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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 7 juillet 2009 à 15h00
Dérogations au repos dominical — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

…se sont embourbés dans leurs contradictions, s'opposant un temps à ce texte, acceptant enfin de le cosigner afin de ne pas encourir les foudres du chef de l'État.

Nous ne sommes, bien sûr, pas dupes des discours entendus depuis plusieurs semaines qui tentent de nous convaincre que le texte de cette proposition de loi est le fruit d'un compromis, qu'il marque un recul par rapport au texte précédent qui justifie qu'il reçoive désormais l'imprimatur des opposants d'hier.

Il n'est pas difficile d'apporter la démonstration que ce texte est, à quelques artifices près, le même que celui dont nous avions entamé l'examen en décembre dernier.

Tout d'abord – et nous ne cessons de le dénoncer – nous sommes une fois de plus confrontés à la méthode de la proposition de loi. Celle-ci présente pour vous un double avantage.

En premier lieu, elle vous permet d'éviter de vous soumettre à l'obligation de négociation préalable avec et entre les partenaires sociaux. Elle vous autorise, ensuite, à vous affranchir de la règle qui veut que désormais chaque projet de loi soit soumis à une procédure préalable d'évaluation.

De fait, nous ne disposons s'agissant de ce texte d'aucune étude préalable relative à son impact économique, notamment sur ses conséquences en termes d'emplois. Nous devons nous satisfaire de vagues déclarations ou affirmations.

Oubliant les dizaines de milliers de suppressions d'emplois publics que le Gouvernement met en oeuvre, M. Devedjian se complaît dans des propos démagogiques et affirme que « dans un pays où il y a autant de chômage que nous en avons aujourd'hui malheureusement avec la crise, c'est quand même un comble d'interdire aux gens de travailler. »

Le rapport est, quant à lui, plus prudent et pour cause. S'il fallait en effet proposer, aujourd'hui, un chiffrage des créations d'emplois, à supposer qu'il y en ait, au regard du nombre d'emplois que cette réforme détruira dans l'artisanat et le petit commerce, tout indique que le solde risque d'être négatif. Quand on sait, ainsi que le rappelle la CFTC, qu'il existait 11 000 magasins de chaussures au Royaume-Uni avant que n'intervienne la réforme autorisant l'ouverture des magasins le dimanche et qu'il n'en reste plus aujourd'hui que 350, nous ne sommes pas précisément enclins à l'optimisme.

J'observe que nous ne disposons pas non plus d'études sur l'impact social et environnemental de ces mesures. Quelles conséquences aura votre réforme sur la vie familiale, la vie associative, les pratiques culturelles ? Quel sera son impact par exemple sur la fréquentation des musées, des cinémas ou des clubs sportifs ? Quelles conséquences auront éventuellement, en termes de santé publique, des mesures qui détériorent le tissu social et familial ?

J'admets qu'il est difficile de disposer à cet égard d'éléments d'évaluation précis, mais j'observe que vous n'avez sollicité aucune forme d'expertise, que vous n'avez sollicité l'avis de personne sur cette question – ni des salariés concernés, ni de sociologues, ni d' économistes, ni de politiques locaux et nationaux, ni d'associations de consommateurs…

Le fait est que vous êtes convaincus de la nécessité de mettre en adéquation la loi avec les pratiques, fussent-elles comme c'est le cas aujourd'hui, illégales. Et vous brandissez des sondages pour tenter de nous convaincre de la légitimité de votre démarche.

Vous vous faites fort ainsi de nous indiquer que 63 % des habitants des grandes agglomérations sont favorables à l'ouverture des commerces le dimanche.

Outre que les études d'opinion citées ne nous disent rien sur l'ouverture dominicale des commerces dans les zones touristiques, qui constitue pourtant un important volet de votre réforme, vous ne faites non plus nulle part mention des sondages qui contredisent votre analyse, notamment ceux réalisés auprès des salariés.

Or lorsque l'on demande aux Français s'ils seraient d'accord pour travailler régulièrement le dimanche, 64 % répondent par la négative et seulement 13 % favorablement. Toujours selon ce sondage Ipsos, réalisé en novembre dernier, les ouvriers y sont défavorables à plus de 65 %, les salariés des professions intermédiaires et les cadres à plus de 67 %.

Les salariés qui demandent à pouvoir travailler le dimanche et viennent manifester devant l'Assemblée nationale à grands renforts logistiques fournis par tous les employeurs de la grande distribution…

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