juge des libertés éventuellement saisi ne considère que la procédure de perquisition est irrégulière – sans que le texte précise en quoi consiste cette irrégularité.

Or, dans l'arrêt Roemen et Schmit contre Luxembourg, la Cour européenne a répété que, si l'on cherche non la preuve de la commission d'une infraction par le journaliste lui-même dans un cas ne ressortissant pas à son activité professionnelle, mais sa source d'information, la mesure de perquisition tombe « à ne pas douter dans le domaine de la protection des sources journalistes ». La consécration du principe de protection des sources impose qu'on évite le plus possible que les magistrats puissent la contourner par la perquisition.

L'amendement vise également à étendre la protection accordée aux entreprises éditrices en cas de perquisition, aux locaux des prestataires techniques, hébergeurs de contenus, fournisseurs d'accès à Internet ou opérateurs de télécommunication, qui détiennent eux aussi des informations protégées par le secret des sources. On sait combien il est aisé aujourd'hui de récupérer les listings d'appels téléphoniques ou les courriels via ces fournisseurs d'accès à Internet ou ces opérateurs.

Il s'agit d'un point extrêmement délicat. Puisque, par nature, une instruction semblera toujours exceptionnelle au magistrat qui la mène, sur quelle base légitime peut-on introduire dans la loi de 1881 le principe d'une perquisition dans des locaux d'une entreprise de presse ou au domicile d'un journaliste ? Pour sa part, la loi belge du 7 avril 2005 prohibe totalement perquisitions, saisies ou écoutes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion