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Intervention de Laurent Hénart

Réunion du 3 novembre 2008 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2009 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Hénart, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour l'enseignement supérieur et la vie étudiante :

Madame la ministre, je sais que le président de la commission des finances, Didier Migaud, vous a adressé une lettre qui récapitule les sujets sur lesquels la commission a longuement débattu. Comme les moyens sont au rendez-vous et que les chantiers de réforme sont lancés, la discussion n'en a été que plus intéressante. Le fameux milliard supplémentaire par an promis par le chef de l'État en faveur de l'enseignement supérieur se retrouve dans ce projet de budget pour 2009. Cette augmentation se répartit de la façon suivante : 792 millions d'euros de crédits budgétaires en autorisations d'engagement, y compris les écoles dépendant des ministères de l'agriculture, de l'industrie et de la culture ; 170 millions d'euros pour des partenariats public-privé, hors le plan Campus ; 35 millions d'euros de dépenses fiscales valorisées.

Les moyens budgétaires des programmes « Formations supérieures et recherche universitaire » et « Vie étudiante » augmentent à structure constante.

Ce budget poursuit les lignes qui ont été esquissées dès la loi de finances 2008 et s'inscrit dans la programmation 2009-2011, ce dont la commission des finances ne peut que se féliciter. La discussion a porté sur l'autonomie des universités – votée en 2007, mais dont le chantier se poursuit jusqu'en 2012 –, sur l'effort d'investissement massif – dont la mise en oeuvre pose néanmoins question –, ainsi que sur les conditions de vie et de réussite des étudiants, tant le budget, par plusieurs de ses actions, concourt à l'objectif de réussite.

S'agissant de l'autonomie des universités, nous ne pouvons que constater le succès de la mise en oeuvre de la loi LRU : vingt universités accéderont, en effet, au nouveau statut le 1er janvier 2009 ; trente universités seront soumises à un audit en 2009 en vue de leur passage à l'autonomie à partir de 2010, soit plus de la moitié des établissements concernés, sur les deux premiers exercices, ce qui prouve que la loi répond aux attentes des acteurs du secteur.

La commission des finances se doit de souligner l'écho donné aux travaux de la mission d'évaluation et de contrôle. À l'occasion de votre programmation triennale, vous révisez complètement les règles d'allocation des moyens de l'État aux établissements universitaires ; la réforme engagée prévoit de répartir la part à l'activité en fonction de l'activité réelle des établissements et de porter la part à la performance de 6 % actuellement à 13 %, masse salariale comprise.

Deux éléments méritent d'être salués. D'abord, le critère d'activité retenu est le nombre d'étudiants présents aux examens, conformément aux souhaits des deux assemblées. Ensuite, vous avez accepté de moduler la part déterminée par la performance avec un taux plus faible – 5% – pour la formation en licence, et plus élevé – 20 % – pour le programme master et la recherche. Mon collègue Claeys qui est en train d'opiner à mon propos avait, en commission, souligné l'importance de cette différenciation.

Le dispositif d'attribution des moyens en fonction de la performance se décompose ainsi : 80 % des crédits seront attribués en fonction de l'efficacité de l'université, le critère de l'insertion professionnelle étant pris en compte ; 20 % seront attribués en fonction des engagements en matière de contrats en cours et à venir.

Vous avez, madame la ministre, souhaité mettre en oeuvre des actions vigoureuses pour accompagner le passage des établissements au nouveau statut. À cet égard, le plan carrières arrive au bon moment. Mobilisant plus de 252 millions d'euros sur la séquence triennale, il permet de donner un contrat de travail à de nombreux doctorants ; il revalorise le statut des maîtres de conférences en début de carrière et, par l'attribution d'une série de primes, valorise la prise de responsabilité pédagogique, l'excellence en matière de recherche ou d'enseignement. Ce plan permet aussi de revaloriser la fonction de certains personnels administratifs, notamment les bibliothécaires.

En ce qui concerne les compétences des universités, je tiens à souligner qu'un plan permet de les accompagner en matière de formation de 1 500 cadres sur trois ans, prévoit de « repyramider » des emplois de catégorie C en emplois de catégorie A ou B, et qu'une dotation accompagnera les universités dans la prise d'expertise extérieure ou dans l'adaptation de leur système d'information.

S'agissant des frais d'inscription, je connais les efforts de votre ministère en la matière : la circulaire du 1er juillet dernier a permis de les maintenir dans la légalité de l'article L. 719-4 du code de l'éducation. En dépit des efforts déployés par vos services, tout n'est pas encore parfait sur l'ensemble du territoire. Je suis sûr, cependant, que le contrôle de légalité exercé par les recteurs sur les décisions des universités sous nouveau statut sera très utile. En tout état de cause, le Parlement est à votre entière disposition pour faire des propositions en ce domaine.

Par ailleurs, le développement de l'autonomie dans l'enseignement supérieur est l'occasion de bâtir des contrats clairs avec les établissements d'enseignement supérieur privés, d'accroître – dans le sillage des propositions du rapport Chartier – les moyens qui leur sont alloués et de faire en sorte qu'ils soient associés, en toute transparence, au service public de l'enseignement supérieur et de recherche.

Comme en 2008, l'effort d'investissement est massif : près de 300 millions d'euros pour la logistique immobilière, 60 millions d'euros de crédits de paiement – sur les 300 évoqués en 2006 lors de l'inventaire des situations d'urgence dans le patrimoine immobilier – pour la mise en sécurité d'urgence. Vous poursuivez l'effort de remise à niveau. Les grands chantiers ne sont pas oubliés, notamment Jussieu, à hauteur de 197 millions d'euros.

Avec l'ouverture des partenariats public-privé et le lancement du plan Campus, se pose la question de la maîtrise d'ouvrage. Celle-ci est partagée : les investissements lourds ou les constructions sont financés par les établissements universitaires à hauteur de 40 % , par l'État, à hauteur de 30 % et par les collectivités locales directement propriétaires ou maîtres d'ouvrage délégués, à hauteur de 30 %.

À terme, l'autonomie des universités doit passer par une prise complète de responsabilité des établissements sur leur patrimoine immobilier. Les opérations lourdes – réhabilitation, mise à niveau ou construction – doivent être accompagnées par vos services. La commission des finances estime que le moment est venu d'actionner ce levier.

S'agissant de l'opération Campus, je me permettrai de demander à vos services en 2009 ce qu'il en est du placement de la soulte, qui permet, à hauteur de 160 millions d'euros par an, de garantir pendant vingt-cinq à trente ans un revenu, qui nourrit l'investissement et garantit l'entretien et la mise à niveau du patrimoine immobilier après investissement, ce qui était une lacune de la politique immobilière de l'État dans le domaine de l'enseignement supérieur.

Les contrats de plan État-régions 2000-2006 sont devenus les contrats de projet 2006-2013. Je tiens à souligner les efforts de vos services pour coller au mieux aux réalités du terrain avec le rattrapage sur 2000-2006. Au 31 décembre de cette année, le taux de couverture en crédits de paiement des autorisations d'engagement s'établira à près de 90 %. Vous servirez une annuité de plus de 130 millions d'euros, ce qui témoigne de votre volonté de solder ce contrat de projet État-régions et d'engager l'actuel sous de meilleurs auspices que le précédent. Les membres de la commission des finances ont noté que le taux de couverture des crédits de paiement était meilleur que le taux de couverture des autorisations d'engagement, ce qui prouve que vous avez à coeur d'inscrire en autorisations d'engagement – dans l'esprit de la LOLF – les opérations qui paraissent tenables dans le délai triennal et que vous tenez à servir les autorisations d'engagement. Un tel effort s'appréciera bien sûr dans la durée.

En ce qui concerne la réussite et les conditions de vie des étudiants, je tiens à souligner l'effort massif en faveur du plan réussite en licence auquel 730 millions d'euros sont consacrés en cinq ans. Ce plan prévoit cinq heures hebdomadaires d'encadrement pédagogique. Beaucoup de commissaires ont souhaité que vous puissiez suivre les structures de l'ancien article 33 IUT-école, qu'il s'agisse de la validation du projet pédagogique de l'université au moment du contrat quadriennal ou de l'exécution des contrats. Il s'agit, vous le savez, d'un levier important pour la réussite des étudiants. Le placement professionnel, comme la réussite aux examens, est primordial. Il faut donc que notre système de formation supérieur conserve cet atout.

La commission a également souhaité que vous engagiez, avec les élus, un travail sur la carte universitaire. Les nombreuses réformes simultanément engagées – nouveau statut, PRES, fusion d'universités le cas échéant, comme à Strasbourg le 1er janvier prochain – justifieraient en effet que l'on réfléchisse à une rationalisation préservant une desserte satisfaisante des territoires, notamment les plus reculés.

Enfin, s'agissant des aides sociales, deux questions ont été soulevées en commission. Tout d'abord, sans revenir sur les importants efforts de revalorisation budgétaire des bourses, nous aimerions en revoir avec vous l'échéancier de versement. Hérité de l'époque où la rentrée universitaire avait lieu à la mi-octobre, celui-ci pourrait en effet être resserré, conformément à l'esprit du rapport Wauquiez, puisque l'application et la généralisation du LMD conduisent à avancer la date de la rentrée.

Ensuite, la commission des finances a déposé deux amendements d'appel visant à vérifier dans quelle mesure vous vous rapprochez, autant qu'il est possible, des objectifs du rapport Anciaux. Nous sommes conscients des difficultés que posent le foncier s'agissant des constructions, ou les « opérations tiroir » dans les cités universitaires, puisqu'il vous faut les vider avant de les rénover et, en même temps, reloger les étudiants. Nous avons en outre constaté qu'un effort important a été fourni entre les lois de finances initiales pour 2008 et pour 2009. Néanmoins, si 90 % des objectifs du rapport ont été atteints, 10 % restent à satisfaire ; nous aimerions donc en discuter avec vous.

J'insiste enfin sur la nécessité de conserver un cadre national d'évaluation. La loi LRU entraîne une multiplication des initiatives et des décisions sur le terrain, dans les sites et les établissements universitaires ; le phénomène se généralisera à l'horizon 2012. L'État doit donc renforcer son dispositif d'évaluation des objectifs et des performances, lequel doit être d'autant plus national que le service public de l'enseignement supérieur est, au plan fonctionnel, plus décentralisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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