Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, vous l'avez compris, à la lumière des débats qui nous animent depuis ce matin, en présentant le nouveau projet réglementant le repos dominical, le Gouvernement a relancé un débat forclos qui avait déjà agité la vie parlementaire à la fin du XIXe siècle.
Il ouvre en outre une brèche sans précédent dans les acquis sociaux historiques consacrés par les lois de la République de l906, enrichis par ceux de 1936, notamment au travers du week-end, le congé de fin de semaine.
Cette quatrième mouture qui doit illustrer l'adage « travailler plus pour gagner plus », devenu célèbre, est un leurre, malgré le vernis de modernité dont elle a été enrobée.
Rappeler – ainsi que vous le faites – les évolutions de nos modes de vie depuis cent ans ne doit pas nous conduire à une régression programmée de nos acquis sociaux et sociétaux.
Est-ce faire preuve de modernité que de sacrifier notamment l'équilibre et la réussite des enfants à la loi des caddies ? Quelle vie privée, quelle vie de famille lorsque l'un des parents travaille le samedi, l'autre le dimanche, alors que nos enfants, notre société souffrent justement d'une déliquescence des liens familiaux ?
Lors de la dernière assemblée générale de l'UNAF à Limoges, il y a quelques semaines, le président François Fondard rappelait fort justement à Mme la ministre de la famille, Mme Morano, l'importance de cette pause dominicale où l'on se ressource et où l'on se parle.
Vous qui avez été ministre de l'éducation, monsieur Darcos, est-ce là le progrès attendu pour favoriser la discrimination positive au sein des grandes écoles ?
Est-ce ainsi que l'on aidera les jeunes à intégrer des associations culturelles ou sportives, propres à développer leur construction personnelle et qui constituent un maillon indispensable pour le mieux vivre ensemble dans une société moderne ?
Est-ce ainsi que s'effectuera la transmission inter-générationnelle dont vous avez, par ailleurs, rappelé l'urgente nécessité ? Est-ce ainsi que l'on va gérer ce temps à soi, pour soi, indispensable à l'équilibre de tout un chacun ?
La réponse est non.
Est-ce faire preuve de modernité que de permettre de déplacer les achats de la semaine au dimanche ? Tous les acteurs économiques s'accordent désormais à reconnaître que la consommation est avant tout affaire de pouvoir d'achat. Or ce qui est dit dans cette proposition de loi sur le doublement du salaire le dimanche est bien une « grosse bourde » pour reprendre l'expression du président de la commission des affaires sociales.
À qui faire croire que l'on pourra, le dimanche précisément, avoir un salaire à deux vitesses : l'un pour celles et ceux qui entrent déjà dans un cadre réglementé, et l'autre pour celles et ceux que j'ose appeler les nouveaux volontaires du travail obligatoire, dans une période de crise comme celle que nous traversons ?