Monsieur le ministre des affaires étrangères et européennes, dans moins de quinze jours se tiendra à Genève la conférence dite de Durban II sur la lutte contre le racisme, la xénophobie et l'intolérance. Pour notre part, si nous partageons tous les objectifs affichés, nous sommes très réservés sur son organisation et scandalisés par les conclusions préparées par le Comité des droits de l'homme.
Si la Commission des droits de l'homme de l'ONU a été rebaptisée depuis 2006 « Comité des droits de l'homme », et si l'ancien Secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan, et l'ensemble des États membres ont ainsi souhaité juguler certaines dérives et éviter que les États les plus autoritaires ne fassent de l'entrisme pour se soustraire à la réprobation internationale, cette réforme a-t-elle atteint les objectifs assignés ? Je vous laisse juge : le comité préparatoire de la conférence est présidé par la Libye, avec, pour vice-présidents, les représentants de l'Iran, du Pakistan, de Cuba, de la Russie, de l'Indonésie et de la Turquie. Autant d'États où la liberté de pensée et d'expression, où les droits de l'homme peuvent s'épanouir sans aucune contrainte, n'est-ce pas ?
Le comité demande, à l'initiative de l'Azerbaïdjan soutenu par les pays membres de l'Organisation de la conférence islamique, que tous les États assimilent la critique des religions à du racisme et adoptent des législations pénales qui la répriment. Si les dernières négociations tendent à accréditer un recul des États islamiques, on verra, quand le temps aura dissipé la fumée des manoeuvres sémantiques, réapparaître la réalité, c'est-à-dire la volonté d'interdire de critiquer les religions et les lois de tel ou tel dieu.
La réintroduction du délit de blasphème, cette atteinte directe à la liberté d'expression et à notre laïcité ne suffit encore pas aux yeux de ces pays : ils souhaitent également faire émerger l'idée de « spécificités culturelles » et de « communautés » pour s'exonérer de la Déclaration universelle des droits de l'homme dont on fête le soixantième anniversaire.
Nous ne pouvons plus tolérer que notre pays cautionne par sa présence de telles dérives. Aussi, monsieur le ministre, nous vous demandons solennellement que la France, comme l'ont fait le Canada, les États-Unis et l'Italie, se retire de la conférence de Durban. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.)