Le rôle d'un journaliste « n'est pas d'être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie », aimait à dire le grand reporter Albert Londres.
Mais comment creuser la plaie pour mieux la nettoyer si le journaliste ne jouit pas de la pleine confiance de ses informateurs ? Et surtout, comment établir ce lien de confiance sans une protection effective, garantie par la loi, et aussi complète que possible, du secret des sources ?
Cette protection, nous ne le soulignerons jamais assez, est consubstantielle à la notion même de démocratie. C'est quand la démocratie est en régression que les journalistes se font arrêter, interroger, embastiller, et que l'on perquisitionne chez eux et ailleurs afin de connaître leurs sources. Un pays qui ne permet pas à un journaliste de protéger ses sources d'information n'est pas un pays totalement libre et, sans cette protection garantissant la liberté d'expression, aucune autre liberté ne saurait exister.
C'est dire à quel point cette proposition de loi était attendue. Comme l'a souligné Mme Filippetti, il y a eu des dérives graves, s'inscrivant dans le contexte d'une dégradation continue tout au long de ces dernières années. Les exemples frappants, et souvent consternants, que notre collègue a cités à la tribune démontrent la nécessité de ce texte.
L'objectif de protection des sources et des journalistes est-il aujourd'hui atteint ? Non, malheureusement. Dès le départ, ce texte, sous sa forme initiale, nous avait déçus par son manque d'ambition et ses ambiguïtés rédactionnelles. On a toujours l'impression que le point d'équilibre n'est pas entre la liberté et la lutte antiterroriste, mais entre les différentes fractions de l'UMP : ceux qui croient en la liberté et ceux qui y croient un peu moins, qui préféreraient la mise en place d'un régime plus autoritaire.