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Intervention de Pierre Frogier

Réunion du 6 novembre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Frogier :

Jean-Yves Faberon a écrit : « Les questions de la Nouvelle-Calédonie doivent être débattues par les familles politiques de la Nouvelle-Calédonie, qui savent parfaitement s'approcher et négocier. Les Calédoniens croient tous, sincèrement, en un destin commun. Ils savent que, pour faire vivre l'accord, il faut débattre des désaccords : c'est l'esprit de l'accord de Nouméa, celui de la recherche du consensus. » Très opportunément, il ajoute que cet esprit ne fut pas, cher Didier Quentin, celui de la révision constitutionnelle de 2007 portant gel du corps électoral.

En effet, monsieur le secrétaire d'État, sur ces désaccords, je ne veux plus vivre ce que j'ai vécu il y a un an, à cette tribune. Je ne veux plus subir l'humiliation d'un Congrès de Versailles où tous les groupes se sont exprimés en faveur d'un gel du corps électoral, y compris ma propre famille politique ! J'ai ressenti, ce jour-là, toute la brutalité de la raison d'État, au mépris des valeurs qui fondent notre République. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.– Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Il faut donc que, avec les indépendantistes, nous débattions de nos désaccords pour faire vivre l'accord. Mais, pour donner un sens à ces discussions et en consolider les acquis, il faut que nous soyons capables d'évaluer ce qui a été fait et de donner de nouvelles impulsions.

Est-il inconvenant d'affirmer que les principales dispositions de l'accord de Nouméa ont été négociées il y a dix ans, et pour une durée de vingt ans ? Est-il inconvenant d'affirmer que la Nouvelle-Calédonie d'aujourd'hui n'est plus celle d'il y a dix ans ?

S'il fallait un seul exemple, ce serait celui de l'industrie du nickel, dont la Nouvelle-Calédonie détient plus de 25 % des ressources mondiales. Le prix du nickel a été multiplié par cinq en moins de dix ans et, dans dix à quinze ans, nous espérons mettre 200 000 tonnes de nickel métal sur le marché. C'est un véritable bouleversement de l'économie et donc de la société calédonienne qui s'annonce.

Mais, à ce propos, je tiens à souligner que ce n'est pas parce que des usines métallurgiques nous sont promises, que nous maîtriserons l'exploitation de nos richesses. Dans ce domaine aussi, il faut que la France joue tout son rôle et sache défendre ses intérêts ! Je déplore qu'elle se soit dessaisie des richesses minières de la Nouvelle-Calédonie, aujourd'hui largement contrôlées par des groupes étrangers.

Elle l'a fait par imprévoyance dans le Sud, où le gigantesque gisement de Goro a été confié au Canadien INCO, racheté depuis par le brésilien CVRD. Elle l'a fait par faiblesse politique dans le Nord, où l'extraordinaire massif du Koniambo a été cédé au Canadien Falconbridge, et racheté depuis par le groupe suisse Xstrata.

Ne faut-il pas, d'ailleurs, évoquer d'ores et déjà l'avenir de la SLN – la société Le Nickel – et de ses quelque 2 000 salariés, alors que, dans vingt ans, l'usine de Doniambo – que vous avez visitée – risque de devoir fermer ses portes, faute d'avoir accès à des gisements suffisamment riches ?

Mais il n'est peut-être pas trop tard ! Vous avez, monsieur le secrétaire d'État, à l'occasion de votre récent déplacement en Nouvelle-Calédonie, signé la convention qui permet la création d'un Centre national de recherche technologique sur le nickel et son environnement. Il s'agit d'une démarche exemplaire. Elle associe l'État et les organismes de recherche, les collectivités publiques et les industriels du secteur de la mine, en visant à mieux concilier, dans la durée, l'exploitation des ressources minières et la préservation de l'environnement.

J'émets aujourd'hui le voeu que la création de ce centre national de recherche soit une première étape sur le chemin qui, dans les prochaines années, devrait faire de la Nouvelle-Calédonie une référence en matière de recherche et d'expertise dans tous les champs de connaissance et de réflexion liés au nickel. Je pense, en particulier, à l'économie du nickel et au fonctionnement du marché de ce métal, traditionnellement marqué par des cycles qui ont eu une influence déterminante sur l'histoire de la Nouvelle-Calédonie.

Pour conclure, nous avons besoin de savoir ce que veut la France en Nouvelle-Calédonie, aussi bien dans le domaine politique qu'économique. Au sortir de la présidentielle et des législatives, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, nous connaissons le sentiment dominant, les attentes et les aspirations de la majorité des Calédoniens.

Je demande à notre majorité et au Gouvernement de ne pas les décevoir. Accompagnez-nous dans la mise en oeuvre démocratique et équitable de l'accord de Nouméa, qui est bien mal connu sur tous les bancs de cet hémicycle ! Nous, nous le connaissons, car nous le vivons au quotidien. Faites-nous confiance ! Comme je vous ferai moi-même confiance, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, en votant votre budget pour 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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