…soit des intentions cachées. Cette imprécision est le fondement de la motion d'irrecevabilité que je défends. Que cette imprécision soit involontaire ou préméditée, le texte est inapplicable et régressif.
La profession s'est tout d'abord réjouie de l'inscription dans la loi de 1881 du principe de protection des sources journalistiques. C'était une promesse du candidat à la Présidence de la République. Celui-ci avait en effet déclaré qu'il accéderait à la revendication de longue date, formulée par les journalistes, de voir leurs sources d'informations protégées, face à la montée de la pression judiciaire et policière sur la presse dans différentes affaires. Je citerai en vrac Clearstream, avec la mise en examen de Denis Robert et les perquisitions au Canard enchaîné, Cofidis, avec les perquisitions au Point, à L'Équipe, et la garde à vue du journaliste et écrivain Guillaume Dasquié. Et la liste est longue.
Mais, s'il est aisé d'afficher en campagne un esprit libéral en promettant à la presse de renforcer sa liberté, il arrive parfois qu'à trop proclamer qu'on la protège, on en vienne à l'étouffer. Lorsque vient le moment d'examiner la lettre du texte, comme nous le faisons aujourd'hui, chaque détail peut se révéler une chausse-trappe. Chaque exception au grand principe proclamé peut pervertir, voire anéantir, l'ensemble du travail effectué.
D'autant que je ne peux passer sous silence, en préambule de notre débat, le contexte délicat dans lequel intervient l'examen du projet de loi. Sans entrer dans les polémiques, l'opposition s'inquiète des attaques répétées portées à l'indépendance de la presse, principe fondamental de notre République et de toute société démocratique. Je pense notamment aux critiques iniques adressées à l'AFP par des collègues de la majorité et aux attaques du Président de la République lui-même, que Mme la ministre de la culture s'est sentie tenue de relayer.
Au moment où la télévision publique et ses rédactions sont fragilisées par le projet de supprimer les recettes publicitaires, au moment où l'AFP négocie le renouvellement de son contrat d'objectifs et de moyens pour être à la hauteur de son statut de deuxième agence mondiale de presse, il est essentiel de rappeler que ce n'est pas au prince de tenir ou de retenir la plume des journalistes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)