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Intervention de Chantal Berthelot

Réunion du 6 novembre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Berthelot :

Lors de votre audition devant les commissions des lois et des affaires économiques, vous avez déclaré : « Une exigence est déjà posée dans le vocabulaire, à savoir, de ne pas sortir du mot “rattrapage”, […] de tout faire pour que, année après année, une part du budget soit consacrée à celui-ci ». Or l'outre-mer n'échappe pas à l'austérité qui est la marque de la loi de finances pour 2008. Le document de politique transversale affiche au mieux la reconduction pure et simple des crédits en euros courants par rapport à 2007, quand il ne s'agit pas d'une baisse. Ainsi, pour la Guyane, la mission « Enseignement scolaire » diminue de 12 millions d'euros, alors qu'on connaît les besoins en ce domaine ; la mission « Santé » se retrouve avec la même dotation, au centime d'euro près ; la mission « Sécurité sanitaire » régresse, comme les dotations de la mission « Outre-mer », tant pour l'emploi que pour les conditions de vie. C'est le cas aussi de l'ensemble des programmes, dont le programme « Accès et retour à l'emploi », de la mission « Travail et emploi ».

Et pourtant, il suffit de lire n'importe quel rapport sur le sujet de l'INSEE, de l'IEDOM, de l'Observatoire national de la pauvreté pour constater la longueur du chemin qui reste à faire pour atteindre le rattrapage que vous avez évoqué. Cet observatoire, à propos de la forte intensité de la pauvreté et des conditions de vie dans l'outre-mer, note qu'alors que six ménages sur dix mille dans l'Hexagone n'ont pas accès à l'eau, en Guyane, c'est près de 13 % des ménages qui ne sont pas raccordés au réseau d'eau, et 7 % au réseau électrique. Et que dire de l'insuffisance des structures sanitaires, qui tourne en dérision le droit à l'égalité des chances dans la lutte contre la maladie et la mort ? Que dire de l'insécurité liée au banditisme, aux trafics en tout genre, aux activités d'orpaillage clandestin ? Que dire aussi du chômage, que le BIT a estimé à 29 % en 2006 ? Et avec 12 912 RMIstes, c'est une hausse de 63 % sur les dix dernières années !

Oui, madame la ministre, les Guyanais revendiquent depuis des années, en vain, leurs droits inscrits dans la Constitution de la République, rien que leurs droits : leur droit au travail, aux services de base, à un logement, aux soins, à la sécurité, à l'éducation. Il ne peut y avoir de rattrapage sans que l'État assume pleinement sa part de responsabilité, ce qui exige un effort budgétaire supplémentaire et pas uniquement un simple redéploiement des crédits tel qu'il est envisagé dans un énième projet de loi de programme – et avec votre vision.

Car les Guyanais ont une vision de leur développement fondé sur leurs aspirations et sur la richesse naturelle et humaine de leur territoire. Cette vision transparaît dans les différents documents que nous avons établis, que ce soit le schéma régional de développement économique, le programme régional de développement des formations, ainsi que le schéma directeur de l'enseignement supérieur et de la recherche du pôle universitaire guyanais. Et nous avons établi les besoins d'équipements structurants dans un plan exceptionnel d'investissements approuvé à l'unanimité des élus. De même, sur le plan institutionnel, les Guyanais ont pleinement entamé la réflexion sur une évolution statutaire qui s'inscrit dans cette vision. Ces différentes projections témoignent d'un rêve d'avenir partagé qui va au-delà d'un simple rattrapage.

La Guyane dispose d'atouts réels. Elle doit devenir un pôle d'excellence dans les technologies innovantes, aptes à réaliser la révolution écologique. Elle doit jouer son rôle au sein de la nation française et dans l'Union européenne. Elle doit prendre la place qui lui revient, dans le respect de ses réalités géographiques, humaines et structurelles.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, la question est de savoir si l'écoute et l'action de l'État pourront être à la hauteur de l'ambition guyanaise. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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