Cette spécificité qui, par définition, relève du secrétariat d'État à l'outre-mer, pourra-t-elle encore être reconnue ? Cela commence mal, puisque le transfert s'accompagne d'une diminution des crédits d'environ 20 millions d'euros et de l'abandon, contre l'avis unanime des acteurs locaux, du dispositif de congé et de solidarité. Doit-on donc penser que la loi de programme ne comportera pas de mesures destinées à soutenir ce secteur ?
Le logement social, lui, fait toujours intégralement partie du budget de l'outre-mer. L'état des lieux a été dressé ; il ne s'est pas amélioré magiquement. Les listes d'attente pour un logement social ne cessent de s'étirer. L'habitat insalubre refait surface. La perspective d'accéder à la propriété, même pour les classes moyennes, est de plus en plus improbable. L'État y a sa part de responsabilité : rapports parlementaires et missions de Bercy le déplorent régulièrement.
Renverser cette tendance, c'est d'abord repartir sur des bases claires. En effet, une mise au point s'impose. Les dettes accumulées par l'État ces dernières années à l'égard des opérateurs sociaux sont loin d'être apurées. Cet état de choses brouille les intentions du Gouvernement et nous conduit à nous interroger sur l'affectation des crédits supplémentaires prévus pour 2008. L'augmentation de 25 millions d'euros servira-t-elle à engager de nouveaux programmes de construction ou seulement à éponger les dettes ? Quoi qu'il en soit, on ne peut pas parler d'une augmentation de crédits de paiement pour 2008. Avec 200 millions d'euros, ces crédits sont strictement égaux à la dotation globale de 2007.
Avec ce budget, le logement dans l'outre-mer est une fois de plus renvoyé en situation d'attente. Rappelons qu'il n'a pas bénéficié des mesures du plan Borloo de 2004, qu'il a été exclu de la loi de 2006 portant engagement national pour le logement, et que le texte instituant le droit opposable au logement, s'il a programmé le nombre de logements sociaux à construire, n'a pas prévu les moyens financiers correspondants.
On nous dit aujourd'hui que nous devons attendre la loi de programme pour que la défiscalisation apporte une solution à la crise du logement social. Mais la défiscalisation n'est pas la panacée ! Au mieux sera-t-elle une source complémentaire de financement. Il serait bien hasardeux de fonder une politique de logement social sur un dispositif soumis à l'arbitrage des investisseurs privés.
La ligne budgétaire unique doit être préservée. Parce qu'il ne faut pas soumettre la production de logements sociaux aux aléas de la défiscalisation, et parce qu'il y va aussi de la bonne gestion des finances publiques : un logement social produit avec la défiscalisation coûte en effet presque deux fois plus cher à État qu'un logement produit avec la ligne budgétaire unique.
Le financement du logement social en outre-mer a besoin de sécurité et de lisibilité. C'est pourquoi la programmation pluriannuelle des crédits à hauteur des besoins – comme on l'a fait pour la France hexagonale – est un préalable indispensable. Pour que ces crédits puissent être mobilisés, il est urgent, parallèlement à cette programmation, de réviser les paramètres de financement du logement social. Déconnectés comme ils le sont de la réalité des coûts de construction et du foncier, ainsi que des nouvelles normes réglementaires, leur niveau actuel pénalise le logement social.
La mise en chantier de nouvelles constructions exige aussi que le foncier soit aménagé. Mais équiper les terrains en réseaux d'eau potable et d'assainissement a un coût que les communes sont généralement incapables d'assumer. Il est donc nécessaire de revoir le montant du crédit FRAFU – fonds régional d'aménagement foncier et urbain. À défaut, c'est toute la chaîne de production du logement social qui se trouvera enrayée.
Ligne budgétaire unique consolidée et lisible, paramètres de financement conformes à la réalité, foncier aménagé et disponible : voilà ce que nous aurions voulu trouver dans ce budget, voilà ce que nous aimerions voir figurer en priorité dans la loi de programme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)