Il est quelque peu étrange de reprendre la discussion à l'article 1er, qui définit les grands principes et les grands objectifs, alors qu'il y a quelques instants à peine, nous « plongions les mains dans le cambouis » pour étudier le fonctionnement des politiques d'insertion.
Mais, puisque nous abordons la discussion des articles relatifs à l'instauration du RSA et à ses différents échelons, il faut souligner que ce dispositif, contrairement à ce que certains voudraient faire croire, ne bouleverse pas les politiques d'insertion existantes. En outre, on peut se demander quel effet auront sur cette politique la remontée du chômage et la période actuelle de décroissance, dont nous espérons qu'elle durera le moins possible, mais qui devrait se prolonger au-delà du premier trimestre de l'année prochaine.
Le RSA n'a d'intérêt que pour ceux qui pourront bénéficier d'une allocation différentielle en reprenant une activité. Or on peut faire l'hypothèse que le retour du chômage, la forte hausse du nombre de demandeurs d'emploi et la décroissance entraîneront une augmentation du nombre de ceux qui émargeront au RSA de base, équivalent du RMI actuel, et qui ne travailleront pas davantage pour autant. On peut donc craindre que votre dispositif ne bénéficie véritablement qu'à ceux qui ont déjà un emploi, et qui ne perdront que quelques heures de travail ; en d'autres termes, qu'il se réduise à un filet de sécurité pour ceux qui sont déjà insérés dans une activité professionnelle, sans jouer le rôle de « pompe aspirante » pour les bénéficiaires actuels du RMI.
On pourrait parler d'un choc des images, ou des situations : nous débattons du RSA, conçu pour accélérer le retour à l'emploi en une période de reprise, à un moment où la crise, déjà présente, s'aggrave et où le chômage est la principale préoccupation.
D'autre part, je m'interroge sur l'alinéa 12 de l'article : si, comme je l'ai dit au cours de la discussion générale en défendant la question préalable, je suis favorable à la définition par le gouvernement d'objectifs quantifiés de réduction de la pauvreté, il ne me semble pas que le RSA, tel qu'il est présenté, suffise à concourir à celle-ci. Nous aurions intérêt à le dire collectivement, car d'autres mesures seront sans doute nécessaires – j'en ai évoqué quelques-unes lors de cette intervention initiale. On ne saurait laisser penser que le RSA pourrait à lui seul, immédiatement, réussir là où le RMI ou l'intéressement auraient échoué, en assurant le retour à l'emploi et une diminution importante de la pauvreté à l'heure où la crise domine.