Monsieur le président, mesdames, messieurs, l'outre-mer étant un ensemble multiforme, il ne saurait être question d'apporter une réponse unique aux collectivités qui le composent. Ceci étant rappelé, tout budget est par définition un acte politique, qui doit honorer en priorité les engagements souscrits, se tenir au plus près des aléas du quotidien et dessiner les contours de l'avenir, en prévoyant les évolutions qui s'imposent.
Le projet de loi de finances pour 2008 répond-t-il à ces exigences ? Au-delà des chiffres, toujours sujets à controverse, il est temps de mettre en avant une transparence absolue et de défendre les principes et les transformations radicales nécessaires.
Concernant les engagements souscrits, l'État continue à transférer des charges sans compensation financière équivalente, voire à proposer d'autres transferts sans aucune compensation. Il rompt 249 contrats aidés de personnes travaillant dans les lycées. L'effort de maîtrise de la dépense publique passe-t-il par leur renvoi ?
Des milliers d'emplois qui se libèrent dans l'enseignement et la fonction publique territoriale nous échappent. Et le comble : des fonctionnaires affectés à des postes qui ne sont pas encore vacants !
L'État n'a pas versé les sommes attendues en 2007 pour assurer les services de la continuité territoriale.
En matière de logement social, qui fait tant débat, et à juste titre, un effort global de 25 millions d'euros est annoncé pour tout l'outre-mer. Il serait de bonne politique de donner le montant de l'aide par pays pour éviter les tiraillements habituels. Ainsi, la Martinique construit à peine 250 logements sociaux par an alors qu'il en faudrait quatre fois plus. Mais les sommes prévues pour cette opération sont-elles destinées à relancer la construction ou à effacer en partie les dettes envers les opérateurs intervenant dans ce secteur particulier ?
Concernant les aléas du quotidien : est-il besoin de rappeler que l'ouragan Dean a frappé la Martinique de plein fouet en août dernier ? Qu'en est-il des mesures annoncées ?
De même, est-il besoin de rappeler l'émoi suscité à l'annonce de la pollution engendrée par l'utilisation an grand bondans de pesticides nocifs comme le chlordécone ? À ce sujet, je mets en garde le Gouvernement contre certains spéculateurs sans scrupule, qui envisagent de construire sur les terres contaminées. Si c'est cela, la décontamination, ne comptez pas sur mon appui !
La défiscalisation envisagée sur le logement social doit tenir compte de ces circonstances. Or, de 40 000 hectares de terres réservés dans le schéma d'aménagement régional, on est tombé à 28 000 aujourd'hui. Si l'on continue dans cette voie, la Martinique va tout droit à la mendicité. Si c'est cela, transformer un inconvénient en avantage, ne comptez pas sur mon appui !
C'est un projet politique et économique qu'il nous faut pour sortir de l'envasement et dessiner les contours du futur martiniquais.
Le Gouvernement propose une zone franche globale d'activités. J'en prends acte, mais encore faudrait-il que le bénéfice fiscal accordé aux investisseurs soit répercuté positivement sur le consommateur.
Par ailleurs, ce système soulève plusieurs autres questions : celle de la détermination et du financement des budgets concernés, celle des mesures de compensation envers les collectivités, celle du critère de choix d'un secteur plutôt qu'un autre. Dois-je rappeler, pour la circonstance, que le conseil régional a pris l'initiative, depuis plus d'un an et demi, de mettre en chantier le schéma martiniquais du développement économique ? Son élaboration définitive est prévue pour la fin de l'année. Sans vouloir prétendre à l'exhaustivité, il aborde l'essentiel des problèmes, des contraintes et des blocages à surmonter. Comme convenu, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, ce document vous sera remis sous peu pour réflexion, concertation et négociation.
Concernant la coopération avec les pays de la Caraïbe, pour être vraiment efficace, la collectivité régionale doit être membre officiel de toutes les instances qui les réunissent pour éviter les déboires auxquels nous sommes trop souvent exposés. C'est ainsi que les accords de partenariat économique prévus par l'Union européenne et les pays de la Caraïbe risquent encore de déplumer la Martinique. Monsieur le secrétaire d'État, c'est ce qui arrive quand on nous met devant le fait accompli ! Tel a été aussi le cas pour la suppression des obligations de service public concernant le transport aérien. Cela a entraîné ipso facto une rareté des sièges et, par là même, une augmentation du prix du billet.
Vous avez récemment déclaré, monsieur le secrétaire d'État, qu'il faudrait : « par ailleurs essayer de ne pas imposer une vision de Paris. C'est déjà détestable pour ceux qui vivent en Savoie et en Bretagne. Cela l'est encore plus pour ceux qui habitent au milieu de l'océan Indien, de l'océan Pacifique, ou de la mer des Caraïbes. » Je saisis la balle au bond et réitère ma demande d'entretien pour aborder sereinement le contenu du schéma martiniquais du développement économique, la question de l'évolution institutionnelle et du changement réel de statut. Ainsi, vous aurez l'opportunité de joindre le geste à la parole et de démentir le vieil adage qui veut que pawoï an bouch pa chaj. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)