Allez voir sur son blog !
La vérité est que votre prétendu volontariat est un coup de canif de plus dans notre droit du travail et un coup de couteau de plus dans le dos des salariés. Plus encore, cette démarche volontaire n'est pas partout requise.
Votre texte va en effet permettre – c'est l'autre danger et peut-être le principal – l'ouverture de droit, cette fois, des commerces le dimanche dans toutes les communes touristiques.
De fait, ainsi que cela a souvent été rappelé, l'enjeu est aujourd'hui la banalisation du travail dominical. Cette situation est clairement inacceptable.
Notre rapporteur a beau affirmer, en se retranchant derrière l'article R.133-33 du code du travail, que seules 497 communes et trois zones seront concernées par le dispositif, la réalité est qu'il sera demain impossible à un préfet d'accorder d'un côté le statut de commune touristique aux communes qui en font la demande au titre des nouvelles dispositions du code du tourisme et, de l'autre, de refuser l'ouverture des commerces le dimanche dans cette nouvelle commune touristique, au nom du code du travail.
Les définitions des communes touristiques dans le code du travail et dans le code du tourisme ont vocation à être rapprochées et nul doute qu'un contentieux abondant naîtra rapidement. Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour se figurer l'aubaine que représentera l'ouverture de ce type de contentieux pour nombre d'enseignes, sans compter la contagion aux enseignes des périmètres d'usage de consommation exceptionnelle qui estimeront être victimes d'une distorsion de concurrence.
Ce n'est pas l'opposition qui entretient ici la confusion, comme vous le prétendez peut-être, monsieur le ministre, en tout cas M. le rapporteur, mais bel et bien le texte de la proposition de loi !
De fait, je livre à votre perspicacité les remarques de Mme Hélène Tanguy, rapporteur en décembre 2005 d'une loi portant diverses dispositions relatives au tourisme, loi qui ratifiait la partie législative du code du tourisme. Mme Tanguy affirmait alors : « Le premier degré du classement, celui des communes touristiques, n'est pas anodin, car il permet de bénéficier de diverses dispositions faisant référence aux communes touristiques dans le droit actuel, telles que la réduction d'impôt sur le revenu pour les logements réhabilités et la dérogation au repos dominical. »
Ne venez pas aujourd'hui nous dire que les stipulations du code du travail et celles du code du tourisme n'ont rien à voir !
Si le juge doit demain apprécier qu'elle était la volonté du législateur, il le fera sur le fondement de telles déclarations. Il en déduira nécessairement que le classement d'une commune en commune touristique aura pour effet de rendre applicables les dispositions relatives au travail dominical.
Si l'on admet par ailleurs que Bercy s'est fixé pour objectif, en assouplissant les conditions à remplir pour bénéficier de l'appellation de commune touristique, de permettre à 5 000 ou 6 000 communes d'y prétendre, on mesure du même coup aisément à quel point il sera difficile de contenir la généralisation du travail dominical dans 15 à 20 % de nos communes.
Contrairement à ce qu'affirme notre rapporteur, il n'est pas exact de dire que « En dix ans il n'y a eu que trente communes touristiques de plus. » La vérité est que depuis l'entrée en vigueur de la loi du 14 avril 2006, soit depuis mars dernier, 150 communes ont déjà demandé à bénéficier du classement au titre de commune touristique. Rien ne permet non plus d'affirmer que les demandes de dérogations permanentes ne se feront qu'à « la marge ». Nous jugeons plus probable un effet de contagion, une extension des dérogations par capillarité, particulièrement dans le contexte regrettable entretenu depuis des années d'une concurrence des territoires.
La situation apparaît d'autant plus inacceptable que le texte stipule, rappelons-le, que l'ouverture sera « de droit » pour tous les commerces et ne sera plus cantonnée à la saison touristique, ce qui aura pour conséquence de mettre en péril les accords existants et conduira une part sans cesse croissante de nos concitoyens à travailler le dimanche, sans compensation d'aucune sorte et sans requérir au préalable l'accord du salarié. Autrement dit, il ne sera pas ici question de volontariat.