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Intervention de Françoise Vallet

Réunion du 15 mai 2008 à 15h00
Protection du secret des sources des journalistes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Vallet :

Comment définir précisément des expressions comme « questions d'intérêt général », « lorsqu'un intérêt impérieux l'impose » ou « particulière gravité » ? À quoi font-elles référence ?

« Questions d'intérêt général » tout d'abord : qu'est-ce que l'intérêt général ? C'est ce qui détermine la finalité et fonde la légitimité de l'action publique, ce qui supplante le bien commun. C'est une conception volontariste de la démocratie.

L'intérêt général se situe, depuis plus de deux cents ans, au coeur de la pensée politique et juridique française, en tant que finalité ultime de l'action publique. Il occupe une place centrale dans la construction du droit public. L'intérêt général permet de conférer à la puissance publique des prérogatives exorbitantes.

Ainsi, le journaliste se trouverait au service de l'intérêt général et de la collectivité. On peut supposer que, dès lors qu'il n'exerce plus au service de la collectivité, il n'a pas lieu d'être protégé dans l'exercice de ses fonctions.

Ma deuxième interrogation porte sur la formule « lorsqu'un intérêt impérieux l'impose ». Elle renvoie à l'idée de danger, de faits graves. Mais elle n'a pas de fondement juridique, ce qui pose un problème majeur pour un texte de loi. Dès lors, le magistrat chargé de mettre en oeuvre la loi utilisera, pour juger les faits, son libre arbitre et sa propre conception des choses, variable donc. La protection reposant sur des interprétations reste donc incertaine, voire hypothétique.

Ma troisième interrogation porte sur l'expression « particulière gravité ». Qu'est-ce que la gravité ? Mon collègue Noël Mamère a invoqué le latin. Tout le monde sait que gravis signifie lourd, pénible, grave, sérieux. Là encore, tout est question d'interprétation.

Des termes vagues et flous permettront une interprétation personnelle et subjective en fonction du moment. Ainsi, des sources seront divulguées alors qu'il n'y a pas lieu qu'elles le soient. La protection ne pourrait jouer, faute de défense de l'intérêt général, dans les affaires privées ou commerciales, par exemple.

M. le rapporteur a proposé plusieurs amendements qui permettent de corriger en partie ces imperfections ; il nous faut les examiner avec une attention toute particulière.

Toujours, dans un souci de précision, il m'apparaît important que nous réfléchissions à ce que nous devons protéger.

Mon propos n'a pas pour objet de discuter des conditions dans lesquelles le secret pourra être levé – mes collègues socialistes se sont déjà largement exprimés là-dessus. Il nous faut impérativement définir ce que nous devons protéger. Est-ce le journaliste, en tant que personne, ou ses propres sources ?

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