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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 7 avril 2008 à 16h00
Organismes génétiquement modifiés — Article 2, amendement 33

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Je veux revenir sur le débat que nous avons eu jeudi dernier, avant la fin de nos travaux, sur l'emploi du mot « recommandations ».

Je voudrais citer un passage d'un ouvrage d'Axel Khan, que je lis actuellement, L'homme, ce roseau pensant, qui est la meilleure justification de nos propos selon lesquels le mot recommandation ne convient pas pour le comité économique, éthique et social :

« L'évaluation d'un projet, d'une procédure, d'une innovation, éventuellement d'une décision voire d'un objet, peut faire appel à trois catégories de valeurs.

« La première englobe les valeurs scientifiques et techniques, qui sont, respectivement, de l'ordre du plausible, du vrai, de l'utilité, de la sécurité. L'appréciation à ce titre d'un projet ou d'une réalisation est du domaine de l'expertise menée par des personnes dont la compétence sur les sujets abordés est reconnue.

« Les valeurs de la seconde catégorie sont d'ordre économique : il s'agit de la valeur du travail, de la valeur d'usage, de la valeur ajoutée, de la valeur d'échange et de leur contrepartie monétaire. Toutes sont précisément quantifiables et peuvent s'exprimer sous la forme d'un prix, dont la fixation dépend des différents paramètres économiques et des mécanismes du marché.

« Restent enfin les valeurs immatérielles, l'ensemble de ce qui vaut la peine qu'on s'y intéresse, de ce qui importe aux citoyens, de ce à quoi on se réfère mais qui n'a pas de prix.

« Les valeurs morales sont de l'ordre du Bien. Un être autonome ou une collectivité, selon des procédures qui leur sont propres, vont se fonder sur ces différentes catégories et ordres de valeurs, afin de déterminer le champ du légitime, du souhaitable et du désirable.

« En définitive, le dilemme à résoudre se pose en ces termes : si ce que l'on propose est sans doute vrai, réalisable et raisonnablement sûr et si c'est là le moyen de développer un marché et d'accumuler des richesses, pour autant est-ce légitime, est-ce souhaitable ? »

Axel Kahn conclut : « L'avenir du XXIe siècle me semble dépendre en grande partie de la pertinence persistante ou dépassée d'une telle interrogation et des procédures mises en oeuvre pour la résoudre. »

On a raccroché une dimension économique au comité éthique. Je pense que la dimension économique aurait très bien pu figurer dans le comité scientifique, dans la mesure où des économistes peuvent aussi bien être dans le comité scientifique que dans le comité que l'on appelle désormais « économique, éthique et social ».

Dans quelle mesure ce comité-là doit-il faire des recommandations ? En fait, c'est un avis qu'il doit émettre pour répondre aux trois questions que pose Axel Kahn : est-ce bien ? est-ce légitime ? est-ce souhaitable ?

Parler de recommandation, monsieur le ministre d'État, nous fait dévier complètement de l'objectif fondamental qui était celui du Grenelle de l'environnement, où il y avait d'un côté les scientifiques, qui donnent un avis, qui ont une appréciation, et de l'autre la société, le comité sociétal. Ce comité sociétal ne doit pas faire des recommandations, mais indiquer si c'est légitime, si c'est bien, si c'est souhaitable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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