J'avoue qu'il est un peu aberrant d'évoquer l'article 1er à ce stade du débat ; cela donne presque envie d'en revenir à la discussion générale. Comment, en effet, discuter du principe même du RSA, alors que nous avons déjà engagé la réflexion sur bon nombre d'éléments et fait part de nos interrogations ?
L'article 1er instaure la suppression du revenu minimum d'insertion, et c'est pour moi l'occasion de m'inscrire en faux contre certains jugements sur le RMI que j'ai pu lire ou entendre ici ou là, ou encore percevoir à travers des amendements présentés par certains membres de la majorité.
Si nous nous accordons tous sur le fait qu'il était temps d'actualiser ce dispositif, il faut redire à quel point, depuis 2004, les conseils généraux l'ont pris à bras-le-corps, à quel point les politiques d'insertion se sont amplifiées. Les départements, toutes tendances politiques confondues, ont tenté de trouver les outils d'insertion susceptibles de faire réussir le « I » de RMI, dont nous sommes nombreux à reconnaître qu'il a trop longtemps été un élément défaillant du dispositif.
Rappelons également ensemble qu'il importe de ne pas stigmatiser les publics relevant du RMI en les considérant comme des personnes qui ont cherché à en profiter à outrance.
Si l'actualisation proposée a véritablement vocation à accroître le volet consacré à l'insertion, nous ne pouvons qu'y être favorables. Encore faut-il s'entendre sur ce qui y a derrière le mot « insertion ». Je reprends ici une argumentation qui m'est chère, car elle est le fruit, comme pour beaucoup d'entre nous, de la connaissance d'un territoire. Il est clair que, chaque fois que nous pouvons faire de l'insertion professionnelle un axe majeur de l'insertion tout court, nous devons le faire. Nous savons ce que représente un emploi en termes d'insertion dans notre société. Mais force est de constater que, parmi les personnes relevant des dispositifs de minima sociaux, certaines sont loin de l'insertion professionnelle, pour des raisons diverses tenant aux accidents de la vie, à des problèmes de santé, de logement, de mobilité ou des problèmes familiaux. Or le RSA, en rendant l'insertion professionnelle quasi obligatoire, risque ne pas être adapté à la situation spécifique de certains bénéficiaires actuels des minima sociaux.
Et je ne peux m'empêcher de faire le lien entre cette approche et certaines mesures prises par le Gouvernement depuis quelques mois, consistant à déréguler le marché du travail, à mettre en accusation les personnes à la recherche d'un emploi et à créer des outils qui risquent, j'en ai bien peur, de se retourner contre les bénéficiaires de minima sociaux, qui devront se soumettre aux règles de l'offre raisonnable d'emploi.
C'est pour nous un motif d'inquiétude d'autant plus fort que le contexte économique actuel est très difficile. Or, nous le savons par expérience, lorsque la situation économique s'améliore, les bénéficiaires des minima sociaux sont les derniers à en profiter, et lorsqu'elle se dégrade, ils sont les premiers à en souffrir.