Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, faire de l'Europe « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable, accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale, dans le respect de l'environnement » : telle était l'ambition proclamée dans le processus de Lisbonne, lors d'un Conseil européen en 2000.
Nous sommes loin du compte. En fait, les décisions prises ont inscrit et continuent d'inscrire l'ensemble de la formation et de la recherche dans les critères marchands de la mondialisation capitaliste, dont on mesure aujourd'hui les effets, avec la crise financière et la crise économique. Alors que l'objectif était de développer l'effort de recherche privée, celle-ci est restée à la traîne et, comme la recherche publique était elle-même intégrée aux contraintes de la mondialisation, c'est l'ensemble du secteur qui est aujourd'hui en difficulté.
Faible proportion d'ingénieurs, faiblesse des liens entre les universités et les entreprises – à cet égard, j'ai bien entendu les propos de M. Garrigue –, manque d'infrastructures d'information et de communication : tel est le constat fait, au début de 2008, par le centre d'analyse stratégique dans une étude sur l'internationalisation de la recherche et développement des entreprises et l'attractivité de la France. Il concluait en ces termes : « La place de la France dans les flux internationaux d'investissements en recherche et développement, si elle est loin d'être négligeable, ne correspond pas à celle qu'elle occupe dans l'internationalisation des activités productives. » De fait, la recherche et développement étrangère en France n'a pas pour finalité la réalisation d'innovations utilisables à l'échelle de la planète, mais plutôt le soutien aux unités de production locales.
Les économies des pays industrialisés s'appuient pourtant de manière croissante sur les activités de recherche et développement, dont l'intensité a des répercussions directes sur les exportations et la croissance.
Dans le double contexte de la crise financière et économique internationale et de la lutte contre le réchauffement climatique, on ne peut que regretter que la France ait renvoyé à 2012 l'objectif de porter à 3 % du PIB l'effort de recherche initialement fixé pour 2010.
De plus, faut-il rappeler que, sans ambition à la hauteur pour la recherche publique, il ne sera pas possible d'atteindre un développement satisfaisant de la recherche-développement, les deux étant intimement liés ?
Pourtant, l'effort budgétaire et fiscal semble appréciable. Avec une augmentation de 21 % sur 2008, il passe de 2,9 à près de 3,6 milliards d'euros.
Relevons cependant que près de 7 millions d'autorisations d'engagement et presque autant de crédits de paiement ont été annulés sur le programme « Recherche industrielle » de 2008. Comment ces annulations ont-elles affecté le programme 2008 ? Compte tenu des inconnues qui pèsent sur le projet de loi de finances pour 2009, on ne peut qu'être inquiets pour son devenir.
Notons aussi que le principal dispositif du secteur, le crédit impôt recherche, cinquième dépense fiscale du budget 2008, représentera une dépense fiscale évaluée à 1 milliard d'euros, en augmentation de 390 millions d'euros par rapport à 2008, tandis que les 71 pôles de compétitivité voient le maintien de l'enveloppe de 1,5 milliard d'euros prévue pour la période 2008-2011, avec un peu moins de 200 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour 2009.
Mais comment ne pas être préoccupé – et c'est un euphémisme – devant le fait que l'explosion du crédit impôt recherche à un tel niveau ne soit pas accompagnée d'un dispositif de contrôle de la bonne utilisation des crédits au jour le jour ? Madame la ministre, je vous ai entendue en commission dire que cette évaluation serait faite au bout de trois ans, mais on sait que la volatilité des entreprises est aujourd'hui telle que les risques existent. C'était déjà une exigence ; cela le serait encore plus si le CIR devait connaître une montée en puissance.
Rappelons d'autres éléments. Comme je l'indiquais déjà l'an passé, il importe de lier l'octroi de toutes les aides publiques au développement de la recherche et développement dans les entreprises.
Nous devons également développer une politique de recherche qui soit davantage tournée vers l'emploi des chercheurs, puisque nous disons tous que la recherche est la clé de l'avenir et que nous savons tous les difficultés qu'ils rencontrent. Pourquoi, dans ce cas, ne pas proposer des thèmes de recherche, dans le cadre des pôles de compétitivité, en permettant de couvrir leurs financements sur les crédits des pôles, ce qui s'ajouterait aux CIFRE existants et permettrait de faire contribuer plus de financements privés à cette priorité ?
Il est également important de bien lier les pôles de compétitivité au développement régional. De ce point de vue – et cette recommandation est largement partagée –, il serait intéressant de faire participer les partenaires sociaux à la gouvernance de ces pôles. L'inclusion d'un volet social et économique est souhaitée, comme dans les projets de recherche.
Il est nécessaire de veiller plus particulièrement, en ces temps de crise, aux problèmes d'accès des PME au financement, cibles annoncées des efforts en matière de recherche et d'investissement. C'est pourquoi je présenterai tout à l'heure un amendement proposant que soit constitué un pôle public financier et de crédit réunissant diverses institutions financières pour permettre et garantir l'accès à des crédits à faible taux afin d'aider les entreprises à développer la recherche, l'emploi et l'investissement productif.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous ne serez pas surpris que mon rapport appelle à un vote négatif sur les crédits de la recherche industrielle.