Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Yves Le Bouillonnec

Réunion du 10 juillet 2007 à 21h30
Travail emploi et pouvoir d'achat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Bouillonnec :

… et, dans les zones de forte tension d'habitat, par les ménages à revenus moyens.

Dans le domaine du logement, cet avantage fiscal, sans contrepartie sociale, est d'un montant lui-même sans précédent pour le budget de la nation.

Cet avantage accentuera l'incapacité de l'État à assurer ses obligations dans la résorption de la grave crise du logement que notre pays traverse. Depuis 2002, le nombre de demandeurs de logement a poursuivi sa progression. Il avoisine les 1 400 000.

Madame la ministre, ne pensez-vous que cette situation doit pas être prise en compte immédiatement par ce gouvernement ? Quel message votre projet de loi adresse-t-il à ceux de nos concitoyens que cette crise place dans une situation insupportable ?

L'actualisation des aides au logement reste très largement inférieure à l'insupportable augmentation des loyers et des charges.

L'État n'a de cesse de réaliser des économies sur cette ligne de budget. En 2007, elle a été réduite de près de 4 % alors que 300 000 nouveaux ménages arrivent chaque année sur le marché locatif, et l'effort supplémentaire consenti par l'État pour aider les ménages n'est que de 80 millions d'euros. On est loin des 3,7 milliards d'euros de votre nouvel avantage fiscal.

Vous voulez augmenter le pouvoir d'achat. Pourquoi ne pas indexer dès cette année les aides personnelles sur les loyers, comme M. Nicolas Sarkozy, alors candidat, l'avait d'ailleurs évoqué dans son projet pour 2007 ? Ce sont 6 055 000 ménages qui auraient immédiatement bénéficié de ce coup de pouce. Depuis quatre ans, la part des ressources qu'ils consacrent au paiement de leurs loyers ne cesse d'augmenter. Selon les chiffres fournis par le bleu budgétaire, entre 2003 et 2006, le taux d'effort des bénéficiaires de minima sociaux est passé de 15 % à 19,5 % et celui des salariés de 25 % à 27,4 %. D'autant se trouve réduit leur pouvoir d'achat.

En les aidant à assurer le paiement de leur loyer, vous leur permettrez de consommer. Vous n'ignorez pas que les trois quarts des bénéficiaires des aides personnelles ont des revenus inférieurs au SMIC.

Pour l'aide à la pierre, 458 millions sont inscrits en 2007 pour la construction de logements locatifs sociaux neufs, six fois moins que pour l'avantage fiscal que vous instituez aujourd'hui.

Je rappelle que le dispositif Robien, cet avantage fiscal accordé sans plafonnement des loyers et donc sans contrepartie sociale, a été à l'origine d'une spéculation et d'une augmentation des loyers sans précédent. Son coût est estimé à 400 millions d'euros en 2007, ce qui équivaut aux subventions de l'État pour le logement social neuf.

Quant au nouveau prêt à taux zéro, son bénéfice a été étendu à des ménages qui gagnent jusqu'à 7 000 euros par mois. Son coût est passé de 515 millions en 2006 à 770 millions en 2007.

L'effet de ces véritables bombes à retardement budgétaires sera lourd sur l'équilibre des finances publiques, alors qu'aucun indicateur ne permet d'en mesurer l'impact sur l'offre de logements.

Pourquoi ne pas avoir remis en cause le dispositif Robien en plafonnant les loyers, pour permettre à des ménages à revenus modestes de se loger à un meilleur prix ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Pourquoi n'avoir pas augmenté le nouveau prêt à taux zéro pour les tranches de revenus les plus basses afin de favoriser vraiment l'accession sociale ?

Vous n'avez pas oublié, je l'espère, les données statistiques contenues dans le dernier rapport de la fondation Abbé-Pierre sur l'accession sociale. De 2001 à 2006, le nombre des accédants dans le neuf a progressé de 66,33 % pour ceux dont les revenus sont supérieurs à cinq fois le SMIC, de 35,2 % pour ceux dont les revenus sont de trois à cinq fois le SMIC et seulement de 9,8 % pour ceux ayant des revenus inférieurs à trois fois le SMIC. Où est la politique d'accession sociale à la propriété ?

Vous aviez plusieurs possibilités pour favoriser le pouvoir d'achat de ces ménages qui consacrent une part trop grande à payer leur loyer, pour qui l'accession à la propriété restera un rêve, faute d'être vraiment aidés.

Il est vrai que ces objectifs n'étaient pas les vôtres, et Didier Migaud a eu raison de souligner que ce texte illustrait plus une continuité qu'une rupture.

S'agissant des enjeux de l'habitat et du logement, ce gouvernement poursuit l'oeuvre, à nos yeux catastrophique, de son prédécesseur, qui consiste à négliger les effets positifs pour le pouvoir d'achat, l'économie, la relance et la croissance, d'une démarche ambitieuse d'aide à la solvabilisation des ménages, de subventionnement de la construction de logements locatifs vraiment sociaux, d'aide à la réhabilitation de logements anciens, ces deux dernières actions devant s'inscrire dans une démarche de protection de l'environnement elle-même source d'économies et de réduction des charges, ou encore d'un engagement véritable dans l'aide à l'accession sociale.

Nous ne cesserons de le dénoncer, en montrant, comme je viens de le faire, que d'autres politiques sont possibles. Nos amendements vous offriront, madame et messieurs les ministres, l'occasion de manifester une meilleure prise en compte des attentes de nos concitoyens. Mais après vous avoir entendu, qui peut ici y croire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et sur ceux du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion