Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Rachida Dati

Réunion du 9 juillet 2008 à 21h30
Modernisation des institutions de la ve république — Article 26, amendement 107

Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice :

Monsieur Ueberschlag, vous craignez que le mécanisme d'exception d'inconstitutionnalité instauré par le projet de loi ne conduise à remettre en cause l'existence du droit local.

Le Gouvernement comprend l'attachement légitime des populations des trois départements d'Alsace et de Moselle au droit local en vigueur sur le territoire. Le respect des spécificités locales a fait l'objet d'un engagement politique et moral des plus hautes instances de l'État en 1918, lorsque ces territoires français ont réintégré la souveraineté française. En 1946 et 1958, le constituant a choisi de restaurer le droit local alsacien-mosellan mis entre parenthèses après l'annexion allemande. Le droit local alsacien a ainsi été progressivement incorporé dans notre tradition républicaine. Voilà pourquoi vous n'avez rien à craindre de sa confrontation avec le bloc de constitutionnalité.

Contrairement à une idée reçue, le droit local d'Alsace-Moselle est déjà soumis au contrôle des juges. Le Conseil d'État, qui contrôle la compatibilité des lois antérieures à 1946 avec la Constitution de 1958 et le préambule de la Constitution de 1946, a toujours jugé le droit local compatible avec la Constitution de 1958 puisqu'il a déjà rejeté de nombreux recours dirigés contre le régime des cultes d'Alsace et de Moselle : arrêt du 6 avril 2001, ou contre la législation locale sur les associations : arrêt du 22 janvier 1988 Association Les Cigognes.

De même, depuis une décision du 25 janvier 1985, le Conseil constitutionnel contrôle la conformité des lois antérieures à 1958 à l'occasion de leur modification.

Dans ce cadre, jamais une seule disposition du droit local d'Alsace-Moselle n'a été déclarée contraire à la Constitution. Il en a été ainsi très récemment à l'occasion de l'examen de la loi du 21 janvier 2008 sur le code du travail qui modifie le droit du travail d'Alsace-Moselle.

Vous le voyez, monsieur le député, les juges n'ont jamais remis en cause le droit local alors qu'ils disposent déjà de cette faculté. Il n'y a aucune raison non plus de penser que cette jurisprudence puisse évoluer dans un sens différent suite à la révision constitutionnelle. Je pense même que l'exception d'inconstitutionnalité pourra marquer l'ancrage constitutionnel de ce droit local. Celui-ci est toujours sorti renforcé et légitimé de sa confrontation avec le bloc de constitutionnalité.

Le principe constitutionnel d'unité législative du droit des libertés publiques ne soulève pas de difficultés dès lors que le droit local dispose d'une base législative. Vous nourrissez des craintes particulières s'agissant du régime spécifique des cultes. Je rappelle qu'il a été jugé non contraire à la Constitution par le Conseil d'État dans un arrêt du 6 avril 2001. Naturellement, en Alsace-Moselle comme ailleurs, le principe de laïcité s'applique déjà puisque le régime des cultes d'Alsace-Moselle ne méconnaît pas nos principes fondamentaux. D'ailleurs, la commission Stasi l'avait reconnu et confirmé.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion